Guide escroc à la loupe
Le guide (ou mutawwif, en arabe), durant le pèlerinage à La Mecque, est la personne qui normalement va aiguiller, prendre en charge les pèlerins qu'il emmène avec lui afin que leur pèlerinage se passe dans les meilleures conditions possibles et que les rites soient correctement effectués. Malheureusement, cette fonction, usurpée par des personnes peu scrupuleuses et très avides qui y ont vu le filon idéal pour gagner un maximum d'argent, n'est pour beaucoup pas assumée correctement, loin de là.
Poursuivant son descriptif du hajj et de ses aspects logistiques, Ouria Sheherazade Kahil, responsable des formations au sein de l'association SOS Pèlerin, a choisi d'élaborer un "profil du guide escroc". Celui-ci n'est le plus souvent pas imam, n'a aucune formation cultuelle, et a été propulsé guide car il a en général plusieurs pèlerinages à son actif ou qu'il possède un réseau de connaissances suffisant lui permettant de se faire connaître auprès de futurs pèlerins. Doté parfois d'un certain charisme, le guide escroc prépare son hajj déjà durant le mois de Ramadan, en ne ratant aucune prière, qu'elle soit obligatoire ou surérogatoire, s'habillant fréquemment traditionnellement d'une jellaba, et adoptant un comportement noble.
Poursuivant son descriptif du hajj et de ses aspects logistiques, Ouria Sheherazade Kahil, responsable des formations au sein de l'association SOS Pèlerin, a choisi d'élaborer un "profil du guide escroc". Celui-ci n'est le plus souvent pas imam, n'a aucune formation cultuelle, et a été propulsé guide car il a en général plusieurs pèlerinages à son actif ou qu'il possède un réseau de connaissances suffisant lui permettant de se faire connaître auprès de futurs pèlerins. Doté parfois d'un certain charisme, le guide escroc prépare son hajj déjà durant le mois de Ramadan, en ne ratant aucune prière, qu'elle soit obligatoire ou surérogatoire, s'habillant fréquemment traditionnellement d'une jellaba, et adoptant un comportement noble.
Arnaques en tous genres
Ayant tissé des liens étroits avec les fidèles de la mosquée qu'il fréquente, le guide escroc va ensuite effectuer son "casting" parmi les personnes ayant émises le souhait de se rendre en pèlerinage. Tout d'abord, il diversifie le groupe qu'il constitue en y intégrant des personnes âgées en majorité, plus quelques jeunes, qui l'épauleront à coup sûr en cas de difficultés. Ensuite, le guide escroc va personnaliser et retravailler la publicité diffusée par l'agence, parfois en y inscrivant des prix subjectifs susceptibles d'être plus adaptés au pouvoir d'achat de sa future probable clientèle.
Une fois le "casting" effectué, reste la procédure qui mènera jusqu'au voyage. Par peur de la concurrence, féroce, le guide escroc conseillera à ceux qui souhaitent partir avec lui de lui amener rapidement leurs documents d'identité (passeport, carte nationale d'identité) ainsi que de lui verser la somme prévue pour le voyage, en espèces, très rarement par chèques.
En fait, lorsqu'un guide réussit à amener à l'agence de voyages vingt pèlerins, il obtient deux places gratuites. Or, le guide escroc ne s'en contente pas. Il prendra plus, voire beaucoup plus de pèlerins dans son groupe, et emmènera son épouse avec lui afin que cette dernière puisse canaliser les femmes du groupe. Ensuite, afin de rentabiliser au maximum son voyage, une fois sur le sol saoudien, il fera croire aux pèlerins qu'il est censé guider toutes sortes de choses afin de leur soutirer un maximum d'argent. Ainsi, les guides escrocs réussiraient à obtenir, selon les chiffres avancés par l'association SOS Pèlerin, entre 200 et 110 euros par pèlerin ! A Lille, raconte même Mme Kahil, un imam aurait formé un groupe de 113 personnes !
Une fois le "casting" effectué, reste la procédure qui mènera jusqu'au voyage. Par peur de la concurrence, féroce, le guide escroc conseillera à ceux qui souhaitent partir avec lui de lui amener rapidement leurs documents d'identité (passeport, carte nationale d'identité) ainsi que de lui verser la somme prévue pour le voyage, en espèces, très rarement par chèques.
