Rachid Benzine
Rachid Benzine est islamologue. Il enseigne à l’Institut d’Etudes Politiques d’Aix-en-Provence et à l’Institut protestant de théologie de Paris. Il regrette l’absence d’une clause sur la liberté de conscience dans la Constitution.
Saphirnews : Comment jugez-vous le processus utilisé par le Roi pour élaborer cette Constitution ?
Rachid Benzine : Engager le débat était le bienvenu mais les conditions sont-elles vraiment bonnes ? Je salue le travail qui a été réalisé par la Commission mais je pense que la population ne peut pas juger sereinement le contenu de la Constitution en si peu de temps. Pour ma part, je crois que cette Constitution n’est pas une révolution mais qu’elle contient des prémices à de futurs changements et jette les bases d’une culture politique.
Quels sont les points importants de cette nouvelle Constitution ?
R. B : Reconnaitre la pluralité linguistique du Maroc est un point positif, malheureusement j’aurais aimé que l’on aille vers la reconnaissance de la liberté de conscience. L’Islam doit désormais être vécu de manière adulte. Je sais que la Commission avait inscrit la liberté de conscience dans l’article 3. Mais les confréries Oulémas et le PJD ont fait entendre leur voix et la Commission a reculé sur ce point. Je déplore ce manque d’audace et cette subordination au religieux. Le Maroc a raté une occasion d’engager une réforme nouvelle et très moderne.
Quelles conséquences concrètes peut avoir cet oubli ?
R.B : Cela va rapidement poser le problème des convertis. Ils sont de plus en plus nombreux, notamment à se convertir à l’évangélisme. Il y aura aussi la question des enfants issus d’union mixte entre un homme chiite et une femme sunnite. De plus, le Maroc est signataire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme qui reconnait cette liberté de conscience. Comment le pays va-t-il articuler ce droit positif et ce droit religieux ?
Saphirnews : Comment jugez-vous le processus utilisé par le Roi pour élaborer cette Constitution ?
Rachid Benzine : Engager le débat était le bienvenu mais les conditions sont-elles vraiment bonnes ? Je salue le travail qui a été réalisé par la Commission mais je pense que la population ne peut pas juger sereinement le contenu de la Constitution en si peu de temps. Pour ma part, je crois que cette Constitution n’est pas une révolution mais qu’elle contient des prémices à de futurs changements et jette les bases d’une culture politique.
Quels sont les points importants de cette nouvelle Constitution ?
R. B : Reconnaitre la pluralité linguistique du Maroc est un point positif, malheureusement j’aurais aimé que l’on aille vers la reconnaissance de la liberté de conscience. L’Islam doit désormais être vécu de manière adulte. Je sais que la Commission avait inscrit la liberté de conscience dans l’article 3. Mais les confréries Oulémas et le PJD ont fait entendre leur voix et la Commission a reculé sur ce point. Je déplore ce manque d’audace et cette subordination au religieux. Le Maroc a raté une occasion d’engager une réforme nouvelle et très moderne.
Quelles conséquences concrètes peut avoir cet oubli ?
R.B : Cela va rapidement poser le problème des convertis. Ils sont de plus en plus nombreux, notamment à se convertir à l’évangélisme. Il y aura aussi la question des enfants issus d’union mixte entre un homme chiite et une femme sunnite. De plus, le Maroc est signataire de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme qui reconnait cette liberté de conscience. Comment le pays va-t-il articuler ce droit positif et ce droit religieux ?
Mohamed Ezzouak, Yabiladi
Mohamed Ezzouak est le fondateur du site Yabiladi.com qui s’adresse à la diaspora marocaine (MRE). S’il salue les évolutions proposées par la Constitution, notamment sur le droit de vote des MRE et des étrangers, Mohamed Ezzouak regrette le trop plein de pouvoir du roi.
Comment jugez-vous le processus utilisé par le Roi pour élaborer cette Constitution ?
Mohamed Ezzouak : L’adoption d’une nouvelle Constitution est un moment fort dans l’Histoire d’un pays qui engage sur les décennies à venir. Je regrette la précipitation avec laquelle ce projet a été mis en place. Peut-être qu’un vote au mois de septembre aurait été profitable pour les Marocains. Le peuple semble pris en otage par l’agenda. De plus, la position des partis politiques qui appellent presque tous à voter oui est dangereuse pour le débat démocratique, ils ne jouent pas leur rôle d’agitateurs d’idées.
