L'oeuvre « J’ai faim » de Khaled Takreti.
Le coup d'envoi de la programmation de l’Institut des cultures d’islam (ICI) consacré aux artistes syriens a été donné jeudi 10 avril. « Et pourtant ils créent ! (Syrie : la foi dans l’art) » propose, jusqu’au 27 juillet, une offre artistique variée alliant expositions et concerts, en passant par des rencontres littéraires et des projections de films.
Trois ans après le début du conflit qui ravage la Syrie mais loin des images brutes de destructions et de morts, l’ICI présente une autre image du pays par le biais d’artistes dont le travail est toutefois fortement influencé par les maux d’une guerre sanglante. Saphirnews a pu le constater en découvrant les œuvres qui composent l’exposition de cette programmation inédite.
Trois ans après le début du conflit qui ravage la Syrie mais loin des images brutes de destructions et de morts, l’ICI présente une autre image du pays par le biais d’artistes dont le travail est toutefois fortement influencé par les maux d’une guerre sanglante. Saphirnews a pu le constater en découvrant les œuvres qui composent l’exposition de cette programmation inédite.
Des artistes transformés
Seize artistes et collectifs syriens sont exposés. Bouleversés par ce qu’il se passe dans leur pays, ces artistes, dont beaucoup se sont exilés dans d’autres pays pour échapper à la répression et à la violence, veulent montrer par leur création qu’ils résistent. Malgré « la destruction, les gens continuent à créer. L’art est un moyen d’exister, de vivre, d’exister en tant que Syrien », commente Zeynep Morali, directrice artistique, culturelle et scientifique de l’ICI.
Cette situation chaotique n’est pas sans conséquences sur leur production. Leur style est marqué par la douleur qu’ils ressentent à voir leur pays sombrer. De plus, dans l’exil ou face au chaos, nombre d'entre eux ont dû changer de discipline. Une décision « liée à leur situation économique », explique Delphine Leccas, la commissaire artistique de l’exposition qui constate que beaucoup n’ont plus, dans de telles conditions, accès à leurs ateliers ou studios. Ainsi, Yaser Safi, qui faisait de la sculpture, ne peut plus se le permettre. L’artiste qui vit toujours à Damas s’illustre à présent avec des croquis qui font partie de l’exposition de l’ICI. Des artistes comme lui passent par Internet pour diffuser leurs œuvres.
Cette situation chaotique n’est pas sans conséquences sur leur production. Leur style est marqué par la douleur qu’ils ressentent à voir leur pays sombrer. De plus, dans l’exil ou face au chaos, nombre d'entre eux ont dû changer de discipline. Une décision « liée à leur situation économique », explique Delphine Leccas, la commissaire artistique de l’exposition qui constate que beaucoup n’ont plus, dans de telles conditions, accès à leurs ateliers ou studios. Ainsi, Yaser Safi, qui faisait de la sculpture, ne peut plus se le permettre. L’artiste qui vit toujours à Damas s’illustre à présent avec des croquis qui font partie de l’exposition de l’ICI. Des artistes comme lui passent par Internet pour diffuser leurs œuvres.
Freedom Graffiti © Tammam Azzam
Internet comme galerie d’exposition
La Toile est devenue un allié de poids pour les artistes syriens pour faire passer leurs messages à travers le monde. Pourtant, au départ, les « artistes ne publiaient pas leurs œuvres sur Internet » dont l'accès dans le pays ne s'est développé qu’en 2001, fait remarquer Delphine Leccas, qui a vécu 13 ans en Syrie. Si les artistes avaient « un travail un peu problématique aux yeux du gouvernement, il était visible dans leur studio, leur atelier. Pas du tout en accès libre. Avec le début de la révolution, le mouvement d’opposition a pris une telle proportion que le gouvernement n’avait plus le temps de voir qui postait quoi sur Internet », constate-t-elle. Les artistes se sont alors emparés de cet outil de communication.
Tammam Azzam, qui excelle dans le détournement de grandes références de l’histoire de l’art – avec lui, l’image mondialement connue du baiser de Gustav Klimt se mêle à celle d’un bâtiment détruit par des bombes en Syrie – a ainsi réussi à toucher des milliers d’internautes en postant ses montages sur les réseaux sociaux.
Tammam Azzam, qui excelle dans le détournement de grandes références de l’histoire de l’art – avec lui, l’image mondialement connue du baiser de Gustav Klimt se mêle à celle d’un bâtiment détruit par des bombes en Syrie – a ainsi réussi à toucher des milliers d’internautes en postant ses montages sur les réseaux sociaux.
