Amar Lasfar, président de la Ligue islamique du nord
Saphirnews.com : Pourquoi et comment a été organisé ce rendez-vous avec les candidats aux municipales dans l'agglomération lilloise ?
Amar Lasfar : La Ligue islamique du nord a l'habitude d'organiser des manifestations culturelles, sociales, en dehors de la mosquée. Elle s'est voulue dès sa création comme une structure culturelle. Même si elle est connue pour sa gestion de la mosquée, elle a une vocation socio-culturelle. Ce n'est pas un débat plutôt politique que nous avons organisé, parce que nous n'avons pas le droit, en tant que mosquée, en tant que structure religieuse, de faire de la politique. Mais nous faisons de la culture politique.
Et entre faire de la politique et faire de la culture politique, il y a une grande différence. C'est faire de la culture citoyenne. Comment sensibiliser l'électorat de façon générale, et notamment l'électorat jeune, à participer au scrutin, mais avant de participer au scrutin, qu'il participe au débat. Et pour nous, la manifestation de samedi dernier, c'est un débat. Comme je l'ai dit dans mon discours introductif, une campagne électorale, c'est d'abord un moment de débat avant d'être un souk de récolte des voix. La Ligue islamique du nord offre donc une tribune de débat, de discussion, sur des sujets touchant la société.
Et entre faire de la politique et faire de la culture politique, il y a une grande différence. C'est faire de la culture citoyenne. Comment sensibiliser l'électorat de façon générale, et notamment l'électorat jeune, à participer au scrutin, mais avant de participer au scrutin, qu'il participe au débat. Et pour nous, la manifestation de samedi dernier, c'est un débat. Comme je l'ai dit dans mon discours introductif, une campagne électorale, c'est d'abord un moment de débat avant d'être un souk de récolte des voix. La Ligue islamique du nord offre donc une tribune de débat, de discussion, sur des sujets touchant la société.
Qui était convié à ce débat ?
A. L. : Tous les politiques ! La droite, la gauche, les Verts, le MoDem, tous les candidats de la métropole lilloise. Nous sommes allés au-delà de la ville de Lille en essayant de respecter la parité gauche-droite.
Je ne faisais personnellement pas partie du débat parce que en tant qu'autorité religieuse, je dois respecter mes limites. Mais j'ai tenu, dans un propos introductif, à poser la question suivante : nous, les religieux, nous savons très bien respecter nos limites. Le religieux s'arrête là où le politique commence, d'abord. Ensuite, nous nous interdisons d'apporter des solutions religieuses à des problèmes politiques. Mais nous avons le devoir d'interpeller le politique, en tant que citoyens, pour l'interroger sur l'emploi, sur l'environnement, sur la santé, et sur la partie qui nous revient de droit, à savoir la place de l'islam dans notre pays.
Nous ne nous inscrivons pas dans une logique de repli identitaire, donc nous ne sommes pas là pour interpeller les politiques uniquement sur la facette religieuse.
Je ne faisais personnellement pas partie du débat parce que en tant qu'autorité religieuse, je dois respecter mes limites. Mais j'ai tenu, dans un propos introductif, à poser la question suivante : nous, les religieux, nous savons très bien respecter nos limites. Le religieux s'arrête là où le politique commence, d'abord. Ensuite, nous nous interdisons d'apporter des solutions religieuses à des problèmes politiques. Mais nous avons le devoir d'interpeller le politique, en tant que citoyens, pour l'interroger sur l'emploi, sur l'environnement, sur la santé, et sur la partie qui nous revient de droit, à savoir la place de l'islam dans notre pays.
Nous ne nous inscrivons pas dans une logique de repli identitaire, donc nous ne sommes pas là pour interpeller les politiques uniquement sur la facette religieuse.
Seul un public musulman pouvait participer au débat ou était-il ouvert à tous ?
A. L. : Il était ouvert à tous bien entendu ! C'est vrai que l'écransante majorité du public était musulman, mais du fait que la manifestation a eu lieu en dehors des locaux de la mosquée, à savoir au Grand Palais de Lille, elle était totalement ouverte.
Le public était-il au rendez-vous ?
A. L. : Bien sûr ! Et pour la première fois, la presse a multiplié par dix les chiffres que nous leur avions donné. Nous avons déclaré 2300 participants, et La Voix du Nord en a rapporté 23 000 ! Pour une fois, la presse a gonflé les chiffres !
Qu'est-ce que la Ligue islamique du nord ?
