Alors que tous les peuples s'apprêtent à fêter la fin de l'année écoulée et l'avènement de la suivante, une partie oubliée de ce monde célèbre le troisième anniversaire de l’agression israélienne contre sa population civile.
Comme le monde entier, nous aimerions fêter la fin et le début d'une année, mais, chaque fois, cette période nous rappelle la fin tragique de 2008. C’était en décembre 2008, trois ans déjà, trois années se sont écoulées, mais c’est difficile pour nous, Palestiniens de Gaza, d’oublier la guerre, les massacres et les crimes commis par cette armée sauvage, contre nos femmes et nos enfants, contre nos maisons et nos écoles, contre nos usines et nos routes.
Cette guerre avait pour objectif de briser la volonté d’une population résistante, cette population courageuse qui a résolu de défier le blocus imposé par la force de l’occupation israélienne, mais qui a surtout décidé de rester attachée à sa terre, en dépit de toutes les difficultés et des mesures atroces d’une occupation qui ne veut jamais la paix.
Comment pourrait-on effacer les événements dramatiques de la dernière guerre israélienne contre la population civile gazaouie ? Lequel d'entre nous pourrait oublier les pertes humaines, la destruction massive de nos infrastructures civiles ? Y-a-il un seul Gazaoui qui n’ait pas été touché directement ou indirectement par les attaques sanglantes d’une armée d’occupation qui visait avant tout les civils ?
Mais la question la plus importante qui se pose après ces trois années, c'est : qu’est ce qui a changé à Gaza ?
Avec la mobilisation internationale, les manifestations dans beaucoup de pays contre cette offensive militaire israélienne, mais surtout, après les réactions et les critiques de plus en plus affichées envers la politique de ce pays contre la bande de Gaza, les Palestiniens de cette prison à ciel ouvert pensaient que le blocus allait se lever, et leur situation économique et sociale évoluer. Hélas ! Il n'en est rien !
Trois ans après la fin de ce carnage, la situation stagne, rien ne bouge et les gens, sur place, attendent et attendent. Oui, rien ne bouge, malgré quelques événements internes et externes qui ont apporté un signe d’espoir pour les Palestiniens, comme les révolutions dans le cadre du Printemps arabe, comme la demande d’adhésion de la Palestine aux Nations unies, et le discours historique du président de l’Autorité palestinienne devant l’Assemblée générale de l’ONU, comme l’adhésion de la Palestine à l’UNESCO et la libération de plus de mille prisonniers palestiniens, dont 600 de Gaza accueillis dans une liesse populaire, rare dans cette prison à ciel ouvert, malgré les pourparlers sérieux pour faire avancer la réconciliation, malgré la mobilisation des jeunes Gazaouis dans leurs manifestations de masse contre la division, oui, malgré tout cela, rien ne bouge.
Ces événements, en dépit de leur importance, n’ont pas eu d'influence sur la vie difficile de 1,6 million de Gazaouis, qui continuent de vivre dans des conditions précaires. Ils n’ont pas changé l'existence de ces jeunes qui vivent la pauvreté, le chômage et la souffrance.
Comme le monde entier, nous aimerions fêter la fin et le début d'une année, mais, chaque fois, cette période nous rappelle la fin tragique de 2008. C’était en décembre 2008, trois ans déjà, trois années se sont écoulées, mais c’est difficile pour nous, Palestiniens de Gaza, d’oublier la guerre, les massacres et les crimes commis par cette armée sauvage, contre nos femmes et nos enfants, contre nos maisons et nos écoles, contre nos usines et nos routes.
Cette guerre avait pour objectif de briser la volonté d’une population résistante, cette population courageuse qui a résolu de défier le blocus imposé par la force de l’occupation israélienne, mais qui a surtout décidé de rester attachée à sa terre, en dépit de toutes les difficultés et des mesures atroces d’une occupation qui ne veut jamais la paix.
