Ce 28 février, le Pape Benoît XVI a renoncé à sa charge d’évêque de Rome et donc de premier responsable de l’Eglise catholique. A l’heure où les cardinaux commencent à se réunir à Rome pour élire son successeur, il nous a semblé important de revenir sur les relations nouées par ce pape avec les musulmans, sur ce qu’il a dit du dialogue entre chrétiens et musulmans.
Car, dans la mémoire collective des musulmans la figure de Benoît XVI est souvent associée au discours de Ratisbonne et à l’incompréhension qui en avait résulté chez beaucoup de musulmans, dans les opinions publiques, selon ce qui leur avait été transmis, comme chez de nombreux acteurs du dialogue islamo-chrétien.
Nous avons tenu à ce que chrétiens et musulmans puissent avoir accès à quelques-unes des principales interventions de Benoît XVI sur ce sujet, en suivant un ordre chronologique (1).
C’est justice que de commencer par les premiers propos de Benoît XVI adressés directement à des musulmans, en août 2005, et ce avant le discours de Ratisbonne : « Le dialogue interreligieux et interculturel entre chrétiens et musulmans ne peut pas se réduire à un choix passager. C’est une nécessité vitale dont dépend en grande partie notre avenir. »
En février 2006, beaucoup s’inquiétèrent de l’avenir de ce dialogue après la décision de nommer Mgr Fitzgerald, président du Conseil pour le Dialogue Interreligieux, nonce en Egypte puis de placer ce Conseil sous l’autorité du président du Conseil pour la Culture, le cardinal Poupard. C’est alors que Benoît XVI prononça le discours de Ratisbonne sur les relations entre la foi et la raison. Ses propos introductifs choquèrent ; il y reprenait les termes d’un dialogue entre un empereur byzantin du XIVe siècle et un savant chi’ite au sujet de Muhammad, Prophète de l’islam.
Cela suscita indignation et colère dans l’ensemble du monde musulman. A cinq reprises, le Pape dit alors son estime et son respect pour les musulmans et l’islam. Deux mois après son voyage en Turquie fut l’occasion pour lui, dans ses discours et dans un moment de recueillement à la Mosquée bleue d’Istanbul, de s’engager personnellement dans la relation avec les musulmans.
Les inquiétudes s’apaisèrent lorsque le cardinal Jean-Louis Tauran fut nommé président du Conseil pour le Dialogue Interreligieux. Puis, l’année suivante, à l’occasion du Ramadan 2007, lorsque la « Lettre des 138 » savants et dignitaires musulmans, adressée aux principaux responsables chrétiens dans le monde, fut accueillie très positivement par le Vatican. Des représentants des signataires furent alors invités à un premier Forum catholico-musulman à Rome, en novembre 2008. A l’occasion de chacun de ses voyages, Benoît XVI a tenu à saluer les responsables musulmans des pays ou villes qu’il visitait, ainsi à Paris, aux Bernardins en septembre 2008.
Démentant tous ceux qui lui opposaient Jean-Paul II, homme du dialogue, Benoît XVI s’est inscrit dans la fidélité aux choix du Concile Vatican II, en y apportant ses propres inflexions. S’il ne pensait pas possible un dialogue théologique entre chrétiens et musulmans, il a sans arrêt encouragé le dialogue au quotidien et celui qui sert la justice et la paix dans le monde. A la suite de Jean-Paul II et de manière plus insistante, il a lié le dialogue interreligieux et le combat pour le respect de la liberté de conscience et de culte partout dans le monde.
Soucieux de la recherche de la vérité, Benoît XVI inscrivit le dialogue interreligieux comme une composante essentielle de celle-ci, n’hésitant pas dans l’un de ses derniers discours à dire : « Le chrétien a fondamentalement toute confiance ou, mieux, toute certitude qu’il pourra tranquillement prendre le large dans la vaste mer de la vérité, sans avoir à craindre pour son identité de chrétien. Ce n’est évidemment pas nous qui possédons la vérité, mais c’est elle qui nous possède : le Christ qui est la Vérité nous a pris par la main et, sur le chemin de notre recherche passionnée de connaissance, nous savons que sa main nous tient fermement. Le fait d’être intérieurement soutenus par la main du Christ nous rend libres et en même temps pleins d’assurance. »
Nous espérons que son successeur s’inscrira dans ce dialogue long et exigeant entre chrétiens et musulmans, promu par le concile Vatican II et les Papes depuis cette date. Mais il nous revient de le pratiquer à la base et au quotidien.
C’est la mission confiée par les évêques de France au Service national pour les relations avec l'islam (SRI) qu’ils ont créé en 1973. Avec tous les artisans de ce dialogue, chrétiens et musulmans, nous célèbrerons, ces 40 ans du SRI, le 28 septembre prochain, demandant à Dieu qu’Il nous donne foi, audace et imagination pour poursuivre ce chemin en « pèlerins de la Vérité ».
