Ce fléau touche les femmes musulmanes depuis bien trop longtemps, et jamais nous n’accepterons ni sa banalisation ni sa généralisation ! Il ne s’agit pas de dire que ce type de harcèlement est plus grave que les autres. Notre but est de le mettre en lumière dans toute sa réalité, d’expliquer sa spécificité et ses conséquences, afin de mieux lutter contre.
Des scènes de violences devenues la normalité du quotidien
Avec un foulard sur la tête, nous ne sommes définitivement plus comme les autres. J’en viens même parfois à me surprendre à trouver étranges et exceptionnels les gens qui ne me jettent aucun coup d’œil à l’entrée d’un magasin ou d’un restaurant. Et pourtant, jamais une femme ne devrait en arriver à intégrer le fait qu’il est normal qu’elle soit observée, scrutée et jugée, dans la rue ou ailleurs.
L’espace public nous rappelle ainsi quotidiennement un rejet et une détestation de notre existence : de nos choix, de notre foi et de nos identités plurielles de femmes.
L’espace public nous rappelle ainsi quotidiennement un rejet et une détestation de notre existence : de nos choix, de notre foi et de nos identités plurielles de femmes.
Des oppressions systémiques à l’intersection entre islamophobie, sexisme et racisme
Ces actes ne peuvent pas être traités comme des comportements isolés. Les femmes concernées vous le diront : non, ces actes ne sont pas exceptionnels, ils sont en fait trop récurrents. Minimiser ce fait, c’est fermer les yeux sur ses causes : une islamophobie imprégnée dans notre société qui se lie au sexisme et au racisme. Ces violences ne sont pas anodines, elles sont des oppressions.
Le harcèlement généralisé des femmes musulmanes dans l’espace public est une des manifestations d’un système d’exclusion de ces dernières des différentes sphères de la société en général. Ainsi, considérer ces actes comme venant uniquement de personnes mal intentionnées est une erreur. Ces comportements sont en fait normalisés.
Le harcèlement généralisé des femmes musulmanes dans l’espace public est une des manifestations d’un système d’exclusion de ces dernières des différentes sphères de la société en général. Ainsi, considérer ces actes comme venant uniquement de personnes mal intentionnées est une erreur. Ces comportements sont en fait normalisés.
Il serait légitime de nous surveiller...
La mise en place et la survalorisation d’un système de surveillance et de contrôle intensif envers la communauté musulmane permet de diffuser l’idée que n’importe qui peut être suspecté, n’importe où et par tout le monde. Ainsi, il serait légitime de surveiller toute personne dont l’appartenance à la religion musulmane aurait une certaine visibilité. Les acteurs dans l’espace public, ayant intériorisé cette méfiance, peuvent la développer, l’exprimer et se sentir en droit de lui laisser libre cours.
... et normal de nous observer et de nous juger !
La pensée commune infantilise les femmes musulmanes. Elles sont présentées comme incapables d’être autonomes et réfléchies dans leurs choix. Il faudrait ainsi leur indiquer comment elles doivent s’habiller, se comporter et s’engager dans la société. On parle à leur place et le jugement porté sur elles est continu.
Ces conditions valident le fait qu’une femme musulmane peut être contrôlée, être sujette à une intrusion dans sa vie et son intimité, au point de ne plus la considérer comme une personne raisonnée, consciente et libre propriétaire de son corps. Cela peut alors expliquer que des acteurs vont se permettre à n’importe quel moment, dans n’importe quel lieu, de vous signifier leur simple curiosité ou leur questionnement, mais aussi leur désapprobation face à votre vêtement - quelle que soit la manière employée - et leur dédain. Le corps des femmes musulmanes est perçu comme légitime de jugement par tou-te-s : on peut l’observer, l’analyser, le désapprouver. La voie est libre !
Ces conditions valident le fait qu’une femme musulmane peut être contrôlée, être sujette à une intrusion dans sa vie et son intimité, au point de ne plus la considérer comme une personne raisonnée, consciente et libre propriétaire de son corps. Cela peut alors expliquer que des acteurs vont se permettre à n’importe quel moment, dans n’importe quel lieu, de vous signifier leur simple curiosité ou leur questionnement, mais aussi leur désapprobation face à votre vêtement - quelle que soit la manière employée - et leur dédain. Le corps des femmes musulmanes est perçu comme légitime de jugement par tou-te-s : on peut l’observer, l’analyser, le désapprouver. La voie est libre !
« - Tu as vu la manière dont cette femme vient de me regarder à l’instant ? » « - Je déteste avoir à m’inquiéter d’être jugée à chaque fois que je sors dehors avec mon hijab !» « - Je devrais pouvoir porter ce que je veux sans être jugée ! - Je suis d’accord... » © Keepcalmandmuslimon.tumblr.com
Quand l’espace public devient un lieu oppressant et excluant pour les femmes musulmanes, on peut alors se poser la question suivante : quelle place pour les femmes musulmanes dans l’espace public ?
