Plusieurs applications islamiques sont dans la tourmente, Muslim Pro en tête. Une enquête menée par Motherboard, un média propriété du groupe Vice consacré aux sciences et aux nouvelles technologies, a révélé, lundi 16 novembre, que la populaire application pour les horaires de prières, téléchargée plus de 98 millions de fois à travers le monde, aurait monétisé auprès de tiers les données de localisation de ses utilisateurs qui seraient, en bout de chaîne, transmises à l’armée américaine.
Muslim Pro vendait jusqu'ici les données de localisation de ses utilisateurs à X-Mode. Une fois ces données en main, ce courtier privé se chargeait de les revendre à divers prestataires en lien avec le secteur de la défense avant d'être fournies au Pentagone.
Selon les dires de son PDG Joshua Anton sur CNN, X-Mode suivrait pas moins de 25 millions d'appareils aux États-Unis chaque mois, et 40 millions ailleurs, notamment dans l'Union européenne, en Amérique latine et dans la région Asie-Pacifique. Et cela peut rapporter gros pour ceux qui signent un contrat avec X-Mode dès lors que l'usage d'une application très téléchargée est quotidien : les développeurs peuvent, en effet, gagner 1 500 dollars par mois avec 50 000 utilisateurs quotidiens actifs aux Etats-Unis.
Muslim Pro vendait jusqu'ici les données de localisation de ses utilisateurs à X-Mode. Une fois ces données en main, ce courtier privé se chargeait de les revendre à divers prestataires en lien avec le secteur de la défense avant d'être fournies au Pentagone.
Selon les dires de son PDG Joshua Anton sur CNN, X-Mode suivrait pas moins de 25 millions d'appareils aux États-Unis chaque mois, et 40 millions ailleurs, notamment dans l'Union européenne, en Amérique latine et dans la région Asie-Pacifique. Et cela peut rapporter gros pour ceux qui signent un contrat avec X-Mode dès lors que l'usage d'une application très téléchargée est quotidien : les développeurs peuvent, en effet, gagner 1 500 dollars par mois avec 50 000 utilisateurs quotidiens actifs aux Etats-Unis.
Des données qui peuvent servir pour des frappes militaires
En parallèle de X-Mode, et dans l'optique de récupérer un maximum de données, l’armée américaine a également fait appel à la société Babel Street qui commercialise un outil de localisation appelé Locate X. Motherboard affirme que le commandement des opérations spéciales américaines (USSOCOM), une branche de l'armée chargée, entre autres, de la lutte antiterroriste, a acheté un accès au logiciel afin d'assister les opérations de ses forces spéciales à l'étranger.
L'USSOCOM a lui-même confirmé l'achat de Locate X « pour répondre aux besoins » de ses missions. Avant de préciser : « Nous adhérons strictement aux procédures et aux politiques établies pour protéger la vie privée, les libertés civiles, les droits constitutionnels et légaux des citoyens américains. » Toutefois, si les données de Locate X sont anonymes, une source interrogée par Motherboard a affirmé qu’il était tout à fait possible de lever cet anonymat.
L’enquête « met en évidence l’opacité de l’industrie des données de localisation et le fait que l'armée américaine, qui a déjà tristement utilisé des données de localisation pour cibler les frappes de drones, achète l'accès à des données sensibles ». Ici, « de nombreux utilisateurs des applications impliquées dans la chaîne d'approvisionnement de données sont musulmans, ce qui n’est pas anodin compte tenu que les États-Unis (…) ont tué des centaines de milliers de civils lors d’opérations militaires au Pakistan, en Afghanistan et en Irak », indique Motherboard. Néanmoins, ce dernier déclare ne pas avoir connaissance d'opérations militaires pour lesquelles les données issues des applications comme Muslim Pro ont pu être utilisées.
L'USSOCOM a lui-même confirmé l'achat de Locate X « pour répondre aux besoins » de ses missions. Avant de préciser : « Nous adhérons strictement aux procédures et aux politiques établies pour protéger la vie privée, les libertés civiles, les droits constitutionnels et légaux des citoyens américains. » Toutefois, si les données de Locate X sont anonymes, une source interrogée par Motherboard a affirmé qu’il était tout à fait possible de lever cet anonymat.