A. L. : La Ligue islamique du nord est une association socio-culturelle créée en 1982 à Lille-sud. Elle a de suite acheté un local, qui est l'actuelle mosquée de Lille-sud et qui fait quelques 2000 m2. Elle y gère la mosquée, l'école arabe (entre 800 à 950 élèves), le lycée Averroès, la Maison du Coran (on y apprend à nos futurs imams la mémorisation du Coran). Elle abrite aussi l'Institut culturel Al Imane des sciences islamiques.
La Ligue s'adresse à un public très cosmopolite et hétérogène. Le public pratiquant a le domaine cultuel. Le public musulman non pratiquant peut également venir chez nous pour la culture. Et le public tout court, qu'il soit musulman ou pas, croyant ou pas, peut bénéficier des activités que nous offrons.
La Ligue s'adresse à un public très cosmopolite et hétérogène. Le public pratiquant a le domaine cultuel. Le public musulman non pratiquant peut également venir chez nous pour la culture. Et le public tout court, qu'il soit musulman ou pas, croyant ou pas, peut bénéficier des activités que nous offrons.
Pensez-vous que les Français musulmans ont des attentes spécifiques ?
A. L. : D'autres structures sont tentées par les demandes spécifiques. Pour moi d'abord, le musulman Français est Français avant d'être musulman. Et cela résume la philosophie de la Ligue, à savoir que nous sommes d'abord des citoyens et on ne se définira jamais dans ce pays d'abord en tant que musulman. Et nous partageons donc 95% des problèmes des citoyens lambdas de notre pays.
Nous avons une demande spécifique, mais elle n'est pas prépondérante. D'ailleurs une grande partie de la demande spécifique n'incombe qu'à nous-mêmes. Je n'ai pas à interpeller le politique pour lui dire de me construire une mosquée. Nous sommes dans une société laïque où le religieux doit s'assumer, notamment en matière de financements.
Seulement ce que je demande, c'est qu'il y ait une équité, une justice, et qu'on ne mette pas des barrières quand il s'agit de construire quelque chose.
Nous avons une demande spécifique, mais elle n'est pas prépondérante. D'ailleurs une grande partie de la demande spécifique n'incombe qu'à nous-mêmes. Je n'ai pas à interpeller le politique pour lui dire de me construire une mosquée. Nous sommes dans une société laïque où le religieux doit s'assumer, notamment en matière de financements.
Seulement ce que je demande, c'est qu'il y ait une équité, une justice, et qu'on ne mette pas des barrières quand il s'agit de construire quelque chose.
Quels sujets ont été débattus samedi ?
A. L. : Il y avait quatre ou cinq axes de débat. Le premier portait sur l'environnement, l'avenir de notre planète, parce que cela ne sert à rien de construire une mosquée alors que nous vivons une catastrophe planétaire. Le deuxième axe tournait autour de la jeunesse et de l'emploi. Le troisième axe s'intitulait "Qu'en est-il de cet héritage ?", puisque le thème de la rencontre était "Les musulmans du nord, entre héritage culturel et participation citoyenne".
Enfin, à la fin, nous avons aussi parlé de cette demande que l'on dit spécifique, de la la place que réserve la ville au culte musulman, pour qu'on en finisse avec les mosquées-caves. Aujourd'hui, les mosquées ont de plus en plus pignon sur rue, et elle font d'abord la fierté des villes, puis celle des musulmans.
Enfin, à la fin, nous avons aussi parlé de cette demande que l'on dit spécifique, de la la place que réserve la ville au culte musulman, pour qu'on en finisse avec les mosquées-caves. Aujourd'hui, les mosquées ont de plus en plus pignon sur rue, et elle font d'abord la fierté des villes, puis celle des musulmans.
Et quelles ont été les réactions des politiques ?
A. L. : Un politique en campagne ne fait que dire oui. Au-delà de ça, nous, dès le début, nous leur avons dit que nous ne voulions pas des réponses, parce que les réponses ou les promesses d'une campagne électorale n'engagent que celui qui les a entendues, nous voulons un débat. Et c'est en quelque sorte un début. Nous voulons peser à travers une campagne, dans le débat. .
Enfin que retenez-vous de ce débat ?
A. L. : D'abord, et c'est tout à l'honneur de la Ligue islamique du nord, nous avons réuni la droite et la gauche, et nous avons engagé un débat. Et puis nous avons participé à la réflexion et avons sensibilisé le public au débat et à la participation citoyenne.