Quoi de plus beau que le regard plein d'amour de ce fils de Dieu sur sa famille. 'Un père, une mère, un fils'. Toute femme a droit à ce bonheur et pourtant…L'alchimie des corps est capricieuse et offre ce qu'elle veut, ce qu'elle peut. Un examen de routine et un gynéco assène avec ou sans précaution le terrible couperet 'Tu ne peux avoir d'enfants…'Pour beaucoup c’est tout un monde qui s'écroule.
Fille d'Islam, elle sait qu'elle n'accomplira pas son maternel devoir. Elle sait que l'époux qu'elle a choisi va réfléchir et peut-être…! Non elle ne veut pas y penser. Elle sait que d'autres ont réussi malgré tout.
Et là tout commence. A-t-on le droit ! ? Peut-on remplacer Le Créateur, même s’Il nous a «oublié » ! ? Est-ce faillir ! ? Commet-on une faute lourde en touchant au plus sacré des domaines réservés, celui de la procréation ?
'L'homme naît de l'argile et de l'eau'
Cette eau, symbole de sa semence et de sa force vive, sacrée d'entre les sacrées, celle de la reproduction de l'espèce devient magie…quand çà marche. La fiction collective attribue au sang et à l'hérédité des effets aussi mystérieux que mythiques. Mais si çà dérape, faut-il tout simplement se résigner et caresser les enfants des autres ! Le plus épouvantable des désespoirs accable alors nos petites sœurs musulmanes qui sont déchirées entre leur propre défaillance de génitrices incertaines et les gazouillis des petits qu'elles voient courir et piailler dans d'autres foyers. Elles sont prêtes à tout, à succomber aux chants vénéneux de toutes les sirènes. Et elles le font trop souvent, catapultées par une poussée venue du fonds des âges, celle de l'instinct. Comment leur en vouloir ? Essayons plutôt de les aider à mieux approcher, à mieux comprendre ce qui leur est proposé et ainsi leur éviter le blasphème, le mépris ou même le rejet dans certains pays.
Elle a entendu que l'homme pour apaiser les douleurs de sa compagne joue parfois à l'apprenti sorcier et qu'il trouve. L'intelligence a su pallier d'originelles insuffisances masculines ou féminines. La raison de la science a comblé ce que nos cellules n'offraient plus…la vie. Mais il faut concilier la tradition, la Foi, l'entourage et surtout la famille…
La famille, une tradition immémoriale
Les musulmans ne peuvent aborder le délicat problème de l'Assistance médicale à la procréation (A.M.P) sans qu'à chaque seconde ces deux concepts se percutent et enflamment leurs décisions qu'une coutume et une foi bien chevillées au cœur renforcent encore davantage.
Toutes les sociétés humaines s'appuient sur la famille et se déterminent par rapport à elle, n'en déplaise à certaines idéologies socialistes ou féministes dont le combat a bien vieilli aujourd'hui. Là, dans ce creuset s'édifient nos cultures et nos civilisations. L'homme y trouve la base affective et sociale de ses relations à l'autre, mais aussi et surtout sa liaison directe avec Dieu et la nature. L'avenir et la pérennité du groupe sont là, dans ce chaudron d'amour, d'échanges où se frottent les caractères, où se forment les hommes.
Le Coran et la Sunnah, la tradition prophétique, déterminent avec une précision venue de siècles et de siècles tout un système de parenté et de filiation. Des recommandations particulières donnent toutes les préférences à la mère et aux rapports utérins, dans le cadre du couple marié. Le régime familial se base une fois pour toutes sur la maternité considérée comme seule capable d'établir une accroche indiscutable de la filiation.
L'époque préislamique pratiquait un matriarcat à sens unique, complexe et incroyable. Une femme avait de nombreux hommes et à la naissance elle ou une autre plus habile, plus physionomiste choisissait le mari le plus ressemblant. Communauté des biens, des femmes et des hommes.
'Les fils de nos fils sont nos fils… Mais les fils de nos filles sont des fils d'étrangers'
Depuis Mohammed, paix et bénédictions sur lui, tout a changé et la femme a été entourée, respectée, choyée ; quoiqu'en puissent penser certains esprits manipulés ou chagrins. L'institution familiale se coule alors dans le régime du patriarcat, comme l'ont fait auparavant francs et romains, comme le Pape et l'Eglise catholique continuent à le défendre contre vents et marées.
Certains, sous prétexte de modernité, de postmodernisme issu des années 68, enseignent et recommandent le mépris de la famille, cette instance repoussoir, simple lieu de reproduction, tabernacle de la domination de l'homme et de la soumission des femmes. L'homme ne s'épanouit que dans le travail, pas parmi les siens, ceux de son sang. Les féministes, encore elles, chantent ce pauvre credo. Puis, constatant le peu d'échos, elles enfourchent une autre bataille celle de l'émancipation, oubliant les familles dont elles sont pourtant toutes issues. Mais alors, mesdames, aujourd'hui il faut vous trouver un autre combat, car les femmes musulmanes sont émancipées, elles travaillent…mais continuent toujours d'avoir des enfants. On n'a encore rien trouvé de mieux que la famille, même si vous persistez à prêcher que dans un couple il y a trois histoires, celle du mari, celle de la femme et puis aussi celle du couple !