L’enquête « met en évidence l’opacité de l’industrie des données de localisation et le fait que l'armée américaine, qui a déjà tristement utilisé des données de localisation pour cibler les frappes de drones, achète l'accès à des données sensibles ». Ici, « de nombreux utilisateurs des applications impliquées dans la chaîne d'approvisionnement de données sont musulmans, ce qui n’est pas anodin compte tenu que les États-Unis (…) ont tué des centaines de milliers de civils lors d’opérations militaires au Pakistan, en Afghanistan et en Irak », indique Motherboard. Néanmoins, ce dernier déclare ne pas avoir connaissance d'opérations militaires pour lesquelles les données issues des applications comme Muslim Pro ont pu être utilisées.
Une enquête publique réclamée au Congrès américain
Muslim Pro est loin d'être la seule application éclaboussée par ces révélations. Bien d'autres sont concernées comme l’application de rencontres Muslim Mingle, téléchargée plus de 100 000 fois. Toutes ne sont, par ailleurs, pas communautaires. C'est le cas du podomètre Accupedo, téléchargé plus de 5 millions de fois, ou encore de Global Storms, une appli qui traque les ouragans et les tempêtes tropicales et qui a séduit plus d'un million d'utilisateurs.
Cette affaire a suscité la colère de nombreux internautes, en particulier du côté des musulmans. Le Conseil des relations américano-islamiques (CAIR) a fermement condamné, lundi 16 novembre, le gouvernement américain pour l’utilisation rapportée de données personnelles provenant d'applications islamiques « pour cibler la communauté musulmane ici et à l’étranger », et a réclamé du Congrès américain l’ouverture d'une « enquête publique approfondie » autour des procédés employés, qui pourraient bien révéler une nouvelle affaire d’espionnage gouvernemental.
« Pendant des années, de nombreux Américains musulmans ont été victimes d'espionnage, de profilage et d'autres formes de discrimination de la part du gouvernement ici, dans leur pays, tandis que beaucoup trop de civils musulmans à l'étranger ont été tués lors de frappes de drones et d'autres opérations militaires désastreuses », a fait savoir le directeur national adjoint du CAIR, Edward Ahmed Mitchell. « L'idée que notre gouvernement puisse utiliser des applications religieuses populaires pour se livrer à de tels comportements ajoute tout simplement l'insulte à l'injure. Tout cela doit cesser. Maintenant », a-t-il déclaré.
« Normalement, le gouvernement aurait besoin d'un mandat pour obtenir ces données si elles n'étaient pas disponibles à l'achat. Le CAIR remet en question la légalité de l’achat par le gouvernement américain de données privées sur les mouvements des utilisateurs de ces applications », fait part la principale organisation musulmane de défense des droits civiques. Car
Cette affaire a suscité la colère de nombreux internautes, en particulier du côté des musulmans. Le Conseil des relations américano-islamiques (CAIR) a fermement condamné, lundi 16 novembre, le gouvernement américain pour l’utilisation rapportée de données personnelles provenant d'applications islamiques « pour cibler la communauté musulmane ici et à l’étranger », et a réclamé du Congrès américain l’ouverture d'une « enquête publique approfondie » autour des procédés employés, qui pourraient bien révéler une nouvelle affaire d’espionnage gouvernemental.
« Pendant des années, de nombreux Américains musulmans ont été victimes d'espionnage, de profilage et d'autres formes de discrimination de la part du gouvernement ici, dans leur pays, tandis que beaucoup trop de civils musulmans à l'étranger ont été tués lors de frappes de drones et d'autres opérations militaires désastreuses », a fait savoir le directeur national adjoint du CAIR, Edward Ahmed Mitchell. « L'idée que notre gouvernement puisse utiliser des applications religieuses populaires pour se livrer à de tels comportements ajoute tout simplement l'insulte à l'injure. Tout cela doit cesser. Maintenant », a-t-il déclaré.
