Il est des faits divers absolument inadmissibles et qu’il faut analyser dans le moment historique où ils prennent place ; le meurtre de Clément Méric, militant d’extrême gauche, les diverses agressions islamophobes à l’encontre de femmes musulmanes dans plusieurs villes françaises, le passage à tabac de Wilfried et Olivier, couple gay, à Paris, en plein débat sur le mariage pour tous, démontrent un même mouvement d’évolution des discours de rejet.
Nous assistons en effet au passage d’une rhétorique d’aversion pour certaines altérités – anti-gauche radicale, islamophobie et homophobie – à la violence physique, parfois ouvertement préméditée et exprimée sur les réseaux sociaux. Il est temps de penser à choisir son camp ; le fait que des individus de ces trois groupes se retrouvent victimes de violences provenant du même champ de l’échiquier politique indique clairement que le refus d’aller vers une société progressiste, pluriculturelle et inclusive est en train de passer à une étape plus qu’inquiétante.
L’on voudrait que chacun se replie sur sa sphère d’appartenance communautaire qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Partant de là, il est urgent de ne pas céder à la tentation du renfermement sur soi et son groupe, pour mieux développer une logique de réaction et de refus des autres. A contre-courant de cette position, il faut promouvoir un positionnement progressiste clairement affiché et assumé pour mieux combattre cette déferlante de violence.
Les partisans de la gauche, dans toutes ses déclinaisons, doivent ainsi placer la lutte contre l’homophobie et l’islamophobie au cœur de leur combat ; les musulmans doivent inclure la lutte contre l’homophobie au cœur de leur combat ; les LGBTQI, pour leur part, doivent placer la lutte contre l’islamophobie au cœur de leur combat. Il n’y a plus à hésiter, car les adversaires de cette société ouverte et inclusive savent ce qu’ils veulent et comment y parvenir. Le camp progressiste, ainsi que les différents groupes cités et dont certains membres ont déjà pris les devants, gagneront à cesser leurs tergiversations sur l’échelle de la souffrance et le primat de la victimisation.
Le temps est venu, pour chacun, de changer son paradigme et sa façon d’envisager une société dans laquelle la pluralité des origines et des appartenances est un fait avant d’être une philosophie ou un droit. Par « changer de paradigme », nous entendons la capacité qu’aura chaque groupe à bousculer ou à transgresser des frontières idéologiques qui, jusqu’à ce jour, les freinent pour le passage à une action collective efficace.
Quand la gauche va-t-elle enfin reconnaître que l’islamophobie est une vraie problématique ? Faudra-t-il de nouveaux meurtres de bébés, d’enfants ou de femmes et d’hommes musulmans pour qu’elle daigne se réveiller ? Quand les musulmans vont-ils accomplir un vrai travail en profondeur sur les questions d’égalité des genres et de lutte contre l’homophobie ? Faudra-t-il qu’un leader religieux passe à l’acte à l’encontre des musulmans jugés « déviants » ou autres mécréants ? Quand les mouvements gays vont-ils rejeter clairement les dérives extrême-droitisantes et les discours islamophobes en leur sein ? Quand chacun aura avancé de ce point de vue, il sera alors réellement possible d’envisager des convergences efficaces en matière de promotion de l’égalité et de lutte contre les dérives extrêmes. Ces convergences existent déjà dans la société civile de différents pays européens, pourquoi pas en France ?
D’aucuns voudraient nous faire croire que l’appartenance religieuse ou l’orientation sexuelle, exprimées dans les espaces de la vie sociale, sont à l’origine de cette dérive violente, légitimant par là même les actes ignobles perpétrés récemment, mais il faut refuser ce type d’ineptie. Le véritable clivage, dans notre société, n’est certainement ni religieux ni lié aux débats récents débats sur le mariage gay ; ce clivage est situé entre ceux qui défendent les valeurs progressistes et ceux qui se cramponnent à un conservatisme désuet et pathogène. Le temps est venu de choisir son camp.
