Dans un contexte mondial tragique, les surenchères islamophobes battent leur plein. Le délire atteint des sommets d’indécence. Des masques tombent. Des intellectuels musulmans en Occident déclament que « cette violence a aussi à voir avec l’islam » (Rachid Benzine, La Libre Belgique, 13 janvier 2015). Sans honte, dans une logique faustienne, ils demandent de rendre caducs des versets coraniques (Abdennour Bidar, L'Express, 23 janvier 2015), alors que d’autres appellent à changer de théologie.
Le ridicule est poussé jusqu’à l’extrême, en prétendant qu’après la mort du Prophète l’expansion de l’islam est menée par les califes et les sultans « pour peupler le harem de jeunes femmes » (Malek Chebel, Le Figaro, 6 février 2015). Ce n’est pas par ces sentiers indignes qui ne mènent à l’abîme que l’on pourra faire évoluer la grave situation. Il faut savoir garder raison. Ce n’est pas le temps des discours, encore moins irréfléchis. L’islam religion universelle existe depuis 15 siècles et a produit de la civilisation. Le terrorisme est sécrété depuis 25 ans dans un contexte mondial en crise.
Le ridicule est poussé jusqu’à l’extrême, en prétendant qu’après la mort du Prophète l’expansion de l’islam est menée par les califes et les sultans « pour peupler le harem de jeunes femmes » (Malek Chebel, Le Figaro, 6 février 2015). Ce n’est pas par ces sentiers indignes qui ne mènent à l’abîme que l’on pourra faire évoluer la grave situation. Il faut savoir garder raison. Ce n’est pas le temps des discours, encore moins irréfléchis. L’islam religion universelle existe depuis 15 siècles et a produit de la civilisation. Le terrorisme est sécrété depuis 25 ans dans un contexte mondial en crise.
Tenir compte du contexte historique
Pour contribuer à une réforme fondée sur des valeurs universelles et à les faire partager, il y a lieu d’éviter plusieurs erreurs. La première erreur est d’appréhender la réforme sans analyse politique du contexte historique régional et international et en opposant Arabes et non-Arabes, Occidentaux et Orientaux. Accabler les musulmans, les diviser, les culpabiliser est injuste et déraisonnable.
Deuxièmement, une nouvelle interprétation de l’islam ne peut signifier imiter aveuglément le modernisme, le rationalisme, le libéralisme sauvage, l’athéisme dogmatique, ou, au contraire, répéter le traditionalisme. Il s’agit d’articuler l’ancien et le nouveau, l’authenticité et la modernité. La modernité ne peut se construire contre la Tradition. Il y a des valeurs et repères pérennes dans le Coran et d’autres évolutifs qui permettent l’adaptation et le changement. Le Coran, valable en tout temps et en tout lieu, est ouvert.
Il ne s’agit pas de renaissance islamique, d’islamiser la modernité, ni de moderniser l’islam. Faux problème par excellence. Mais il s’agit de rechercher, avec d’autres cultures, religions et philosophies, une civilisation universelle commune, conjuguant mondialité et spécificité. Il n’y a plus à opposer l’Orient à l’Occident, ils sont entremêlés. De plus, sur le plan sociologique, il y a des islams et des Occidents.
Deuxièmement, une nouvelle interprétation de l’islam ne peut signifier imiter aveuglément le modernisme, le rationalisme, le libéralisme sauvage, l’athéisme dogmatique, ou, au contraire, répéter le traditionalisme. Il s’agit d’articuler l’ancien et le nouveau, l’authenticité et la modernité. La modernité ne peut se construire contre la Tradition. Il y a des valeurs et repères pérennes dans le Coran et d’autres évolutifs qui permettent l’adaptation et le changement. Le Coran, valable en tout temps et en tout lieu, est ouvert.
Il ne s’agit pas de renaissance islamique, d’islamiser la modernité, ni de moderniser l’islam. Faux problème par excellence. Mais il s’agit de rechercher, avec d’autres cultures, religions et philosophies, une civilisation universelle commune, conjuguant mondialité et spécificité. Il n’y a plus à opposer l’Orient à l’Occident, ils sont entremêlés. De plus, sur le plan sociologique, il y a des islams et des Occidents.
