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Religions

De Paris à Bangui, des religieux musulmans alertent contre « le danger de l'ignorance »

Rédigé par | Mercredi 8 Juillet 2015 à 08:05

           


Tout au long du mois du Ramadan, 14 délégations musulmanes répondant sous le nom des « Caravanes de la paix » sont envoyées aux quatre coins de la planète. Les initiateurs du projet, parrainé par un récent organisme international appelé Conseil des sages musulmans (CSM), se sont donnés pour ambition de promouvoir la ligne du juste milieu de l’islam et de « mettre en exergue les valeurs humanistes que cette religion exhorte à mettre en application pour protéger les peuples » et leur éviter de sombrer dans des conflits dévastateurs.

La première Caravane de la paix s’est rendue à Paris, près de six mois après les attentats contre Charlie Hebdo, du 22 juin au 27 juin. Dans la délégation, on comptait Oussama Nabil et Sami Mandour, deux professeurs d’Al-Azhar présents en leur qualité de représentants du cheikh Ahmed al-Tayyeb, le grand imam d'une des plus prestigieuses institutions sunnites du monde musulman. C'est aussi lui qui préside le CSM, composé à ce jour de 14 personnalités dont le théologien mauritanien Abdullah bin Bayyah, leader du Forum de la promotion de la paix dans les sociétés musulmanes pendant lequel la décision de créer le Conseil des sages musulmans a été prise en mars 2014 à Abu Dhabi.

« Sauver l’humanité du danger de l’ignorance »

Leur semaine parisienne fut ponctuée de rencontres dont l'une d'elles a été organisée le 24 juin au Sénat, où se sont réunis pour une table-ronde une vingtaine de chercheurs, d’universitaires et de journalistes sous le patronage de Jean-Marie Bockel, le porte-parole de l'UDI chargé des questions internationales, le tout à l'initiative de Charles Saint-Prot, directeur de l’Observatoire d’études géopolitiques. Il faut « rétablir des vérités en faisant la distinction qui s’impose entre l’islam véritable, religion du juste milieu, et les dérives extrémistes » qui ne sont le fait que d’une infime minorité, a-t-il introduit, affirmant que les crises politiques, à l’instar de l’invasion américaine en Irak, sont à l’origine de l’extrémisme, « pas les religions ».

« Le Conseil des sages musulmans a une vision claire à savoir : l'établissement des sociétés sûres qui vénèrent la science et les savants, enracinent les valeurs du dialogue, de la tolérance, du respect de l'Autre », a présenté Oussama Nabil, chef de la délégation française. « L’objectif de sa mission consiste à éliminer les causes de la désunion et de la discorde dans les sociétés et à œuvrer pour réaliser la conciliation pacifique et le dialogue. C’est une mission légitime qui s’inscrit dans une préoccupation humaniste », poursuit-il, car il s’agit de « sauver l’humanité du danger de l’ignorance » qui conduit au fanatisme religieux.

De Paris à Bangui, des religieux musulmans alertent contre « le danger de l'ignorance »

Refuser le procès de l’islam

L’islam « prône le juste milieu et la modération (…) et toute valeur qui aide à mettre en œuvre cette miséricorde et ce juste milieu. Une religion qui résume sa mission dans la miséricorde et le bon comportement envers l’Autre pourrait-elle appeler à ce qui pourrait même porter atteinte à la valeur du vivre ensemble et alimenter le conflit entre les humains ? », a exprimé à son tour Sami Mandour, directeur du département d'études françaises à Al-Azhar.

« Prétendre que ces mouvements terroristes armés sont nés au sein de l'islam, ou que les enseignements de cette religion sont ceux qui les produisent n'est pas vrai de tout. Car les enseignements des religions sont les premiers à désavouer ces criminels, ainsi que leurs crimes odieux et inhumains », a martelé le professeur.

Les « raisons sociales, politiques, économique et éducatives » sont autant de causes favorisant les extrémismes ; « alors pourquoi l'islam assume-t-il la responsabilité de ces quelques personnes transgressant ses enseignements malgré la condamnation claire et la dénonciation prononcée par les musulmans », a-t-il déclare, de son siège situé aux côtés de Mohammed Moussaoui, président de l’Union des mosquées de France qui travaille en étroite collaboration avec le nouvel Institut international de formation des imams au Maroc, et de la doyenne Anne Banny de l’Institut catholique de Paris. Celui-ci s’est rapproché dernièrement d’Al-Azhar sur le terrain de la littérature et leur partenariat pourrait se concrétiser, dans un avenir proche, par des échanges d’étudiants.

Partout, pour tous

« La religion est devenue le métier de celui qui n’a pas de métier » et qui s’arroge le droit d’interpréter des Textes sacrés « en dehors du temps et de l’espace », constate amèrement, au détour d’une question de la salle, Oussama Nabil, qui a rapidement évoqué l’existence de l’Observatoire des extrémismes religieux, une structure d’Al-Azhar qu’il dirige en vue de « suivre de très près » ce que les mouvements terroristes – entre autres - publient autour de l’islam.

Après Paris, ce fut au tour de Bangui, capitale de la Centrafrique, de recevoir la visite d'une seconde délégation des Caravanes de la paix. C'est dans un tout autre contexte qu'elle s'est rendu puisque le pays est ravagé par une guerre civile née d'affrontement communautaires mais avec un même appel au dialogue et à la paix délivré à partir de références islamiques à la portée universelle. L'efficacité de la démarche soutenue par le Conseil des sages musulmans pose question tant il reste des efforts de communication à faire. L'initiative, passée inaperçue en France, n'en demeure pas moins louable et vient s'ajouter à la longue liste de réponses formulées par des musulmans à travers le monde contre l'extrémisme religieux et ses conséquences en termes d'image pour l'islam et ses fidèles.



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur


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