« Normalement, le gouvernement aurait besoin d'un mandat pour obtenir ces données si elles n'étaient pas disponibles à l'achat. Le CAIR remet en question la légalité de l’achat par le gouvernement américain de données privées sur les mouvements des utilisateurs de ces applications », fait part la principale organisation musulmane de défense des droits civiques. Car
Muslim Pro, dans l'embarras, réagit
Muslim Pro, qui appartient à la société Bitsmedia, s'est exprimé mardi 17 novembre pour se défendre des accusations qui lui sont lancées. « Les médias rapportent que Muslim Pro a vendu des données personnelles de ses utilisateurs à l'armée américaine. C'est incorrect et faux. Muslim Pro s'engage à protéger et à sécuriser la vie privée de ses utilisateurs. C'est une question que nous prenons très au sérieux », affirme d'emblée l'équipe dans un communiqué.
« Nous avons été ouvert et transparent au sujet des données que nous collectons, stockons et traitons parce que la confiance de millions de frères et sœurs de la oumma placée chaque jour dans Muslim Pro signifie tout pour nous », signifient ses responsables, assurant au passage appliquer « des dispositions de sécurité et des mesures de protection conformes aux normes de l'industrie » et sélectionner « des partenaires technologiques de premier plan pour assurer la sécurité de (ses) données sur (son) infrastructure cloud ».
Comme tant d'autres applications, Muslim Pro reconnaît qu'elle partage des données de ses utilisateurs avec différentes structures mais elles sont « anonymisées ». « Dans nos efforts pour mieux servir nos utilisateurs et aider les entreprises à améliorer leurs offres de produits et de services, nous avons partagé des données anonymisées avec des partenaires technologiques que nous sélectionnons et qui sont tenus de se conformer aux lois et aux réglementations en matière de protection et de confidentialité des données », fait-on savoir.
« Nous avons été ouvert et transparent au sujet des données que nous collectons, stockons et traitons parce que la confiance de millions de frères et sœurs de la oumma placée chaque jour dans Muslim Pro signifie tout pour nous », signifient ses responsables, assurant au passage appliquer « des dispositions de sécurité et des mesures de protection conformes aux normes de l'industrie » et sélectionner « des partenaires technologiques de premier plan pour assurer la sécurité de (ses) données sur (son) infrastructure cloud ».
Comme tant d'autres applications, Muslim Pro reconnaît qu'elle partage des données de ses utilisateurs avec différentes structures mais elles sont « anonymisées ». « Dans nos efforts pour mieux servir nos utilisateurs et aider les entreprises à améliorer leurs offres de produits et de services, nous avons partagé des données anonymisées avec des partenaires technologiques que nous sélectionnons et qui sont tenus de se conformer aux lois et aux réglementations en matière de protection et de confidentialité des données », fait-on savoir.
La rupture annoncée avec X-Mode
Depuis les révélations faites par Motherboard, Muslim Pro assure avoir lancé « une enquête interne ». Par ailleurs, « (nous) révisons notre politique de gouvernance des données pour confirmer que toutes les données des utilisateurs ont été traités conformément aux exigences existantes. Quoiqu'il en soit, nous avons décidé de mettre fin à nos relations avec tous les partenaires de données, y compris X-Mode, avec effet immédiat », informe Muslim Pro, qui s'excuse auprès de ses utilisateurs « pour l'inquiétude que ces rapports leur ont causé ».
Dans l'attente de l'ouverture d'une enquête au Congrès, le CAIR a incité tous les Américains de confession musulmane à cesser d'utiliser les applications épinglées par Motherboard « jusqu'à ce que les entreprises mettent fin à l'utilisation de leurs données par les agences gouvernementales ». Une incitation qui est entendue au-delà des frontières américaines, jusqu'en France où des appels à désinstaller Muslim Pro ont d'ores et déjà été observés par Saphirnews sur les réseaux sociaux.
Mise à jour mardi 12 janvier : Après Muslim Pro, une autre appli populaire de prières islamiques a été exposée, ce qu'il faut savoir sur cette nouvelle affaire.
Lire aussi :
Aux Etats-Unis, un nombre record de candidats musulmans élus, la diversité au rendez-vous
Etats-Unis : des détenus musulmans forcés à manger du porc, du halal avarié ou à mourir de faim
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