Voilà une histoire de femmes inscrites dans la grande Histoire de leur pays : la Tunisie, prise entre les soubresauts de la révolution de jasmin et le prochain changement de gouvernement, Ben Ali ayant fui en Arabie Saoudite. Un entre-deux où soufflent les espoirs de liberté politique mais où la liberté individuelle de pensée et d’agir n’a pas encore sa place.
Autour du voile (hijab) se cristallise la destinée de deux jeunes femmes : Aïcha, qui élève ses deux sœurs depuis que sa mère est décédée et que son père s’est remarié, est pâtissière dans les sous-sols d’un café branché que fréquente la jeunesse tunisienne ; Zaineb, qui se rêve de se voir styliste, travaille également dans ce café comme serveuse, refusant les avances trop pressantes de son patron au comportement plus que harceleur.
L’avenir de Zaineb se dessine cependant radieux, elle va bientôt se marier avec Brahim, un entrepreneur de Nice, belle bagnole, bien sapé, beau sourire. Sauf que celui-ci exige que Zaineb porte le voile pour qu’elle devienne sa femme… Renforcé en cela par les convictions de Hamza, le frère de Zaineb, tout juste sorti des geôles de Ben Ali, dont le cœur s’est endurci, convaincu que la moralité religieuse ultrapuritaine saura, à elle seule, faire renaître une nouvelle Tunisie.
Le voile, être forcée de le porter (Zaineb), être forcée de l’enlever (Aïcha) : les amies vont mener leur combat intérieur, se respectant et s’entraidant l’une l’autre dans leur cheminement.
Superbement joué par ses interprètes féminins – Souhir Ben Amara (Aïcha) et Nour Meziou (Zaineb) sont absolument lumineuses – et masculins, même si les hommes (le frère, le fiancé…) n’ont pas le beau rôle, Millefeuille, de Nouri Bouzid, est un film très bien construit, dont on apprécie les dialogues particulièrement soignés.
Millefeuille, dont le titre en tunisien signifie « Je ne meurs pas », n’est pas un film politique ; il distille cependant, à travers l’histoire de ses deux héroïnes, nombre de messages qui le sont : la tension entre religion et politique ; la place des femmes dans une société arabe postrévolutionnaire ; la violence symbolique exercée sur le corps des femmes ; la question de la liberté individuelle dans une société pétrie de valeurs religieuses…
Le film ne cesse de filer la métaphore. Tel Brahim (Lotfi Abdelli), le fiancé qui-a-tout-réussi : de colère, il jette des pierres non pas contre les tenants du régime mais contre le mur d’une villa de riches mise en pièces lors de la révolution, lorsqu’il se rend compte qu’il a perdu sa belle de lui avoir exigé de porter le foulard. C’est cela, sa révolution à lui : la richesse ne suffit pas pour conquérir (acheter ?) un cœur.
Tel Hamza (Bahram Aloui), le frère de Zaineb et qui fut autrefois le fiancé d’Aïcha : il redécouvre une Tunisie en pleine ébullition, dont les mœurs se sont libérées – « une dépravation », à ses yeux. « Si seulement tu rêvais ! », lui lance Aïcha, qui lui reproche de ne rêver qu’« au Paradis » ; « Tu sais où est ta prison ? », reproche-t-elle à l’ancien prisonnier du régime de Ben Ali, « dans la tête. » Hamza, dont la foi s’est mêlée à la rancœur et au durcissement du cœur.
Enfin, ce drapeau rouge tunisien dont Zayneb drape les épaules d’Aïcha à la fin du film. Un drapeau qu’elle a cousu lorsque sa mère l’enferma chez elle, pour la forcer à accepter de porter le hijab, tisane de fleurs de pavot à l’appui pour mieux embrumer l’esprit de sa fille… Un drapeau rouge brodé de perles et de strass, où Zayneb y a insufflé toute sa créativité et son désespoir de femme aspirant à la liberté, un drapeau tunisien réinterprété qui symbolise, là, non seulement la révolution politique du pays mais aussi la révolution des esprits.
