Tout le monde parle d’identité sans jamais prendre la précaution de la définir… d’où les imprécisions et amalgames ainsi que les dérives et caricatures que nous voyons exposés, entre autres, dans les médias. L’identité est un processus de construction de sens, pour le sociologue Manuel Castells. C’est important de définir ce dont on parle pour avancer.
Cela étant, de quoi est fait ce processus identitaire de sens ? Qu’est-ce que c’est ? Le philosophe Paul Ricœur vient à la rescousse : l’identité de chaque individu, de chaque groupe possède deux composantes, qui prennent tout leur sens à l’aide de deux questions.
La première question est : « Que suis-je ? » C’est la dimension objective de l’identité. En répondant à cette question, on répond à la question des caractéristiques communes, des points communs qui nous lient aux autres, c’est l’ensemble des traits qui nous font être semblables aux autres et permettent de vivre ensemble, de bâtir un lien social : le fait d’être un humain, un citoyen, le fait d’habiter un même quartier, une même ville, avoir la même conviction religieuse, politique... Pour cette raison, le philosophe la nomme « identité-mêmeté ».
La seconde question est : « Qui suis-je ? » C’est la dimension subjective de l’identité. En répondant à cette question, on répond à la question de ce qui est propre à chacun. C’est l’ensemble des traits qui font notre spécificité, notre unicité, notre personnalité, notre personnage ou notre « caractère propre ». Pour cette raison, le philosophe la nomme « identité-ipséité ».
Et aujourd’hui, que nous apporte cette grille de lecture ? À l’heure de la polémique sur la burqa, qui ne finira pas de sitôt, en plein débat sur l’identité nationale et les élections régionales, cette grille nous fait comprendre que, tous, nous passons de l’identité à l’identitaire. Qu’est-ce à dire ?
De fait, nous privilégions l’identité-ipséité pour nous singulariser au détriment de l’identité-mêmeté, qui ouvre à l’altérité. Chacun y va en effet de sa singularité, chacun affiche son idéologie, ses convictions pour construire son identité, tout le monde revendique son originalité : elle passe au quotidien par le vêtement, la musique, l’alimentation mais aussi plus fondamentalement, par les croyances, les appartenances, les engagements...
Le problème n’est pas cette actualisation de notre identité-ipséité. Non, le vrai problème est autre : la mise au second plan, à chaque fois, de l’identité-mêmeté. Les dissemblances singulières prennent le pas sur les ressemblances collectives. C’est pourquoi la rencontre et la reconnaissance de notre semblable deviennent plus difficiles, et donc l’entrée dans l’altérité. D’où le repli sur soi, la survalorisation de sa spécificité, de son authenticité, d’où l’identitaire…
Quand ce cercle vicieux, qui nous empêche de vivre ensemble, va-t-il donc s’arrêter ? Il revient à chacun d’empêcher l’agrandissement de ce cercle vicieux et de le rompre, pour qu’il devienne cercle vertueux... Comment concrètement ? En commençant à se mettre − ne serait-ce que quelques instants − à la place de l’autre. C’est cela, l’itinérance du point de vue.
Cela étant, de quoi est fait ce processus identitaire de sens ? Qu’est-ce que c’est ? Le philosophe Paul Ricœur vient à la rescousse : l’identité de chaque individu, de chaque groupe possède deux composantes, qui prennent tout leur sens à l’aide de deux questions.
La première question est : « Que suis-je ? » C’est la dimension objective de l’identité. En répondant à cette question, on répond à la question des caractéristiques communes, des points communs qui nous lient aux autres, c’est l’ensemble des traits qui nous font être semblables aux autres et permettent de vivre ensemble, de bâtir un lien social : le fait d’être un humain, un citoyen, le fait d’habiter un même quartier, une même ville, avoir la même conviction religieuse, politique... Pour cette raison, le philosophe la nomme « identité-mêmeté ».
La seconde question est : « Qui suis-je ? » C’est la dimension subjective de l’identité. En répondant à cette question, on répond à la question de ce qui est propre à chacun. C’est l’ensemble des traits qui font notre spécificité, notre unicité, notre personnalité, notre personnage ou notre « caractère propre ». Pour cette raison, le philosophe la nomme « identité-ipséité ».
Et aujourd’hui, que nous apporte cette grille de lecture ? À l’heure de la polémique sur la burqa, qui ne finira pas de sitôt, en plein débat sur l’identité nationale et les élections régionales, cette grille nous fait comprendre que, tous, nous passons de l’identité à l’identitaire. Qu’est-ce à dire ?
De fait, nous privilégions l’identité-ipséité pour nous singulariser au détriment de l’identité-mêmeté, qui ouvre à l’altérité. Chacun y va en effet de sa singularité, chacun affiche son idéologie, ses convictions pour construire son identité, tout le monde revendique son originalité : elle passe au quotidien par le vêtement, la musique, l’alimentation mais aussi plus fondamentalement, par les croyances, les appartenances, les engagements...
Le problème n’est pas cette actualisation de notre identité-ipséité. Non, le vrai problème est autre : la mise au second plan, à chaque fois, de l’identité-mêmeté. Les dissemblances singulières prennent le pas sur les ressemblances collectives. C’est pourquoi la rencontre et la reconnaissance de notre semblable deviennent plus difficiles, et donc l’entrée dans l’altérité. D’où le repli sur soi, la survalorisation de sa spécificité, de son authenticité, d’où l’identitaire…
Quand ce cercle vicieux, qui nous empêche de vivre ensemble, va-t-il donc s’arrêter ? Il revient à chacun d’empêcher l’agrandissement de ce cercle vicieux et de le rompre, pour qu’il devienne cercle vertueux... Comment concrètement ? En commençant à se mettre − ne serait-ce que quelques instants − à la place de l’autre. C’est cela, l’itinérance du point de vue.
* Olivier Bobineau, membre du Groupe Sociétés Religions, Laïcités (CNRS-EPHE), est maître de conférences à l’Institut catholique de Paris et à Sciences-Po Paris. Il vient de publier Former des imams pour la République. L’exemple français (CNRS Éditions, 2010).