Baptiste Coulmont*, sociologue à l’université Paris-VIII-Vincennes-Saint-Denis, mène ses recherches dans le cadre d’une convention avec la Mission de recherche droit et justice, ce qui lui permet d’avoir accès depuis plus d’un an aux délibérations des personnes qui souhaitent changer de prénom. Son travail, mené dans trois tribunaux d’Île-de-France, lui a déjà permis de dresser un tableau de ces personnes.
Mathieu mieux que Mouloud ? Une discrimination toujours vivace
Plus des trois quarts des requérants ont, au moins, un parent né à l’étranger, révèle le sociologue. Il s’agirait donc d’un phénomène touchant principalement la population issue de la diversité. Ces demandes ont pour objectif une « francisation » mais pas seulement. Des demandes de « défrancisation » sont également faites. Le droit permet, en effet, de changer de prénom dans le cadre d’une « francisation », d’un « préjudice » ou de « l’intégration à une communauté religieuse ».
C’est dans le cadre d’une demande de naturalisation que beaucoup choisissent d’adopter un prénom à consonance française. Les demandes de changement de prénom pour discrimination représentent seulement une demande sur six. Mais, pour M. Coulmont, il s’agit d’un « résultat biaisé par le fait qu’elles sont difficiles à démontrer ». En effet, certaines personnes sont tentées par un changement de prénom car elles sont victimes de discriminations notamment dans leur recherche d’emploi.
Ainsi, l’Observatoire des discriminations, avec sa méthode des prénoms, a constaté qu’une discrimination sur l’origine des prénoms existait. Une enquête menée dans le cadre d’un processus de recrutement a été menée. Résultats : « Les candidats porteurs d’un prénom francophone sont embauchés à 1,85 %, alors que ceux qui portent un prénom africain, maghrébin, turc ou moyen-oriental ne le sont qu’à 1,26 %. Il y a donc un écart de 32 % en défaveur de ces derniers. ».
C’est dans le cadre d’une demande de naturalisation que beaucoup choisissent d’adopter un prénom à consonance française. Les demandes de changement de prénom pour discrimination représentent seulement une demande sur six. Mais, pour M. Coulmont, il s’agit d’un « résultat biaisé par le fait qu’elles sont difficiles à démontrer ». En effet, certaines personnes sont tentées par un changement de prénom car elles sont victimes de discriminations notamment dans leur recherche d’emploi.
Ainsi, l’Observatoire des discriminations, avec sa méthode des prénoms, a constaté qu’une discrimination sur l’origine des prénoms existait. Une enquête menée dans le cadre d’un processus de recrutement a été menée. Résultats : « Les candidats porteurs d’un prénom francophone sont embauchés à 1,85 %, alors que ceux qui portent un prénom africain, maghrébin, turc ou moyen-oriental ne le sont qu’à 1,26 %. Il y a donc un écart de 32 % en défaveur de ces derniers. ».
Adam et Sophia ont la côte : des prénoms transnationaux
Lors de ses recherches, Baptiste Coulmont a également constaté un autre phénomène : les prénoms « transnationaux » sont en plein essor. Il s’agit des prénoms qui ont des « consonances qui peuvent se fondre dans la masse, aussi bien en France que dans d’autres espaces nationaux, maghrébin ou turc notamment » explique-t-il. En choisissant de tels prénoms, les parents veulent protéger leurs enfants de possibles discriminations liées à un prénom « trop africain » ou « trop maghrébin ». Un phénomène qui n’est pas nouveau.
« L’ambiguïté sémantique est parfois explicitement recherchée par les donneurs dans les périodes historiques d’incertitude ou les situations sociales de transition. (…) Chez les Juifs d’Afrique du Nord, des prénoms comme Daniel ou Emmanuel, prénoms hébraïques mais qui ont acquis des lettres de noblesse en français, sont volontiers donnés depuis les années 1930 » nous apprend Michel Bozon dans Histoire et sociologie d’un bien symbolique, le prénom.
« L’ambiguïté sémantique est parfois explicitement recherchée par les donneurs dans les périodes historiques d’incertitude ou les situations sociales de transition. (…) Chez les Juifs d’Afrique du Nord, des prénoms comme Daniel ou Emmanuel, prénoms hébraïques mais qui ont acquis des lettres de noblesse en français, sont volontiers donnés depuis les années 1930 » nous apprend Michel Bozon dans Histoire et sociologie d’un bien symbolique, le prénom.
Problème d’identité ?
Ces changements de noms et ces choix pour des prénoms « transnationaux » soulèvent de nombreuses questions identitaires. Un naturalisé doit-il adopter un prénom français pour prouver son intégration à la France comme le propose Marine Le Pen ? Absurde. Les prénoms « transnationaux » sont-ils un bon moyen de concilier sa double culture ? Pas forcément.
Il ne faut pas oublier que le prénom fait partie de notre identité. C’est pour cela que changer de prénom est un choix très personnel. C’est ce qui permet aux personnes de « rectifier une histoire, de lui donner une unité, de choisir une lignée maternelle ou paternelle, de restaurer l’influence d’un aïeul, de s’inscrire dans un monde plutôt que dans un autre » explique Baptiste Coulmont.
Mais c’est un choix qui tient également compte des valeurs de la société dans laquelle on vit. Il s’agit de « l’emprise du national sur le nominal » comme l’évoque Nicole Lapierre qui a travaillé sur les changements de nom.
Dans une société où les populations issues du Maghreb et de l’Afrique noire sont victimes de discriminations, on comprend pourquoi les prénoms « transnationaux » ont un tel succès.
* Baptiste Coulmont est l'auteur de Sociologie des prénoms, Ed. La Découverte, 2011.
Il ne faut pas oublier que le prénom fait partie de notre identité. C’est pour cela que changer de prénom est un choix très personnel. C’est ce qui permet aux personnes de « rectifier une histoire, de lui donner une unité, de choisir une lignée maternelle ou paternelle, de restaurer l’influence d’un aïeul, de s’inscrire dans un monde plutôt que dans un autre » explique Baptiste Coulmont.
Mais c’est un choix qui tient également compte des valeurs de la société dans laquelle on vit. Il s’agit de « l’emprise du national sur le nominal » comme l’évoque Nicole Lapierre qui a travaillé sur les changements de nom.
Dans une société où les populations issues du Maghreb et de l’Afrique noire sont victimes de discriminations, on comprend pourquoi les prénoms « transnationaux » ont un tel succès.
* Baptiste Coulmont est l'auteur de Sociologie des prénoms, Ed. La Découverte, 2011.
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