*****
Omero Marongiu-Perria est sociologue de l’ethnicité et des religions. Michael Privot est directeur de l'ENAR, le Réseau européen contre le racisme.
Nous assistons en effet au passage d’une rhétorique d’aversion pour certaines altérités – anti-gauche radicale, islamophobie et homophobie – à la violence physique, parfois ouvertement préméditée et exprimée sur les réseaux sociaux. Il est temps de penser à choisir son camp ; le fait que des individus de ces trois groupes se retrouvent victimes de violences provenant du même champ de l’échiquier politique indique clairement que le refus d’aller vers une société progressiste, pluriculturelle et inclusive est en train de passer à une étape plus qu’inquiétante.
L’on voudrait que chacun se replie sur sa sphère d’appartenance communautaire qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Partant de là, il est urgent de ne pas céder à la tentation du renfermement sur soi et son groupe, pour mieux développer une logique de réaction et de refus des autres. A contre-courant de cette position, il faut promouvoir un positionnement progressiste clairement affiché et assumé pour mieux combattre cette déferlante de violence.
Les partisans de la gauche, dans toutes ses déclinaisons, doivent ainsi placer la lutte contre l’homophobie et l’islamophobie au cœur de leur combat ; les musulmans doivent inclure la lutte contre l’homophobie au cœur de leur combat ; les LGBTQI, pour leur part, doivent placer la lutte contre l’islamophobie au cœur de leur combat. Il n’y a plus à hésiter, car les adversaires de cette société ouverte et inclusive savent ce qu’ils veulent et comment y parvenir. Le camp progressiste, ainsi que les différents groupes cités et dont certains membres ont déjà pris les devants, gagneront à cesser leurs tergiversations sur l’échelle de la souffrance et le primat de la victimisation.
Le temps est venu, pour chacun, de changer son paradigme et sa façon d’envisager une société dans laquelle la pluralité des origines et des appartenances est un fait avant d’être une philosophie ou un droit. Par « changer de paradigme », nous entendons la capacité qu’aura chaque groupe à bousculer ou à transgresser des frontières idéologiques qui, jusqu’à ce jour, les freinent pour le passage à une action collective efficace.
Quand la gauche va-t-elle enfin reconnaître que l’islamophobie est une vraie problématique ? Faudra-t-il de nouveaux meurtres de bébés, d’enfants ou de femmes et d’hommes musulmans pour qu’elle daigne se réveiller ? Quand les musulmans vont-ils accomplir un vrai travail en profondeur sur les questions d’égalité des genres et de lutte contre l’homophobie ? Faudra-t-il qu’un leader religieux passe à l’acte à l’encontre des musulmans jugés « déviants » ou autres mécréants ? Quand les mouvements gays vont-ils rejeter clairement les dérives extrême-droitisantes et les discours islamophobes en leur sein ? Quand chacun aura avancé de ce point de vue, il sera alors réellement possible d’envisager des convergences efficaces en matière de promotion de l’égalité et de lutte contre les dérives extrêmes. Ces convergences existent déjà dans la société civile de différents pays européens, pourquoi pas en France ?
D’aucuns voudraient nous faire croire que l’appartenance religieuse ou l’orientation sexuelle, exprimées dans les espaces de la vie sociale, sont à l’origine de cette dérive violente, légitimant par là même les actes ignobles perpétrés récemment, mais il faut refuser ce type d’ineptie. Le véritable clivage, dans notre société, n’est certainement ni religieux ni lié aux débats récents débats sur le mariage gay ; ce clivage est situé entre ceux qui défendent les valeurs progressistes et ceux qui se cramponnent à un conservatisme désuet et pathogène. Le temps est venu de choisir son camp.
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Omero Marongiu-Perria est sociologue de l’ethnicité et des religions. Michael Privot est directeur de l'ENAR, le Réseau européen contre le racisme.