Comment pourrait-on effacer les événements dramatiques de la dernière guerre israélienne contre la population civile gazaouie ? Lequel d'entre nous pourrait oublier les pertes humaines, la destruction massive de nos infrastructures civiles ? Y-a-il un seul Gazaoui qui n’ait pas été touché directement ou indirectement par les attaques sanglantes d’une armée d’occupation qui visait avant tout les civils ?
Mais la question la plus importante qui se pose après ces trois années, c'est : qu’est ce qui a changé à Gaza ?
Avec la mobilisation internationale, les manifestations dans beaucoup de pays contre cette offensive militaire israélienne, mais surtout, après les réactions et les critiques de plus en plus affichées envers la politique de ce pays contre la bande de Gaza, les Palestiniens de cette prison à ciel ouvert pensaient que le blocus allait se lever, et leur situation économique et sociale évoluer. Hélas ! Il n'en est rien !
Trois ans après la fin de ce carnage, la situation stagne, rien ne bouge et les gens, sur place, attendent et attendent. Oui, rien ne bouge, malgré quelques événements internes et externes qui ont apporté un signe d’espoir pour les Palestiniens, comme les révolutions dans le cadre du Printemps arabe, comme la demande d’adhésion de la Palestine aux Nations unies, et le discours historique du président de l’Autorité palestinienne devant l’Assemblée générale de l’ONU, comme l’adhésion de la Palestine à l’UNESCO et la libération de plus de mille prisonniers palestiniens, dont 600 de Gaza accueillis dans une liesse populaire, rare dans cette prison à ciel ouvert, malgré les pourparlers sérieux pour faire avancer la réconciliation, malgré la mobilisation des jeunes Gazaouis dans leurs manifestations de masse contre la division, oui, malgré tout cela, rien ne bouge.
Ces événements, en dépit de leur importance, n’ont pas eu d'influence sur la vie difficile de 1,6 million de Gazaouis, qui continuent de vivre dans des conditions précaires. Ils n’ont pas changé l'existence de ces jeunes qui vivent la pauvreté, le chômage et la souffrance.
Une situation toujours plus précaire
En décembre 2011, la situation actuelle dans la bande de Gaza est marquée par :
− Le blocus inhumain et illégal imposé par le gouvernement israélien depuis plus de cinq ans, blocus maintenu, certes un peu allégé, grâce aux événements dans notre région ou à des pressions réelles de la part de quelques pays et quelques organisations internationales. Actuellement, 130 à 150 camions entrent à Gaza chaque jour, mais la moitié de ces camions sont pour les organisations internationales et leurs projets de construction d'écoles et de stations d’eau. Gaza n’a droit qu’à 98 produits au lieu de 450 avant le blocus, quelques produits et médicaments n’entrent pas, ce qui a aggravé la situation. Selon les estimations des organisations internationales, la bande de Gaza a besoin de 750 camions par jour pour répondre aux besoins énormes d’une population en augmentation permanente.
− Les conséquences de ce blocus sont dramatiques : 77 % des habitants de Gaza vivent de l’aide alimentaire humanitaire, distribuée par les organisations internationales.
− 90 % des usines détruites pendant la guerre de 2008 sont fermées ou tournent au ralenti, car les matières premières n’entrent pas.
− Les maisons détruites lors de la dernière agression israélienne contre la bande de Gaza n’ont pas été reconstruites ; les matériaux de construction sont toujours interdits d’entrer, par ordre militaire israélien; les quelques matériaux qui passent actuellement à Gaza sont pour les projets internationaux comme les écoles de l’UNRWA ; plus de 3 000 habitants vivent toujours à côté des ruines de leurs maisons détruites, aucun projet de reconstruction civil n’a eu lieu.
− Le chômage s’est accru, notamment chez les jeunes : plus de 65 % des jeunes Gazaouis sont au chômage. On note l’absence de projets de développement réel : tous les projets actuels sont pour le secours et non pour le développement.
− La division continue, malgré les rencontres et les manifestations populaires du 15 mars 2011, organisées massivement par les jeunes, à Gaza comme en Cisjordanie, les Palestiniens sont divisés entre deux gouvernements et entre deux projets différents.