Le mariage civil n'est pas tout à fait neutre. Il est toujours aussi lourd des valeurs chrétiennes de la famille. Se marier, c'est tout partager en une fonte des âmes, des cœurs et des corps. A tel point qu'il y a peu encore et en France la femme ne votait pas parce qu'on imaginait mal qu'elle pouvait, dans ce contexte fusionnel, avoir un autre avis que celui de son mari. On parlait même 'd'adultère moral'. Pas mal, non ! Et cette idée n'est pas musulmane…!
De nombreux nouveaux penseurs, mais aussi des décideurs atomisent la famille sans rien offrir en remplacement. Aucune association, maison des jeunes qui remplissent les cages d'escaliers, clubs de foot ou sorties de groupes à vélos, rollers ou patinettes ne pourront jamais prétendre prendre le relais d'un père, d'une mère, de frères et d'une flopée de cousins. L'école a loupé nombre de ses promesses, l'Etat providence touche au ridicule avec ses laïcités à deux vitesses et ses fantasmes de liberté gesticulante dans des gay-pride et autres manifestations que l’islam nous décrit comme des formes de décadence. Quel exemple pour nos petits !
Chez les musulmans, heureusement tout est plus simple. Même si dans certains de nos quartiers des turbulences agitent les familles que des autorités apeurées y ont parquées. Seul le foyer légitime compte et est susceptible d'offrir une stabilité s'appuyant sur un fait juridique (le mariage) et un fait matériel (la filiation).
Depuis 2002, notre pays vit sous un nouveau régime d'autorité, la 'co-parentalité'. Les parents séparés doivent s'entendre sur les principales décisions concernant leurs enfants. Leur prise en charge se trouve ainsi détachée des aléas de la vie conjugale de leurs parents. Le lien biologique prime sur tout autre lien et c'est une sorte de réaffirmation du mariage chrétien. L'attache parentale redevient indissoluble, et on retrouve ainsi un des fondements de la morale islamique. L'enfant doit maintenir le contact avec un père et une mère pour la vie. Avec pour corollaire implicite, le choix du couple hétérosexuel comme seul fondement légitime de la paternité et à contrario la condamnation du ménage homosexuel. Primat de la famille biparentale sur toutes les autres alliances, associations ou assemblages comme la famille recomposée, en deuxième ou troisième tentative.
De l’importance de la filiation (nassab)
La filiation est le seul lien de consanguinité qui rattache l'individu à son 'auteur', le père chef de famille, pilier du couple marié. Hors de ceci, point de salut ! Le mariage anticipe la paternité et, en Islam, les enfants sont toujours légitimes, point : 'L'enfant appartient au lit' (al waldou lil firash)
Lorsqu'un doute apparaît (conception antérieure au mariage - période où la cohabitation entre époux était impossible - adultère prouvé) il peut désavouer. Mais, si en toute connaissance de cause, il accepte néanmoins l'enfant - même s'il ne ressemble pas au père - c'est terminé, on n'en parle plus. Il doit tenir sa parole. Si l'enfant né après la dissolution du mariage a pu être conçu et porté pendant une partie de ce même mariage (ou la durée de la grossesse), il reste rattaché au couple.
Enfin il existe différentes sortes de preuves de filiation en Islam. Par le mariage, par reconnaissance de paternité (taa bbi), de maternité (taammuum), judiciaire (istilhak), adoptive (tabbani). Cas particulier et digne de tous les respects que celui de l'enfant trouvé (manbudh)…
On ignore alors sa filiation (madjhul annasab) et il devient le fils adoptif de toute la communauté musulmane, personne ne peut plus le reconnaître comme son propre enfant. Il est d'office musulman,
'Il n'est d'enfant nouveau-né qui n'appartienne à la religion musulmane. Ce sont ses parents qui en font un juif, un chrétien ou un adorateur du feu'
Notons enfin que malgré toutes ces tentatives de déstabiliser la famille 'valeur-refuge', elle tient toujours le cap. Même si l'individu essaye de s'apparenter de plus en plus à des communautés qu'il se choisit en reléguant les appartenances que le sang a toujours imposées. La religion s'immisce de plus en plus dans les affaires publiques et familiales. Même à mots discrets les valeurs du christianisme ou de l'Islam perdurent et c'est bien.
Ceci explique en partie les résistances aux mariages homosexuels et à toutes ces tentatives de régularisation de l'impossible et de l'anachronique. On confond alors trop souvent liberté et libertinage.
Youssef Chems
Ecrivain
Derniers ouvrages :
'Nass' Le Tabernacle des Lumières
'Hadj Amor' Pour l'amour de Dieu
(éditions E-Dite)