Changement de l’homme musulman et non point changement de l’islam
Troisièmement, en conséquence, le travail de réformateur consiste à expliquer, à réinterpréter le Coran et la voie prophétique. Non pas les figer, ni les rendre caducs, par impuissance à les comprendre.
Il est impérieux de discerner, de tenir compte de l’environnement, hypersécularisé en Occident, et de s’attaquer à juste titre aux productions humaines archaïques. Mais remettre en cause les bases de l’islam est voué à l’échec. Ce qui mérite d’être contesté, c’est la lecture de courants intégristes qui trahissent les références fondatrices. Il est salutaire de revoir les textes à l’aune de l’évolution, en respectant le principe du consensus.
L’islam de la Tradition a prohibé le recours à la violence, sauf dans des cas de légitime défense, strictement codifiés et contextualisés. Les mercenaires qui ont recours à la force brutale, à la sauvagerie, au terrorisme, ne tiennent pas compte de la théologie. Ils s’excluent d’eux-mêmes de l’islam.
De grands réformateurs comme l’émir Abdelkader, Mohammed Iqbal, Malek Bennabi, ont théorisé le changement de l’homme musulman et non point le changement de l’islam. L’interprétation suppose ce préalable et un consensus, que l’on obtient après débat entre musulmans qui ont la compétence cognitive.
Quatrièmement, ne pas généraliser. La majorité des musulmans du monde entier fait la part des choses entre ce qui relève de l’islam et ce qui tient des dérives des sectes. Une infime minorité de radicaux et d’ignorants ne peut changer la situation de toute une nation. Reste à expliquer toutes les causes de ce malheur, en analysant le contexte politique et les duplicités. C’est un problème politique et non point religieux.
Les musulmans ont un problème non religieux, mais politique. Ils aspirent à la démocratie, dont aucune civilisation n’a le monopole. Les systèmes fermés, autoritaires, le fanatisme et l’extrémisme ont des causes historiques internes et externes. On ne peut pas mettre sur le dos de la religion ce qui relève de la géopolitique. Innocenter le système mondial dominant, ne pas dénoncer les déstabilisations, la politique des deux poids et deux mesures ruine toute démarche de réforme.
Il est impérieux de discerner, de tenir compte de l’environnement, hypersécularisé en Occident, et de s’attaquer à juste titre aux productions humaines archaïques. Mais remettre en cause les bases de l’islam est voué à l’échec. Ce qui mérite d’être contesté, c’est la lecture de courants intégristes qui trahissent les références fondatrices. Il est salutaire de revoir les textes à l’aune de l’évolution, en respectant le principe du consensus.
L’islam de la Tradition a prohibé le recours à la violence, sauf dans des cas de légitime défense, strictement codifiés et contextualisés. Les mercenaires qui ont recours à la force brutale, à la sauvagerie, au terrorisme, ne tiennent pas compte de la théologie. Ils s’excluent d’eux-mêmes de l’islam.
De grands réformateurs comme l’émir Abdelkader, Mohammed Iqbal, Malek Bennabi, ont théorisé le changement de l’homme musulman et non point le changement de l’islam. L’interprétation suppose ce préalable et un consensus, que l’on obtient après débat entre musulmans qui ont la compétence cognitive.
Quatrièmement, ne pas généraliser. La majorité des musulmans du monde entier fait la part des choses entre ce qui relève de l’islam et ce qui tient des dérives des sectes. Une infime minorité de radicaux et d’ignorants ne peut changer la situation de toute une nation. Reste à expliquer toutes les causes de ce malheur, en analysant le contexte politique et les duplicités. C’est un problème politique et non point religieux.
Les musulmans ont un problème non religieux, mais politique. Ils aspirent à la démocratie, dont aucune civilisation n’a le monopole. Les systèmes fermés, autoritaires, le fanatisme et l’extrémisme ont des causes historiques internes et externes. On ne peut pas mettre sur le dos de la religion ce qui relève de la géopolitique. Innocenter le système mondial dominant, ne pas dénoncer les déstabilisations, la politique des deux poids et deux mesures ruine toute démarche de réforme.
Ni intégrisme ni dépersonnalisation
Cinquièmement, l’erreur fatale est d’affirmer que l’islam a à voir avec la violence aveugle. Alors que c’est un masque, un prétexte, une victime. Discerner est impératif, loin de tous les amalgames et les essentialismes funestes. Alors que tout le monde le sait, on ressasse des évidences.
