L’Europe, haut lieu de la modernité, semble en crise morale, pas seulement économique. Elle ne sait pas comment gérer la présence de la nouvelle minorité des citoyens de confession musulmane dans la Cité.
Le déclin dans lequel se trouve le monde entier ne facilite guère la tâche face à des attitudes rigoristes, celles qui usurpent le nom de l’islam et alimentent la confusion. Chercher des réponses politiques répressives à ce type de phénomène n’est pas raisonnable, l’interdit est rarement la solution. Il sera même source de problèmes encore plus profonds.
L’importance démesurée donnée à l’épiphénomène de la « burqa » – qui n’est pas islamique – et le projet de son interdiction dans tout l’espace public de pays européens sont des signes de régression et de surenchère face aux extrêmes droites qui intoxiquent la société. De plus, nul ne peut nier que la « femme-objet » du libéralisme sauvage est, au contraire, encouragée.
Les citoyens européens de confession musulmane partagent le point de vue sage du Conseil d’État français qui parle de l’obligation d’être identifié pour des raisons de sécurité, pour pouvoir accéder à des espaces publics précis. Ce sera une chance qu’une société moderne réalise l’articulation entre le respect de l’égalité entre les hommes et les femmes, le besoin de sécurité et la liberté. Mais au vu des délires sur ce sujet, on risque au contraire de voir contredits les principes de la République.
Comme d’habitude, des intellectuels dits de culture musulmane se plient aux exigences de l’air du temps, font preuve de dénigrement envers les citoyens musulmans, pratiquent l’amalgame et l’idolâtrie du laïcisme : « Ce que les gens doivent comprendre, c’est que la première religion du pays, c’est la laïcité. Toutes les autres sont personnelles, et doivent se vivre dans la sphère privée. […] Lorsqu’ils sont seuls [les musulmans] en revanche, ils se laissent aller, car ils ont du mal à se contenir individuellement. » Il prétend militer « pour l’autonomie, l’indépendance du sujet. C’est une révolution copernicienne ! ». C’est incroyable et indécent, comme si l’islam était étranger à ces questions et qu’il fallait le changer de fond en comble.
Le déclin dans lequel se trouve le monde entier ne facilite guère la tâche face à des attitudes rigoristes, celles qui usurpent le nom de l’islam et alimentent la confusion. Chercher des réponses politiques répressives à ce type de phénomène n’est pas raisonnable, l’interdit est rarement la solution. Il sera même source de problèmes encore plus profonds.
L’importance démesurée donnée à l’épiphénomène de la « burqa » – qui n’est pas islamique – et le projet de son interdiction dans tout l’espace public de pays européens sont des signes de régression et de surenchère face aux extrêmes droites qui intoxiquent la société. De plus, nul ne peut nier que la « femme-objet » du libéralisme sauvage est, au contraire, encouragée.
Les citoyens européens de confession musulmane partagent le point de vue sage du Conseil d’État français qui parle de l’obligation d’être identifié pour des raisons de sécurité, pour pouvoir accéder à des espaces publics précis. Ce sera une chance qu’une société moderne réalise l’articulation entre le respect de l’égalité entre les hommes et les femmes, le besoin de sécurité et la liberté. Mais au vu des délires sur ce sujet, on risque au contraire de voir contredits les principes de la République.
Comme d’habitude, des intellectuels dits de culture musulmane se plient aux exigences de l’air du temps, font preuve de dénigrement envers les citoyens musulmans, pratiquent l’amalgame et l’idolâtrie du laïcisme : « Ce que les gens doivent comprendre, c’est que la première religion du pays, c’est la laïcité. Toutes les autres sont personnelles, et doivent se vivre dans la sphère privée. […] Lorsqu’ils sont seuls [les musulmans] en revanche, ils se laissent aller, car ils ont du mal à se contenir individuellement. » Il prétend militer « pour l’autonomie, l’indépendance du sujet. C’est une révolution copernicienne ! ». C’est incroyable et indécent, comme si l’islam était étranger à ces questions et qu’il fallait le changer de fond en comble.
L'invention d'un nouvel ennemi
Notre rôle est de dénouer les nœuds, de réduire les souffrances et de favoriser le vivre- ensemble, non de se laisser entraîner dans des faux débats. Que la « burqa » ne soit pas coranique n’est pas le fond du problème. Cet habit obscur répulsif n’est pas seulement une provocation, il porte préjudice à l’image de l’islam. Il est invraisemblable de sortir dans la rue la face couverte.
La question fondamentale réside dans le fait que, aux yeux de l’immense majorité de musulmans et de démocrates, la coutume rigoriste ultra minoritaire est utilisée comme un parfait épouvantail.
Cela alimente l’invention d’un nouvel ennemi et remet en cause des valeurs fondamentales du vivre-ensemble. Les islamophobes exploitent ce comportement comme une diversion face aux problèmes d’injustices et d’absence de perspectives.
L’interdiction totale nourrira l’inconscient de citoyens européens qui sont prêts à faire l’amalgame entre musulmans et extrémistes. Ceux qui se sentiront réconfortés par cette loi, compte tenu qu’ils combattent courageusement toutes les formes de violences que subissent les femmes, lâchent la proie pour l’ombre. Triompheront la confrontation, la stigmatisation, la culture de la peur et le funeste racisme.
Sur le plan de la responsabilité des citoyens européens musulmans, il s’agit de mettre en avant la pratique de l’autocritique, en faisant entendre les voix dignes de leurs hautes traditions, non pas « modérées » – qualificatif faible –, mais celles de l’interprétation, de la hauteur de pensée pour que leurs coreligionnaires ne s’enferment pas et vivent leur foi de manière apaisée.