Tout comme certaines femmes qui, par crainte du harcèlement de rue, s’habillent avec des vêtements jugés « plus couvrants » et « moins voyants », un nombre non négligeable de femmes musulmanes qui portent un foulard ayant subi des agressions de rue ont décidé de changer leur habillement, la manière dont elles portaient leur foulard ou ont pris la décision de le retirer. Le principe est toujours le même : rentrer dans la « neutralité » et la « normalité » dictées et imposées par ces lieux, pour ne plus subir leurs oppressions.
Les stratégies de contournement et d’invisibilisation sont répandues et multiples. Pendant les périodes où le climat et la tension islamophobes se sont faits d’autant plus violents (notamment les semaines après les attentats qui ont touché la France), beaucoup d’entre nous ont préféré échanger leur foulard contre un bonnet, un chapeau ou une casquette. Sans compter de très nombreuses femmes qui, pendant plusieurs semaines, ont été contraintes de limiter leurs déplacements au minimum, par crainte de se faire agresser. Se faire la plus discrète possible, jusqu’à s’effacer de l’espace commun...
La violence n’est pas uniquement celle qui est visible de tou-te-s. Elle s’exerce également dans des comportements aussi anodins que des regards trop insistants. Les concernées qui les subissent étant les seules à les percevoir, elles sont invisibilisées et réduites à néant par les autres. Beaucoup de femmes restent ainsi seules face à ces agressions quotidiennes. Et quoi de plus violent que de remettre en cause le témoignage de l’expérience quotidienne d’une concernée ?
L’islamophobie, le sexisme et le racisme sont des réalités qui touchent un trop grand nombre de personnes. Ces fléaux altèrent notre quotidien et nous empêchent de mener une vie normale et sereine. Nier qu’il existe des oppressions spécifiques et qui se lient entre elles, c’est aussi participer à ces violences.
Les stratégies de contournement et d’invisibilisation sont répandues et multiples. Pendant les périodes où le climat et la tension islamophobes se sont faits d’autant plus violents (notamment les semaines après les attentats qui ont touché la France), beaucoup d’entre nous ont préféré échanger leur foulard contre un bonnet, un chapeau ou une casquette. Sans compter de très nombreuses femmes qui, pendant plusieurs semaines, ont été contraintes de limiter leurs déplacements au minimum, par crainte de se faire agresser. Se faire la plus discrète possible, jusqu’à s’effacer de l’espace commun...
La violence n’est pas uniquement celle qui est visible de tou-te-s. Elle s’exerce également dans des comportements aussi anodins que des regards trop insistants. Les concernées qui les subissent étant les seules à les percevoir, elles sont invisibilisées et réduites à néant par les autres. Beaucoup de femmes restent ainsi seules face à ces agressions quotidiennes. Et quoi de plus violent que de remettre en cause le témoignage de l’expérience quotidienne d’une concernée ?
L’islamophobie, le sexisme et le racisme sont des réalités qui touchent un trop grand nombre de personnes. Ces fléaux altèrent notre quotidien et nous empêchent de mener une vie normale et sereine. Nier qu’il existe des oppressions spécifiques et qui se lient entre elles, c’est aussi participer à ces violences.
Mais alors, que faire ?
Ne pas l’accepter, condamner fermement et soutenir les victimes. Ne pas tenter de négocier notre existence et de minimiser les oppressions qui nous touchent par n’importe quel argument. Toutes les femmes, dans leur diversité, ont le droit à la sécurité dans tous les espaces communs, et ce, quelque soient leurs vêtements et leur apparence !
Non, porter un foulard n’est pas une menace adressée aux citadins et à la vie en société. Et enfin, oui, une société juste doit permettre à celles et ceux qui le souhaitent de pouvoir s’exprimer et de s’émanciper, y compris au sein de l’espace public.
Jamais nous n’accepterons qu’une femme soit rejetée et exclue de n’importe quelle sphère de la société. Alors n’ayons pas peur de nous exprimer, de nous soutenir et de nous indigner !
Non, porter un foulard n’est pas une menace adressée aux citadins et à la vie en société. Et enfin, oui, une société juste doit permettre à celles et ceux qui le souhaitent de pouvoir s’exprimer et de s’émanciper, y compris au sein de l’espace public.
Jamais nous n’accepterons qu’une femme soit rejetée et exclue de n’importe quelle sphère de la société. Alors n’ayons pas peur de nous exprimer, de nous soutenir et de nous indigner !
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Laura Cha, étudiante en sociologie et engagée dans le féminisme intersectionnel et l'antiracisme décolonial, est membre de l'association Lallab.
Laura Cha, étudiante en sociologie et engagée dans le féminisme intersectionnel et l'antiracisme décolonial, est membre de l'association Lallab.
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