Note
1. Document à télécharger sur le site du SRI
* Père Christophe Roucou est directeur du Service national pour les relations avec l'islam (SRI ) au sein de la Conférence des évêques de France.
Car, dans la mémoire collective des musulmans la figure de Benoît XVI est souvent associée au discours de Ratisbonne et à l’incompréhension qui en avait résulté chez beaucoup de musulmans, dans les opinions publiques, selon ce qui leur avait été transmis, comme chez de nombreux acteurs du dialogue islamo-chrétien.
Nous avons tenu à ce que chrétiens et musulmans puissent avoir accès à quelques-unes des principales interventions de Benoît XVI sur ce sujet, en suivant un ordre chronologique (1).
C’est justice que de commencer par les premiers propos de Benoît XVI adressés directement à des musulmans, en août 2005, et ce avant le discours de Ratisbonne : « Le dialogue interreligieux et interculturel entre chrétiens et musulmans ne peut pas se réduire à un choix passager. C’est une nécessité vitale dont dépend en grande partie notre avenir. »
En février 2006, beaucoup s’inquiétèrent de l’avenir de ce dialogue après la décision de nommer Mgr Fitzgerald, président du Conseil pour le Dialogue Interreligieux, nonce en Egypte puis de placer ce Conseil sous l’autorité du président du Conseil pour la Culture, le cardinal Poupard. C’est alors que Benoît XVI prononça le discours de Ratisbonne sur les relations entre la foi et la raison. Ses propos introductifs choquèrent ; il y reprenait les termes d’un dialogue entre un empereur byzantin du XIVe siècle et un savant chi’ite au sujet de Muhammad, Prophète de l’islam.
Cela suscita indignation et colère dans l’ensemble du monde musulman. A cinq reprises, le Pape dit alors son estime et son respect pour les musulmans et l’islam. Deux mois après son voyage en Turquie fut l’occasion pour lui, dans ses discours et dans un moment de recueillement à la Mosquée bleue d’Istanbul, de s’engager personnellement dans la relation avec les musulmans.
Les inquiétudes s’apaisèrent lorsque le cardinal Jean-Louis Tauran fut nommé président du Conseil pour le Dialogue Interreligieux. Puis, l’année suivante, à l’occasion du Ramadan 2007, lorsque la « Lettre des 138 » savants et dignitaires musulmans, adressée aux principaux responsables chrétiens dans le monde, fut accueillie très positivement par le Vatican. Des représentants des signataires furent alors invités à un premier Forum catholico-musulman à Rome, en novembre 2008. A l’occasion de chacun de ses voyages, Benoît XVI a tenu à saluer les responsables musulmans des pays ou villes qu’il visitait, ainsi à Paris, aux Bernardins en septembre 2008.
Démentant tous ceux qui lui opposaient Jean-Paul II, homme du dialogue, Benoît XVI s’est inscrit dans la fidélité aux choix du Concile Vatican II, en y apportant ses propres inflexions. S’il ne pensait pas possible un dialogue théologique entre chrétiens et musulmans, il a sans arrêt encouragé le dialogue au quotidien et celui qui sert la justice et la paix dans le monde. A la suite de Jean-Paul II et de manière plus insistante, il a lié le dialogue interreligieux et le combat pour le respect de la liberté de conscience et de culte partout dans le monde.
Soucieux de la recherche de la vérité, Benoît XVI inscrivit le dialogue interreligieux comme une composante essentielle de celle-ci, n’hésitant pas dans l’un de ses derniers discours à dire : « Le chrétien a fondamentalement toute confiance ou, mieux, toute certitude qu’il pourra tranquillement prendre le large dans la vaste mer de la vérité, sans avoir à craindre pour son identité de chrétien. Ce n’est évidemment pas nous qui possédons la vérité, mais c’est elle qui nous possède : le Christ qui est la Vérité nous a pris par la main et, sur le chemin de notre recherche passionnée de connaissance, nous savons que sa main nous tient fermement. Le fait d’être intérieurement soutenus par la main du Christ nous rend libres et en même temps pleins d’assurance. »
Nous espérons que son successeur s’inscrira dans ce dialogue long et exigeant entre chrétiens et musulmans, promu par le concile Vatican II et les Papes depuis cette date. Mais il nous revient de le pratiquer à la base et au quotidien.
C’est la mission confiée par les évêques de France au Service national pour les relations avec l'islam (SRI) qu’ils ont créé en 1973. Avec tous les artisans de ce dialogue, chrétiens et musulmans, nous célèbrerons, ces 40 ans du SRI, le 28 septembre prochain, demandant à Dieu qu’Il nous donne foi, audace et imagination pour poursuivre ce chemin en « pèlerins de la Vérité ».
Note
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* Père Christophe Roucou est directeur du Service national pour les relations avec l'islam (SRI ) au sein de la Conférence des évêques de France.
Lire aussi :
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