En fait, lorsqu'un guide réussit à amener à l'agence de voyages vingt pèlerins, il obtient deux places gratuites. Or, le guide escroc ne s'en contente pas. Il prendra plus, voire beaucoup plus de pèlerins dans son groupe, et emmènera son épouse avec lui afin que cette dernière puisse canaliser les femmes du groupe. Ensuite, afin de rentabiliser au maximum son voyage, une fois sur le sol saoudien, il fera croire aux pèlerins qu'il est censé guider toutes sortes de choses afin de leur soutirer un maximum d'argent. Ainsi, les guides escrocs réussiraient à obtenir, selon les chiffres avancés par l'association SOS Pèlerin, entre 200 et 110 euros par pèlerin ! A Lille, raconte même Mme Kahil, un imam aurait formé un groupe de 113 personnes !
Etapes du pèlerinage à La Mecque
Tout se vend
A titre d'exemples, précisons que les visas vers l'Arabie Saoudite sont souvent vendus, entre 50 à 200 euros, alors que l'ambassade d'Arabie et les consulats les délivrent gratuitement. De plus, alors que les prix avant le voyage sont affichés "tout compris", une fois sur place sur le sol saoudien, les guides escrocs vont par exemple faire payer aux pèlerins la bête à sacrifier le jour de la Fête du sacrifice. Et non seulement les pèlerins vont payer, mais ils sacrifieront leur bête au triple du prix normal. Car selon les dires de Mme Kahil, qui se serait elle-même rendue chez les bouchers locaux le jour de la Fête du sacrifice afin de se renseigner sur les prix réels, ceux-ci lui auraient précisé qu'ils s'élèvent à 250 (environ 60 euros) rials par bête, alors que les guides les vendent jusqu'à 600 rials (environ 140 euros) !
Autre exemple d'arnaque tout aussi scandaleuse, certains guides crapuleux, à l'heure du retour de La Mecque, précisent aux membres de leur groupe que leurs bidons de 5 litres d'eau bénite de Zamzam doivent être mis à part de leurs bagages afin d'être acheminés dans une autre soute à bagages. Or, ce que ne savent pas les pèlerins qui, une fois arrivés à destination, ne retrouvent pas cette eau si précieuse pour eux, c'est que cette dernière se retrouve souvent vendue par leurs guides dans des épiceries, souvent en province. Mme Kahil, qui l'explique à une assistance médusée, précise qu'elle aurait obtenu des aveux complets d'épiciers vendant cette eau et l'ayant par la suite retirée de leurs étalages.
Et les agences dans tout cela ? Si autant de dérives sont à déplorer, elles en sont tout autant responsables, puisque aucun contrat de travail en bonne et dûe forme n'est élaboré entre elles et leurs guides. De plus, elles laissent souvent les pèlerins dans le flou le plus total, et ce jusqu'à la dernière minute, les dates de départ n'étant pas précisées ou étant corrigées en dernière minute, entrainant parfois pour les pèlerins des frais d'hôtels et de bouche inconsidérés quand on connaît le niveau de vie de la plupart d'entre eux.
Autre exemple d'arnaque tout aussi scandaleuse, certains guides crapuleux, à l'heure du retour de La Mecque, précisent aux membres de leur groupe que leurs bidons de 5 litres d'eau bénite de Zamzam doivent être mis à part de leurs bagages afin d'être acheminés dans une autre soute à bagages. Or, ce que ne savent pas les pèlerins qui, une fois arrivés à destination, ne retrouvent pas cette eau si précieuse pour eux, c'est que cette dernière se retrouve souvent vendue par leurs guides dans des épiceries, souvent en province. Mme Kahil, qui l'explique à une assistance médusée, précise qu'elle aurait obtenu des aveux complets d'épiciers vendant cette eau et l'ayant par la suite retirée de leurs étalages.
Et les agences dans tout cela ? Si autant de dérives sont à déplorer, elles en sont tout autant responsables, puisque aucun contrat de travail en bonne et dûe forme n'est élaboré entre elles et leurs guides. De plus, elles laissent souvent les pèlerins dans le flou le plus total, et ce jusqu'à la dernière minute, les dates de départ n'étant pas précisées ou étant corrigées en dernière minute, entrainant parfois pour les pèlerins des frais d'hôtels et de bouche inconsidérés quand on connaît le niveau de vie de la plupart d'entre eux.
