La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a validé, mardi 1er juillet, la conventionalité de la loi d’interdiction du voile intégral en France. Le verdict a été rendu après réunion en assemblée plénière des 17 juges qui représentent les 47 pays du Conseil de l'Europe.
Sur les 17 magistrats, Angelika Nussberger (Allemagne) et Helena Jäderblom (Hongrie) ont émis une opinion dissidente que relève aujourd'hui Saphirnews. Ces deux juges estiment que « des droits individuels concrets garantis par la Convention » ont été « sacrifiés à des principes abstraits » par la décision de leurs pairs.
Sur les 17 magistrats, Angelika Nussberger (Allemagne) et Helena Jäderblom (Hongrie) ont émis une opinion dissidente que relève aujourd'hui Saphirnews. Ces deux juges estiment que « des droits individuels concrets garantis par la Convention » ont été « sacrifiés à des principes abstraits » par la décision de leurs pairs.
Une violation de la liberté religieuse
« Nous doutons que l’interdiction totale du voile intégral dans l’espace public poursuive un but légitime. Quoi qu’il en soit, une interdiction aussi générale, qui touche au droit de toute personne à sa propre identité culturelle et religieuse, n’est à notre sens pas nécessaire dans une société démocratique. Partant, nous concluons à la violation des articles 8 et 9 de la Convention » qui appellent au respect de la vie privée et familiale et à la liberté de religion, ont-elles fait savoir.
« Si la communication est essentielle pour la vie en société, le droit au respect de la vie privée comprend également le droit de ne pas communiquer et de ne pas entrer en contact avec autrui dans l’espace public – en somme, le droit d’être un "outsider" », indiquent-elles.
Selon les 15 juges qui ont validé la conventionalité de la loi, le vivre-ensemble est « un objectif légitime » qui a particulièrement fait pencher la balance en faveur de la France. Angelika Nussberger et Helena Jäderblom ont ainsi émis « de fortes réserves par rapport à cette approche », voyant ce concept comme « factice et vague ».
« Il est vrai que le "vivre ensemble" requiert la possibilité d’échanges interpersonnels. Il est également vrai que le visage joue un rôle important dans les interactions humaines ». Cependant, « cette idée ne peut pas être détournée pour justifier la conclusion selon laquelle aucune interaction humaine n’est possible si le visage est intégralement dissimulé », appuient-elles, citant pour preuves « des exemples parfaitement admis dans la culture européenne » tels que le port de costumes pendant le carnaval, les personnes pouvant socialiser i[« sans forcément se regarder dans les yeux »].
« Si la communication est essentielle pour la vie en société, le droit au respect de la vie privée comprend également le droit de ne pas communiquer et de ne pas entrer en contact avec autrui dans l’espace public – en somme, le droit d’être un "outsider" », indiquent-elles.
Selon les 15 juges qui ont validé la conventionalité de la loi, le vivre-ensemble est « un objectif légitime » qui a particulièrement fait pencher la balance en faveur de la France. Angelika Nussberger et Helena Jäderblom ont ainsi émis « de fortes réserves par rapport à cette approche », voyant ce concept comme « factice et vague ».
« Il est vrai que le "vivre ensemble" requiert la possibilité d’échanges interpersonnels. Il est également vrai que le visage joue un rôle important dans les interactions humaines ». Cependant, « cette idée ne peut pas être détournée pour justifier la conclusion selon laquelle aucune interaction humaine n’est possible si le visage est intégralement dissimulé », appuient-elles, citant pour preuves « des exemples parfaitement admis dans la culture européenne » tels que le port de costumes pendant le carnaval, les personnes pouvant socialiser i[« sans forcément se regarder dans les yeux »].
Le pluralisme « sélectif » de la France
Soulignant que les partisans d’une interdiction totale du niqab ont essentiellement fait valoir, lors des débats qui ont précédé la loi, « les valeurs de la République exprimées par la devise "liberté, égalité, fraternité" », ces mêmes valeurs peuvent tout autant appeler à « l’acceptation de ce code vestimentaire religieux et l’adoption d’une approche intégrationniste ».
De l’avis des deux juges, « c’est à juste titre que la requérante soutient que le législateur français restreint le champ du pluralisme » et que l’interdiction générale peut être interprétée « comme le signe d’un pluralisme sélectif et d’une tolérance limitée » alors même que la CEDH « se réfère au "pluralisme", à la "tolérance" et à "l’esprit d’ouverture" comme étant les piliers d’une société démocratique et dit en substance qu’il est acceptable de faire prévaloir ces valeurs sur le style de vie et le code vestimentaire d’inspiration religieuse d’une petite minorité dès lors qu’il s’agit d’un choix de société ».
« Même si nous admettions que les droits de la requérante au regard des articles 8 et 9 de la Convention puissent être mis en balance avec des principes abstraits (…), nous ne pouvons souscrire à l’avis de la majorité selon lequel l’interdiction était proportionnée au but poursuivi », indiquent-t-elles, rappelant que le niqab est un phénomène marginal mais également qu'il n’existe « aucun droit à ne pas être choqué ou agressé par différents modèles d’identité culturelle ou religieuse, même par ceux qui sont aux antipodes du style de vie traditionnel français ou européen ».
Les deux magistrates enfoncent le clou : « À notre avis, on ne peut attendre de cette mesure d’interdiction qu’elle ait l’effet souhaité de libérer des femmes prétendument opprimées : au contraire, elle les exclura encore plus de la société et elle aggravera leur situation. » Cette opinion, si elle n'a pas pesé lourd dans la balance, a au moins pu être exprimée dans l'arrêt et rendue publique.
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De l’avis des deux juges, « c’est à juste titre que la requérante soutient que le législateur français restreint le champ du pluralisme » et que l’interdiction générale peut être interprétée « comme le signe d’un pluralisme sélectif et d’une tolérance limitée » alors même que la CEDH « se réfère au "pluralisme", à la "tolérance" et à "l’esprit d’ouverture" comme étant les piliers d’une société démocratique et dit en substance qu’il est acceptable de faire prévaloir ces valeurs sur le style de vie et le code vestimentaire d’inspiration religieuse d’une petite minorité dès lors qu’il s’agit d’un choix de société ».
« Même si nous admettions que les droits de la requérante au regard des articles 8 et 9 de la Convention puissent être mis en balance avec des principes abstraits (…), nous ne pouvons souscrire à l’avis de la majorité selon lequel l’interdiction était proportionnée au but poursuivi », indiquent-t-elles, rappelant que le niqab est un phénomène marginal mais également qu'il n’existe « aucun droit à ne pas être choqué ou agressé par différents modèles d’identité culturelle ou religieuse, même par ceux qui sont aux antipodes du style de vie traditionnel français ou européen ».
Les deux magistrates enfoncent le clou : « À notre avis, on ne peut attendre de cette mesure d’interdiction qu’elle ait l’effet souhaité de libérer des femmes prétendument opprimées : au contraire, elle les exclura encore plus de la société et elle aggravera leur situation. » Cette opinion, si elle n'a pas pesé lourd dans la balance, a au moins pu être exprimée dans l'arrêt et rendue publique.
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