Des images du conflit plein la tête
C’est encore grâce à Internet que Delphine Leccas a gardé et garde toujours un lien avec des artistes syriens. Elle est l’auteure de l’ouvrage Syrie, l’art en armes (La Martinière, 2013) recensant des images qu’elle a accumulées « pendant presque trois ans » via le Web. Cette exposition dont le point de départ était de « passer du mur de (sa) page Facebook au mur de l’exposition » en est le prolongement. Après une exposition à Rotterdam, qui a duré deux ans, puis un passage en Turquie (à Istanbul), en Allemagne et en Italie, c’est au tour de Paris de faire une place à ces artistes meurtris.
Mohamad Omran, présent lors du vernissage, fait ressortir son ressenti par des « dessins spontanés » comme il l’explique lui-même. L’homme, qui a choisi de s’installer en France bien avant les événements de 2011, est imprégné des images du conflit syrien qu’il voit à la télévision et sur Internet.
D’autres artistes sont guidés dans leur création par ces images qu’ils regardent « en boucle », note Mme Leccas. Cela est perceptible dans l’œuvre d’Akram Al Halabi dans laquelle il met en évidence – comme une obsession – des mots clés sur des images insoutenables tirées de vidéos du conflit.
Mohamad Omran, présent lors du vernissage, fait ressortir son ressenti par des « dessins spontanés » comme il l’explique lui-même. L’homme, qui a choisi de s’installer en France bien avant les événements de 2011, est imprégné des images du conflit syrien qu’il voit à la télévision et sur Internet.
D’autres artistes sont guidés dans leur création par ces images qu’ils regardent « en boucle », note Mme Leccas. Cela est perceptible dans l’œuvre d’Akram Al Halabi dans laquelle il met en évidence – comme une obsession – des mots clés sur des images insoutenables tirées de vidéos du conflit.
L’art comme arme de contestation
Cette vision noire témoigne d’un ras-le-bol, elle est un moyen de crier contre un conflit qui n’a que trop duré. Au début de la guerre civile, les œuvres des artistes étaient d'ailleurs beaucoup « plus légères » mais « plus du tout » à présent, constate Mme Leccas. Le photo-artiste Jaber Al Azmeh donne, quant à lui, un visage à cette contestation avec une série de photos de personnalités syriennes tenant à la main le journal Ba’ath, symbole du régime de Bachar Al-Assad, tout en exprimant leur indignation face à la situation du pays.
Les artistes participent à « un mouvement du "qu’est-ce qu’on peut faire ?" », qui s'illustre notamment avec l'implication des « médecins qui vont sur le terrain pour essayer de protéger et d’aider », analyse la commissaire de l’exposition. Quant aux artistes syriens, « leur seul moyen de s’exprimer, de pouvoir faire quelque chose, c’est de produire une création artistique », explique-t-elle.
Cette exposition à l’« esprit humaniste » permet de « montrer un visage de la Syrie que l’on ne voit plus (…). Ces artistes ont quelque chose à nous dire : la foi dans l’art. En créant, ils nous disent quelque chose sur ce que c’est que d’être humain », rappelle, de son côté, Jamel Oubechou, le président de l'ICI dans son discours d’inauguration de l’exposition, qui s’est déroulée sans la présence de la maire de Paris Anne Hidalgo, « excusée » à cause de son emploi du temps, ni celle de l’ancien maire du 18e arrondissement Daniel Vaillant. Ce dernier s'est très impliqué au côté de l’ancien maire de Paris Bertrand Delanoë pour la création de l’ICI, bâtiment à la fois cultuel et culturel inauguré le 28 novembre dernier.
Les nombreux curieux qui ont fait le déplacement pour assister à ce vernissage, symbole du dynamisme des artistes syriens, ont également pu découvrir le hammam, nouveauté de l'ICI, qui ajoute la détente physique à ses missions.
Plus d'informations sur la programmation « Et pourtant ils créent ! (Syrie : la foi dans l’art) » ici.
Les artistes participent à « un mouvement du "qu’est-ce qu’on peut faire ?" », qui s'illustre notamment avec l'implication des « médecins qui vont sur le terrain pour essayer de protéger et d’aider », analyse la commissaire de l’exposition. Quant aux artistes syriens, « leur seul moyen de s’exprimer, de pouvoir faire quelque chose, c’est de produire une création artistique », explique-t-elle.
Cette exposition à l’« esprit humaniste » permet de « montrer un visage de la Syrie que l’on ne voit plus (…). Ces artistes ont quelque chose à nous dire : la foi dans l’art. En créant, ils nous disent quelque chose sur ce que c’est que d’être humain », rappelle, de son côté, Jamel Oubechou, le président de l'ICI dans son discours d’inauguration de l’exposition, qui s’est déroulée sans la présence de la maire de Paris Anne Hidalgo, « excusée » à cause de son emploi du temps, ni celle de l’ancien maire du 18e arrondissement Daniel Vaillant. Ce dernier s'est très impliqué au côté de l’ancien maire de Paris Bertrand Delanoë pour la création de l’ICI, bâtiment à la fois cultuel et culturel inauguré le 28 novembre dernier.
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