Les musulmans et d’autres citoyens du monde entier savent que les terroristes, sectes barbares et mafieuses, sont à la fois les produits du terreau idéologique rigoriste né dans le Golfe, du désordre mondial déshumanisant et des manipulations pour le dessein d’hégémonie mondiale.
Faire l’amalgame absurde, c’est plier sous le poids des dominants qui ont besoin de souiller l’islam qui résiste à la désignification du monde. Le système mondial a besoin de la figure d’un « ennemi » pour faire diversion à ses injustices et ambitions folles. Tout parfum d’amalgame est insupportable. L’Inquisition n’est pas dans l’Évangile, le sionisme n’est pas dans la Thora, le terrorisme n’est pas dans le Coran.
Il nous faut montrer et enseigner que le discours coranique et le modèle prophétique sont sources de paix, mis en pratique durant des siècles. Depuis 15 siècles, aucun musulman sensé ne s’est opposé au respect de la pluralité, de la dignité humaine, de la liberté de conscience, de la sécularité. Rien ne peut justifier la violence aveugle, mais il n’y a pas de paix sans justice.
En conclusion, ni intégrisme ni dépersonnalisation. Pour rénover, réinterpréter et adapter, la voie du juste milieu doit être clairement affirmée. Ce qui importe est de convaincre les masses de musulmans, les jeunes notamment, et non de plaire à des centres de décisions et à l’air du temps.
Il s’agit d’une réponse multiforme, éduquer au vrai islam, à son sens de l’humanisme, dialoguer, donner à penser, et faire reculer les injustices, les discriminations, la loi du plus fort, la décivilisation, les discours de la haine, qui entraînent le monde dans une mauvaise direction, celle de l’abîme.
Hormis les sectes qui sont l’anti-islam, l’islam et les musulmans sont non pas des malades que l’on doit guérir, mais des partenaires, attachés à la totalité de l’être, à un sens ouvert du monde, au juste milieu. Ils peuvent contribuer à retrouver de la fraternité, de la civilisation, pour l’humanité.
*****
Mustapha Cherif est philosophe, auteur notamment de Le principe du juste milieu, Éd. Albouraq, 2014.
Les musulmans et d’autres citoyens du monde entier savent que les terroristes, sectes barbares et mafieuses, sont à la fois les produits du terreau idéologique rigoriste né dans le Golfe, du désordre mondial déshumanisant et des manipulations pour le dessein d’hégémonie mondiale.
Faire l’amalgame absurde, c’est plier sous le poids des dominants qui ont besoin de souiller l’islam qui résiste à la désignification du monde. Le système mondial a besoin de la figure d’un « ennemi » pour faire diversion à ses injustices et ambitions folles. Tout parfum d’amalgame est insupportable. L’Inquisition n’est pas dans l’Évangile, le sionisme n’est pas dans la Thora, le terrorisme n’est pas dans le Coran.
Il nous faut montrer et enseigner que le discours coranique et le modèle prophétique sont sources de paix, mis en pratique durant des siècles. Depuis 15 siècles, aucun musulman sensé ne s’est opposé au respect de la pluralité, de la dignité humaine, de la liberté de conscience, de la sécularité. Rien ne peut justifier la violence aveugle, mais il n’y a pas de paix sans justice.
En conclusion, ni intégrisme ni dépersonnalisation. Pour rénover, réinterpréter et adapter, la voie du juste milieu doit être clairement affirmée. Ce qui importe est de convaincre les masses de musulmans, les jeunes notamment, et non de plaire à des centres de décisions et à l’air du temps.
Il s’agit d’une réponse multiforme, éduquer au vrai islam, à son sens de l’humanisme, dialoguer, donner à penser, et faire reculer les injustices, les discriminations, la loi du plus fort, la décivilisation, les discours de la haine, qui entraînent le monde dans une mauvaise direction, celle de l’abîme.
Hormis les sectes qui sont l’anti-islam, l’islam et les musulmans sont non pas des malades que l’on doit guérir, mais des partenaires, attachés à la totalité de l’être, à un sens ouvert du monde, au juste milieu. Ils peuvent contribuer à retrouver de la fraternité, de la civilisation, pour l’humanité.
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