Plaintes
Selon l'association SOS Pèlerin, 80% des plaintes instruites aboutissent en moins de trois mois. Pourtant, très peu sont ceux qui, malmenés par des guides crapuleux, sautent le pas et intentent une action en justice à leur retour de pèlerinage. Tout se dit tout bas dans les mosquées ou entre amis, mais rares sont ceux qui dénoncent publiquement ceux qui les ont bernés, voire dépouillés. Pourquoi ? Parce que le plus souvent, ces pèlerins appartiennent à la génération de nos parents, et que leur vie sociale tourne principalement autour de la mosquée. Leurs amis, leurs "frères", ils les retrouvent à la mosquée, pas au bureau ni au café ou au cinéma.
Et les guides qui les acheminent vers La Mecque font parfois partie du bureau de l'association gérant la mosquée, ou sont des personnalités bien implantées dans la commune. S'ils portent plainte contre eux, ils craignent donc que l'opprobre soit jetée sur eux, qu'ils soient en quelque sorte bannis et qu'ils se retrouvent isolés, rejetés puisque dénonciateurs de leurs "frères".
Malgré tout, en raison peut-être de l'ampleur des dégâts commis, les choses commencent à bouger. Si l'association SOS Pèlerin a initié le mouvement, aujourd'hui par exemple, c'est le Conseil régional du culte musulman (CRCM) Alsace, emmené par Benabdellah Soufari, qui a rédigé un fascicule à l'intention des futurs pèlerins intitulé "Guide du hajj sans souci" (voir ci-dessous).
Pour l'association SOS Pèlerin, "un pèlerinage fait intervenir toutes sortes de prestataires : organisateurs, transporteurs, hôteliers, restaurateurs, guides, etc. Chacun d'entre eux peut être à l'origine d'une défaillance, mais les pèlerins auraient les plus grandes difficultés à leur demander réparation". C'est pourquoi l'association milite pour que la loi du 13 juillet 1992, qui prévoit que l'agence de voyages "est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci" (art. 23 de la loi du 13 juillet 1992), soit appliquée à tous les opérateurs de voyage offrant leurs services à des pèlerins en direction de La Mecque. Une mesure qui permettrait aux pèlerins de pouvoir se retourner plus facilement contre d'éventuelles agences de voyages en cas de litige ou de non respect des contrats initiaux.
Et les guides qui les acheminent vers La Mecque font parfois partie du bureau de l'association gérant la mosquée, ou sont des personnalités bien implantées dans la commune. S'ils portent plainte contre eux, ils craignent donc que l'opprobre soit jetée sur eux, qu'ils soient en quelque sorte bannis et qu'ils se retrouvent isolés, rejetés puisque dénonciateurs de leurs "frères".
Malgré tout, en raison peut-être de l'ampleur des dégâts commis, les choses commencent à bouger. Si l'association SOS Pèlerin a initié le mouvement, aujourd'hui par exemple, c'est le Conseil régional du culte musulman (CRCM) Alsace, emmené par Benabdellah Soufari, qui a rédigé un fascicule à l'intention des futurs pèlerins intitulé "Guide du hajj sans souci" (voir ci-dessous).
Pour l'association SOS Pèlerin, "un pèlerinage fait intervenir toutes sortes de prestataires : organisateurs, transporteurs, hôteliers, restaurateurs, guides, etc. Chacun d'entre eux peut être à l'origine d'une défaillance, mais les pèlerins auraient les plus grandes difficultés à leur demander réparation". C'est pourquoi l'association milite pour que la loi du 13 juillet 1992, qui prévoit que l'agence de voyages "est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci" (art. 23 de la loi du 13 juillet 1992), soit appliquée à tous les opérateurs de voyage offrant leurs services à des pèlerins en direction de La Mecque. Une mesure qui permettrait aux pèlerins de pouvoir se retourner plus facilement contre d'éventuelles agences de voyages en cas de litige ou de non respect des contrats initiaux.