Quels sont les points importants de cette nouvelle Constitution ?
M.E : Il y a des points positifs. Ainsi, la reconnaissance de la pluralité linguistique est intéressante, tout comme la consécration de l’égalité hommes/femmes ou la reconnaissance d’un droit de vote pour les MRE. L’autorisation pour les Espagnols et les Belges résidant au Maroc de voter lors des élections municipales est une bonne surprise qui répond à un besoin de réciprocité. Mais nous sommes encore loin d’une véritable monarchie parlementaire et le roi conserve beaucoup de pouvoir au sein de l’exécutif. Il a donné de nouveaux pouvoirs au gouvernement et au Parlement, tout en gardant de larges prérogatives sur les trois pouvoirs.
Que pensez-vous du recul de la Commission sur la liberté de conscience ?
M.E : Cela prouve la faiblesse des institutions dans la société marocaine face aux sorties populistes de certains politiques. Le pouvoir voulait rapidement adopter une Constitution consensuelle et a donc cédé sur ce point suite à la polémique. Mais la réalité est là. Beaucoup de Marocains sont déjà convertis, athés ou agnostiques. Dans le passé, le Maroc a toujours abrité une importante communauté juive ou chrétienne sans aucun problème. Aujourd’hui, il est regrettable que la société se crispe sur ces questions et oublie l’Histoire. Nous ne serons pas moins une société musulmane en interdisant à celui qui ne veut pas croire d'assumer son choix.
Comment jugez-vous le processus utilisé par le Roi pour élaborer cette Constitution ?
Mohamed Ezzouak : L’adoption d’une nouvelle Constitution est un moment fort dans l’Histoire d’un pays qui engage sur les décennies à venir. Je regrette la précipitation avec laquelle ce projet a été mis en place. Peut-être qu’un vote au mois de septembre aurait été profitable pour les Marocains. Le peuple semble pris en otage par l’agenda. De plus, la position des partis politiques qui appellent presque tous à voter oui est dangereuse pour le débat démocratique, ils ne jouent pas leur rôle d’agitateurs d’idées.
Quels sont les points importants de cette nouvelle Constitution ?
M.E : Il y a des points positifs. Ainsi, la reconnaissance de la pluralité linguistique est intéressante, tout comme la consécration de l’égalité hommes/femmes ou la reconnaissance d’un droit de vote pour les MRE. L’autorisation pour les Espagnols et les Belges résidant au Maroc de voter lors des élections municipales est une bonne surprise qui répond à un besoin de réciprocité. Mais nous sommes encore loin d’une véritable monarchie parlementaire et le roi conserve beaucoup de pouvoir au sein de l’exécutif. Il a donné de nouveaux pouvoirs au gouvernement et au Parlement, tout en gardant de larges prérogatives sur les trois pouvoirs.
Que pensez-vous du recul de la Commission sur la liberté de conscience ?
M.E : Cela prouve la faiblesse des institutions dans la société marocaine face aux sorties populistes de certains politiques. Le pouvoir voulait rapidement adopter une Constitution consensuelle et a donc cédé sur ce point suite à la polémique. Mais la réalité est là. Beaucoup de Marocains sont déjà convertis, athés ou agnostiques. Dans le passé, le Maroc a toujours abrité une importante communauté juive ou chrétienne sans aucun problème. Aujourd’hui, il est regrettable que la société se crispe sur ces questions et oublie l’Histoire. Nous ne serons pas moins une société musulmane en interdisant à celui qui ne veut pas croire d'assumer son choix.
Younès Boumehdi, Hit Radio
Younès Boumehdi est le président de Hit Radio, la première radio de « libre antenne » au Maroc. Cet entrepreneur se dit satisfait des réformes sur la séparation des pouvoirs dans la nouvelle Constitution, même s’il reste prudent sur le long apprentissage qui attend encore le pays pour constituer une véritable démocratie.
Comment jugez-vous le processus utilisé par le Roi pour élaborer cette Constitution ?
Younès Boumehdi : Il y avait d’un côté l’urgence de la rue et un nécessaire temps de réflexion, en ce sens, je trouve que le temps donné au débat était assez équilibré. Des membres de partis politiques mais aussi de la société civile ont pu s’exprimer devant les membres de la Commission, fatalement il y a des plus et des moins mais ce projet est fonctionnel.
