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Société

Toulouse : coup dur pour les promoteurs du dialogue interreligieux

Rédigé par Benjamin Seze | Lundi 2 Avril 2012 à 08:02

           

De nombreux acteurs œuvrent en France pour le dialogue interreligieux ou interculturel. Comment font-ils face aux événements de Toulouse ?



Toulouse : coup dur pour les promoteurs du dialogue interreligieux
« Mon Dieu, faites que ce ne soit pas un musulman », se rappelle s’être dit Soufiane Torkmani, avant que l’identité et les motivations du tueur de Toulouse et Montauban ne soient dévoilées. Sa crainte ? « Que cela alimente les clichés. On sait que les amalgames sont vite faits. »

Ce jeune Parisien est membre de Coexister. Depuis quelques années, cette association qui regroupe des jeunes chrétiens, juifs et musulmans, intervient dans les établissements scolaires, les universités, les associations et les entreprises pour déconstruire les préjugés. « On a peur que tout ce qu’on essaie de mener au quotidien par les rencontres, les dialogues, soit anéanti », confient Soufiane Torkmani et Samuel Grzybowski, président de Coexister.

Appel à l'unité

Pour les nombreux acteurs du dialogue interreligieux ou interculturel en France – « un travail difficile et de longue haleine » –, les événements de Toulouse ont souvent été vécus comme un coup dur. Même s’ils saluent l’unanimité des responsables politiques et religieux dans la dénonciation des crimes et dans l’appel à l’unité, même s’ils affirment que ce drame les conforte dans leur combat, montrant plus que jamais sa nécessité, ils ont conscience que ce fait divers ne leur « facilite pas la tâche », selon Corine Goldberger, coprésidente du groupe Shalom, Paix, Salam !, créé en mars 2009 sur Facebook.

« Un arbre qui tombe fait beaucoup plus de bruit qu’une forêt qui pousse, cite Benjamin Bitane, de l’association Coexister. Quand j’ai vu les commentaires à vif de certains de mes amis sur Facebook, je me suis dit : "Il y a encore du boulot." »

Comment faire face aux risques d’amalgames, de replis communautaires et d’exacerbations des tensions ? Benjamin Bitane regrette que la réponse politique soit aujourd’hui essentiellement sécuritaire. « C’est important qu’il y ait aussi un travail éducatif », estime le jeune homme. « Il faut renforcer l’aspect pédagogique », confirme Jonathan Hayoun, président de l’Union des étudiants juifs de France qui, par le biais du programme Coexist, en partenariat avec SOS Racisme, intervient depuis huit ans dans les collèges et lycées.

Éducation

Une éducation qui ne peut marcher, selon Mohamed Ould-Kherroubi, imam de la mosquée de Versailles, qu’à travers des rencontres : « Beaucoup d’expériences interreligieuses intéressantes existent, mais elles manquent de visibilité. Pour les collégiens et lycéens, ce ne sont que des mots. Il faut qu’au-delà du discours intellectuel, ils aient un exemple concret de personnes, bien assises dans leurs convictions, qui dialoguent en bonne intelligence et s’entendent bien. »

Le rabbin Gabriel Haggaï (1) rejoint ce point de vue : « Plus que les paroles, l’important c’est le symbole : le fait d’être présents, de montrer qu’on est ensemble et amis. »

Outre les conférences et la sensibilisation du grand public, certains acteurs promeuvent des moments de partage, d’échange, le plus souvent au niveau local, entre personnes de cultures ou de religions différentes. « Nous organisons des camps d’été qui réunissent des scouts et éclaireurs juifs, musulmans, chrétiens et laïcs », explique Philippe Bancon (2), membre de la Fédération du scoutisme français.

« Caisse de résonance de la société », la Fédération n’est selon lui pas imperméable à des événements comme celui de Toulouse ou, d’une manière plus générale, à l’importation en France des conflits du Proche-Orient. « Notre principe est que des gens qui ont vécu ensemble ne peuvent pas se faire la guerre. »

Une idée reprise, notamment par Mohamed Ould-Kherroubi, président de l’Association des musulmans de Versailles, qui entretient depuis des années des liens forts avec l’Association israélite de Versailles : « Lorsqu’un dialogue s’est noué, des amitiés peuvent naître. Et à partir de là, on peut se disputer comme des amis, c’est-à-dire sans que cela ne porte à conséquence. »


Notes
(1) Gabriel Haggaï est vice-président de l’association CIEUX (Comité interreligieux pour une éthique universelle et contre la xénophobie).
(2) Philippe Bancon est délégué général des Scouts et Guides de France.





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