Autour du voile (hijab) se cristallise la destinée de deux jeunes femmes : Aïcha, qui élève ses deux sœurs depuis que sa mère est décédée et que son père s’est remarié, est pâtissière dans les sous-sols d’un café branché que fréquente la jeunesse tunisienne ; Zaineb, qui se rêve de se voir styliste, travaille également dans ce café comme serveuse, refusant les avances trop pressantes de son patron au comportement plus que harceleur.
L’avenir de Zaineb se dessine cependant radieux, elle va bientôt se marier avec Brahim, un entrepreneur de Nice, belle bagnole, bien sapé, beau sourire. Sauf que celui-ci exige que Zaineb porte le voile pour qu’elle devienne sa femme… Renforcé en cela par les convictions de Hamza, le frère de Zaineb, tout juste sorti des geôles de Ben Ali, dont le cœur s’est endurci, convaincu que la moralité religieuse ultrapuritaine saura, à elle seule, faire renaître une nouvelle Tunisie.
Le voile, être forcée de le porter (Zaineb), être forcée de l’enlever (Aïcha) : les amies vont mener leur combat intérieur, se respectant et s’entraidant l’une l’autre dans leur cheminement.
Superbement joué par ses interprètes féminins – Souhir Ben Amara (Aïcha) et Nour Meziou (Zaineb) sont absolument lumineuses – et masculins, même si les hommes (le frère, le fiancé…) n’ont pas le beau rôle, Millefeuille, de Nouri Bouzid, est un film très bien construit, dont on apprécie les dialogues particulièrement soignés.
Millefeuille, dont le titre en tunisien signifie « Je ne meurs pas », n’est pas un film politique ; il distille cependant, à travers l’histoire de ses deux héroïnes, nombre de messages qui le sont : la tension entre religion et politique ; la place des femmes dans une société arabe postrévolutionnaire ; la violence symbolique exercée sur le corps des femmes ; la question de la liberté individuelle dans une société pétrie de valeurs religieuses…
Le film ne cesse de filer la métaphore. Tel Brahim (Lotfi Abdelli), le fiancé qui-a-tout-réussi : de colère, il jette des pierres non pas contre les tenants du régime mais contre le mur d’une villa de riches mise en pièces lors de la révolution, lorsqu’il se rend compte qu’il a perdu sa belle de lui avoir exigé de porter le foulard. C’est cela, sa révolution à lui : la richesse ne suffit pas pour conquérir (acheter ?) un cœur.
Tel Hamza (Bahram Aloui), le frère de Zaineb et qui fut autrefois le fiancé d’Aïcha : il redécouvre une Tunisie en pleine ébullition, dont les mœurs se sont libérées – « une dépravation », à ses yeux. « Si seulement tu rêvais ! », lui lance Aïcha, qui lui reproche de ne rêver qu’« au Paradis » ; « Tu sais où est ta prison ? », reproche-t-elle à l’ancien prisonnier du régime de Ben Ali, « dans la tête. » Hamza, dont la foi s’est mêlée à la rancœur et au durcissement du cœur.
Enfin, ce drapeau rouge tunisien dont Zayneb drape les épaules d’Aïcha à la fin du film. Un drapeau qu’elle a cousu lorsque sa mère l’enferma chez elle, pour la forcer à accepter de porter le hijab, tisane de fleurs de pavot à l’appui pour mieux embrumer l’esprit de sa fille… Un drapeau rouge brodé de perles et de strass, où Zayneb y a insufflé toute sa créativité et son désespoir de femme aspirant à la liberté, un drapeau tunisien réinterprété qui symbolise, là, non seulement la révolution politique du pays mais aussi la révolution des esprits.
Millefeuille, de Nouri Bouzid, avec Souhir Ben Amara, Nour Meziou, Bahram Aloui, Lotfi Abdelli…
Prix du meilleur réalisateur au Festival d’Abu Dhabi 2012, prix du meilleur film au Festival de Louxor 2013. En salles le 5 juin.
Prix du meilleur réalisateur au Festival d’Abu Dhabi 2012, prix du meilleur film au Festival de Louxor 2013. En salles le 5 juin.
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