Quels sont les points importants de cette nouvelle Constitution ?
Y.B : Beaucoup de points positifs sont ressortis. Le droit de vote des MRE ou des étrangers résidant au Maroc pour les municipale (avec une clause de réciprocité), mais ce sont surtout certaines institutions qui ont vu leurs pouvoirs étendus comme le Conseil des droits de l’Homme, l’Instance de lutte contre la corruption ou encore le Conseil de la concurrence. Il faut désormais que la société civile fasse son apprentissage de la démocratie.
Que pensez-vous du recul de la Commission sur la liberté de conscience ?
Y.B : La liberté de conscience existe dans la Constitution à travers la référence à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme qui reconnait ce principe.
Comment jugez-vous le processus utilisé par le Roi pour élaborer cette Constitution ?
Younès Boumehdi : Il y avait d’un côté l’urgence de la rue et un nécessaire temps de réflexion, en ce sens, je trouve que le temps donné au débat était assez équilibré. Des membres de partis politiques mais aussi de la société civile ont pu s’exprimer devant les membres de la Commission, fatalement il y a des plus et des moins mais ce projet est fonctionnel.
Quels sont les points importants de cette nouvelle Constitution ?
Y.B : Beaucoup de points positifs sont ressortis. Le droit de vote des MRE ou des étrangers résidant au Maroc pour les municipale (avec une clause de réciprocité), mais ce sont surtout certaines institutions qui ont vu leurs pouvoirs étendus comme le Conseil des droits de l’Homme, l’Instance de lutte contre la corruption ou encore le Conseil de la concurrence. Il faut désormais que la société civile fasse son apprentissage de la démocratie.
Que pensez-vous du recul de la Commission sur la liberté de conscience ?
Y.B : La liberté de conscience existe dans la Constitution à travers la référence à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme qui reconnait ce principe.
Soundouss El Kasri, Au Fait
Soundouss El Kasri est la rédactrice en chef du quotidien marocain d'actualité Au Fait. Elle fait partie de cette minorité qui va boycotter le référendum. Un choix assumé qu’elle explique par le décalage entre la réalité de cette Constitution et les promesses du roi. Agacée par le « oui, ouisme ambiant », elle prépare une chronique sur le sujet, à paraître dans les colonnes de son quotidien.
Pourquoi avoir choisi de vous abstenir lors de ce référendum ?
Soundouss El Kasri : J’ai beaucoup réfléchi. J’aurais préféré voter "non" pour au moins participer au vote car il est vrai que cette Constitution est toujours mieux que l’ancienne. Mais je suis quelqu’un de procédurier, on m’a promis une monarchie parlementaire et ce n’est pas le cas avec cette Constitution. Le Roi est omniprésent dans les différents pouvoirs.
Quels sont les éléments qui pèsent sur votre décision ?
S.E : Il y en a plusieurs, le principal est que cette Constitution n’établit pas une monarchie parlementaire. Le recul sur la liberté de conscience fait aussi partie des raisons pour lesquelles je boycotte ce référendum. Certains disent que cette clause est présente de façon détournée (dans la référence à la Déclaration des Droits de l’Homme), j’aurais préféré que ce soit clairement écrit dans la Constitution.
Pourquoi avoir choisi de vous abstenir lors de ce référendum ?
Soundouss El Kasri : J’ai beaucoup réfléchi. J’aurais préféré voter "non" pour au moins participer au vote car il est vrai que cette Constitution est toujours mieux que l’ancienne. Mais je suis quelqu’un de procédurier, on m’a promis une monarchie parlementaire et ce n’est pas le cas avec cette Constitution. Le Roi est omniprésent dans les différents pouvoirs.
Quels sont les éléments qui pèsent sur votre décision ?
S.E : Il y en a plusieurs, le principal est que cette Constitution n’établit pas une monarchie parlementaire. Le recul sur la liberté de conscience fait aussi partie des raisons pour lesquelles je boycotte ce référendum. Certains disent que cette clause est présente de façon détournée (dans la référence à la Déclaration des Droits de l’Homme), j’aurais préféré que ce soit clairement écrit dans la Constitution.
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