− Les passages sont fermés, ils ouvrent et ferment de façon arbitraire pour permettre à quelques produits de sortir de Gaza, notamment les produits agricoles comme les fraises et les roses, mais cela est occasionnel, et seulement quand il y a une pression internationale qui permette d'exporter deux camions de ces produits vers l’étranger.
− Le passage de Rafah, le seul passage qui relie la bande de Gaza à l’extérieur, est ouvert actuellement et on constate une amélioration certes, mais, vu le nombre considérable de voyageurs, étudiants et malades, les Palestiniens exigent une ouverture totale, notamment avec le changement politique en Egypte.
A tout cela s’ajoutent les attaques et bombardements israéliens qui n'ont pas cessé : durant cette année 2011, plus de 70 Palestiniens sont morts, parmi eux 20 enfants et 5 femmes après des raids de l’armée israélienne contre Gaza.
Les conséquences du blocus et cette situation marquée par des difficultés économiques obligent beaucoup d’habitants à aller récupérer des matériaux dans la zone tampon au nord de la bande de Gaza, une zone dangereuse contrôlée par l’armée de l’occupation israélienne qui n’hésite pas à tirer, elle a causé la mort de 6 paysans en 2011. Cela les contraint aussi à aller travailler aux tunnels à Rafah au sud de la bande de Gaza, un travail à risque puisque plus de 60 travailleurs y ont trouvé la mort, soit à cause l’effondrement des tunnels, soit à cause des raids israéliens.
L’aspect le plus grave de toute cette situation difficile des habitants de la bande de Gaza, et qui marque l’esprit de la majorité des habitants ici, est l’absence de perspectives chez ces gens qui ne voient aucun changement, qui constatent que les choses n’avancent pas, ne bougent pas, sentiment horrible qui va influencer l’avenir de cette génération, surtout celle des jeunes, qui commencent à perdre espoir en un avenir immédiat meilleur .
Trois ans après, Gaza la blessée, Gaza la meurtrie existe et résiste, elle continue de souffrir, elle est toujours sous blocus, Gaza affronte les bombardements et les incursions de l’armée israélienne, Gaza est toujours et plus que jamais une prison à ciel ouvert.
Mais la vie continue, ses habitants s’adaptent et montrent une patience extraordinaire devant le silence complice d'une communauté internationale impuissante. Les Gazaouis attendent toujours, ils n’ont pas d'autres choix que d’attendre, ils attendent trois réponses claires à leurs interrogations :
− D’abord, question légitime : jusqu’à quand les violations israéliennes du droit international ? Jusqu’à quand l’impunité d’Israël ? Jusqu’à quand va durer leur souffrance ?
− Puis, y aura-t-il une décision courageuse de la part des instances internationales de lever le blocus inhumain qui leur est imposé de façon illégale par une force d’occupation ?
− Et, finalement, quand vont-ils ressentir une amélioration réelle dans leur vie et un changement radical de leur situation précaire ?
En attendant, les Palestiniens de Gaza tiennent bon, persistent, patientent, résistent, mais surtout, ils continuent d’espérer en un lendemain meilleur, un lendemain de liberté, de paix, mais, avant tout, un lendemain de justice.
* Ziad Medoukh est professeur de français à l'université d'Al-Aqsa, à Gaza.
− Le blocus inhumain et illégal imposé par le gouvernement israélien depuis plus de cinq ans, blocus maintenu, certes un peu allégé, grâce aux événements dans notre région ou à des pressions réelles de la part de quelques pays et quelques organisations internationales. Actuellement, 130 à 150 camions entrent à Gaza chaque jour, mais la moitié de ces camions sont pour les organisations internationales et leurs projets de construction d'écoles et de stations d’eau. Gaza n’a droit qu’à 98 produits au lieu de 450 avant le blocus, quelques produits et médicaments n’entrent pas, ce qui a aggravé la situation. Selon les estimations des organisations internationales, la bande de Gaza a besoin de 750 camions par jour pour répondre aux besoins énormes d’une population en augmentation permanente.
− Les conséquences de ce blocus sont dramatiques : 77 % des habitants de Gaza vivent de l’aide alimentaire humanitaire, distribuée par les organisations internationales.