Les citoyens européens de confession musulmane ont leur part de responsabilité; ils doivent dirent stop à l’intégrisme et dénoncer l’illusion dans laquelle s’enferme une infime minorité de femmes. Qu’une femme porte le voile en signe de pudeur, confiante en Dieu, tout croyant, tout chrétien et tout être humain de bonne volonté peuvent le comprendre. Mais qu’elle se masque le visage, échappant au face-à-face, choque et prête le flanc.
La question fondamentale réside dans le fait que, aux yeux de l’immense majorité de musulmans et de démocrates, la coutume rigoriste ultra minoritaire est utilisée comme un parfait épouvantail.
Cela alimente l’invention d’un nouvel ennemi et remet en cause des valeurs fondamentales du vivre-ensemble. Les islamophobes exploitent ce comportement comme une diversion face aux problèmes d’injustices et d’absence de perspectives.
L’interdiction totale nourrira l’inconscient de citoyens européens qui sont prêts à faire l’amalgame entre musulmans et extrémistes. Ceux qui se sentiront réconfortés par cette loi, compte tenu qu’ils combattent courageusement toutes les formes de violences que subissent les femmes, lâchent la proie pour l’ombre. Triompheront la confrontation, la stigmatisation, la culture de la peur et le funeste racisme.
Sur le plan de la responsabilité des citoyens européens musulmans, il s’agit de mettre en avant la pratique de l’autocritique, en faisant entendre les voix dignes de leurs hautes traditions, non pas « modérées » – qualificatif faible –, mais celles de l’interprétation, de la hauteur de pensée pour que leurs coreligionnaires ne s’enferment pas et vivent leur foi de manière apaisée.
Les citoyens européens de confession musulmane ont leur part de responsabilité; ils doivent dirent stop à l’intégrisme et dénoncer l’illusion dans laquelle s’enferme une infime minorité de femmes. Qu’une femme porte le voile en signe de pudeur, confiante en Dieu, tout croyant, tout chrétien et tout être humain de bonne volonté peuvent le comprendre. Mais qu’elle se masque le visage, échappant au face-à-face, choque et prête le flanc.
La reconnaissance de l’autre
Les Européens s’interrogent sur des comportements rétrogrades et l’état du monde musulman. Je ne pense pas qu’en posant de telles questions on soit islamophobe. En même temps, en n’ignorant pas les risques qu’il y a à tolérer au nom de l’hospitalité des comportements archaïques qui se drapent des oripeaux de la différence, on a le devoir de refuser la stigmatisation, la manipulation, l’atteinte aux fondements de la République, de la liberté de conscience, de la démocratie. C’est cela qui est en jeu.
Ce que nous observons chez les islamophobes est du racisme, qui contredit les principes des Lumières que Voltaire, qui combattait « l’infâme », le fanatisme religieux, exprimait si admirablement : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire. » Il est vital de retrouver la reconnaissance de l’autre, qui maîtrise la pulsion de violence et organise la vie en commun sans avoir à le nier, y compris celui qui suscite de la répulsion.
Il n’est pas exact que tout l’Occident assimile « musulman » et « fanatique », d’autant que le monde entier constate à quels extrémismes peut conduire la dérive fanatique de certains « adeptes » d’une grande religion comme l’islam. L’usurpation du nom de l’islam par les adeptes de la « burqa » est injustifiable : « Le musulman est parfois une manifestation contre sa religion », affirmait, il y a près d’un siècle, l’émir Abdelkader. Comme le souligne Hannah Arendt, c’est souvent le résultat de provocations et d’injustices racistes : « Dans les régimes totalitaires, la provocation devient une façon de se comporter avec son voisin. »
Dans la Cité européenne se développe un discours raciste, qui tourne le dos aux principes de la République et s’acharne sur les citoyens musulmans. Qui peut nier qu’il existe une dangereuse islamophobie, où c’est le musulman, comme le Juif d’hier, qui est condamné et offensé ? Hantée par la religion, l’Europe est à la fois traversée par l’effort pour l’insertion et par une grave crispation envers les musulmans.
L’avenir de la civilisation, de l’humanisme et de la démocratie se joue dans ces polémiques.
* Mustapha Cherif est philosophe, professeur des universités et auteur d’ouvrages sur le vivre-ensemble et le dialogue des cultures.
Ce que nous observons chez les islamophobes est du racisme, qui contredit les principes des Lumières que Voltaire, qui combattait « l’infâme », le fanatisme religieux, exprimait si admirablement : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire. » Il est vital de retrouver la reconnaissance de l’autre, qui maîtrise la pulsion de violence et organise la vie en commun sans avoir à le nier, y compris celui qui suscite de la répulsion.
Il n’est pas exact que tout l’Occident assimile « musulman » et « fanatique », d’autant que le monde entier constate à quels extrémismes peut conduire la dérive fanatique de certains « adeptes » d’une grande religion comme l’islam. L’usurpation du nom de l’islam par les adeptes de la « burqa » est injustifiable : « Le musulman est parfois une manifestation contre sa religion », affirmait, il y a près d’un siècle, l’émir Abdelkader. Comme le souligne Hannah Arendt, c’est souvent le résultat de provocations et d’injustices racistes : « Dans les régimes totalitaires, la provocation devient une façon de se comporter avec son voisin. »
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Du même auteur :
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Le recul de la démocratie
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Le désordre mondial
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Les USA et l’avenir du monde arabe
Ramadhan de l’examen de conscience
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De la nécessité du débat interne
Trois Paroles
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