− 90 % des usines détruites pendant la guerre de 2008 sont fermées ou tournent au ralenti, car les matières premières n’entrent pas.
− Les maisons détruites lors de la dernière agression israélienne contre la bande de Gaza n’ont pas été reconstruites ; les matériaux de construction sont toujours interdits d’entrer, par ordre militaire israélien; les quelques matériaux qui passent actuellement à Gaza sont pour les projets internationaux comme les écoles de l’UNRWA ; plus de 3 000 habitants vivent toujours à côté des ruines de leurs maisons détruites, aucun projet de reconstruction civil n’a eu lieu.
− Le chômage s’est accru, notamment chez les jeunes : plus de 65 % des jeunes Gazaouis sont au chômage. On note l’absence de projets de développement réel : tous les projets actuels sont pour le secours et non pour le développement.
− La division continue, malgré les rencontres et les manifestations populaires du 15 mars 2011, organisées massivement par les jeunes, à Gaza comme en Cisjordanie, les Palestiniens sont divisés entre deux gouvernements et entre deux projets différents.
− Les passages sont fermés, ils ouvrent et ferment de façon arbitraire pour permettre à quelques produits de sortir de Gaza, notamment les produits agricoles comme les fraises et les roses, mais cela est occasionnel, et seulement quand il y a une pression internationale qui permette d'exporter deux camions de ces produits vers l’étranger.
− Le passage de Rafah, le seul passage qui relie la bande de Gaza à l’extérieur, est ouvert actuellement et on constate une amélioration certes, mais, vu le nombre considérable de voyageurs, étudiants et malades, les Palestiniens exigent une ouverture totale, notamment avec le changement politique en Egypte.
A tout cela s’ajoutent les attaques et bombardements israéliens qui n'ont pas cessé : durant cette année 2011, plus de 70 Palestiniens sont morts, parmi eux 20 enfants et 5 femmes après des raids de l’armée israélienne contre Gaza.
Les conséquences du blocus et cette situation marquée par des difficultés économiques obligent beaucoup d’habitants à aller récupérer des matériaux dans la zone tampon au nord de la bande de Gaza, une zone dangereuse contrôlée par l’armée de l’occupation israélienne qui n’hésite pas à tirer, elle a causé la mort de 6 paysans en 2011. Cela les contraint aussi à aller travailler aux tunnels à Rafah au sud de la bande de Gaza, un travail à risque puisque plus de 60 travailleurs y ont trouvé la mort, soit à cause l’effondrement des tunnels, soit à cause des raids israéliens.
L’aspect le plus grave de toute cette situation difficile des habitants de la bande de Gaza, et qui marque l’esprit de la majorité des habitants ici, est l’absence de perspectives chez ces gens qui ne voient aucun changement, qui constatent que les choses n’avancent pas, ne bougent pas, sentiment horrible qui va influencer l’avenir de cette génération, surtout celle des jeunes, qui commencent à perdre espoir en un avenir immédiat meilleur .
Trois ans après, Gaza la blessée, Gaza la meurtrie existe et résiste, elle continue de souffrir, elle est toujours sous blocus, Gaza affronte les bombardements et les incursions de l’armée israélienne, Gaza est toujours et plus que jamais une prison à ciel ouvert.
Mais la vie continue, ses habitants s’adaptent et montrent une patience extraordinaire devant le silence complice d'une communauté internationale impuissante. Les Gazaouis attendent toujours, ils n’ont pas d'autres choix que d’attendre, ils attendent trois réponses claires à leurs interrogations :
− D’abord, question légitime : jusqu’à quand les violations israéliennes du droit international ? Jusqu’à quand l’impunité d’Israël ? Jusqu’à quand va durer leur souffrance ?
− Puis, y aura-t-il une décision courageuse de la part des instances internationales de lever le blocus inhumain qui leur est imposé de façon illégale par une force d’occupation ?
− Et, finalement, quand vont-ils ressentir une amélioration réelle dans leur vie et un changement radical de leur situation précaire ?
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