Religions

Aïd el-Kébir 2010 : Claude Bartolone prête un terrain départemental du 9-3 pour l'abattage rituel

Des abattoirs mobiles au Parc de la Courneuve (Seine-Saint-Denis)

Rédigé par | Vendredi 28 Mai 2010 à 04:12

Bonne nouvelle pour les musulmans de Seine-Saint-Denis (93). La convention portant sur la mise à disposition, pour une durée de cinq ans, d’un terrain départemental de 25 hectares pour l’organisation de l’Aïd el-Kébir a été signée, jeudi 27 mai, entre le Conseil général du département, et le Conseil régional du culte musulman (CRCM) Île-de-France. Un, voire plusieurs, abattoirs mobiles pourront s’y installer pendant trois jours. Mais le plus dur reste à venir.



La signature de la convention entre Lhaj Thami Breze (à g.), président du CRCM Ile-de-France, et Claude Bartolone (au centre), président du Conseil général du 93, en présence notamment de son vice-président Stéphane Roussel (à dr.).
L’Aïd al-Adha 2010/1431 (ou Aïd el-Kébir), l’une des fêtes musulmanes les plus importantes, se déroulera cette année vers le 15 novembre, deux mois environ après la fin du mois du Ramadan. Bien que l’on connaisse la date approximative de cette fête, la pratique de l’abattage rituel se heurte chaque année en France à la quasi-inexistence d’infrastructure d’abattages.

La Seine-Saint-Denis (93) ne fait pas exception à la règle, et ce malgré la présence importante de musulmans dans ce département (450 000 selon certaines estimations). Les possibilités de pratiquer dignement ce rituel selon les règles d’hygiène et sanitaires en vigueur se révèlent minces. Pour satisfaire ce besoin, le conseil général mettra à disposition, chaque année et pendant cinq ans, du Conseil régional du culte musulman (CRCM) Ile-de-France le terrain départemental de l’Aire des Vents, au parc de La Courneuve, afin que puissent s’y monter des unités d’abattoirs mobiles lors de la fête du sacrifice qui dure trois jours.

Un terrain gratuit pour cinq ans

Pour preuve de cet engagement, une convention a été signée, jeudi 27 mai à Bobigny, entre Claude Bartolone, président du conseil général, et Lhaj Thami Breze, président du Conseil régional du culte musulman (CRCM) Ile-de-France en présence de quelques associations musulmanes du département.

« Parce que la République laïque n’est, par définition, la fille aînée d’aucun culte, il est temps que nous parlions de la deuxième religion de notre pays autrement que par des sujets brûlants », déclare M. Bartolone, qui appelle à « promouvoir au niveau local des expériences gagnantes » permettant l’intégration du culte musulman dans le strict respect de la loi de 1905.

« L’islam mérite toute sa place dans notre pays » car il est « devenu, au fil des décennies, partie intégrante de la mosaïque culturelle qui compose la France. Oui, l’islam fait partie de notre identité », ajoute-t-il pour justifier sa décision.

Le terrain de 25 hectares, là où même se déroule chaque année la Fête de l’Humanité, est mise à disposition du CRCM à titre gracieux, ce qui est « tout à fait compatible avec la loi de 1905 », s'accordent-ils tous à dire. « Parce que c’est un terrain départemental qui appartient au Conseil général, on a demandé à ses élus. Cela n’a pas posé problème puisque la proposition de M. Bartolone a été adoptée à l’unanimité », indique à Saphirnews Stéphane Troussel, vice-président du Conseil général et élu de La Courneuve en charge de ce dossier.

Trouver un opérateur, une tâche difficile

Cependant, rien n’est garanti pour l’Aïd el-Kébir 2010. Maintenant que le terrain est trouvé, reste à « convaincre des opérateurs financiers capables de monter un projet d’abattoirs mobiles », nous fait savoir M. Breze. Car un projet d’abattoir mobile avait failli aboutir en 2009.

L’Aire des Vents avait en effet été proposée par le Conseil général l'an dernier. Le CRCM, qui se charge de trouver des professionnels de l’abattage, en avait convaincu un… qui s’est désisté à la dernière minute de peur de perdre de l’argent. Cette fois, un accord sur cinq ans permettra d’obtenir la confiance de « celui qui décidera de participer à cette aventure » et qu’il puisse « trouver une rentabilité économique à cette opération », nous indique M. Bartolone.

L’immense terrain (la Fête de l’Huma a revendiqué la présence de 600 000 personnes en 2009) peut accueillir plusieurs abattoirs mobiles, quatre à cinq selon M. Breze. Cependant, pour l'Aïd al-Adha 2010, l’objectif est d’en trouver un. « Selon les services vétérinaires de la préfecture, un opérateur pourrait accueillir jusqu’à 700 moutons par jour, soit 2 100 en trois jours », affirme M. Troussel.

C’est bien loin de concerner l’ensemble des musulmans de la Seine-Saint-Denis. Cependant, « il ne s’agit que d’une solution » parmi d’autres puisque des partenariats entre associations musulmanes, grandes surfaces et municipalités doivent aussi être impulsés. Même symbolique, ce geste permet de « donner cette représentation positive de l’islam en France » et d'en faire un exemple pour d'autres départements si l'expérience réussit, nous précise M. Bartolone.

Une reconnaissance symbolique du culte musulman

« Cette signature constitue une marque de reconnaissance d'une réalité et de la dignité d'une partie importante de la population du département qui contribue à son dynamisme », déclare M. Breze, pour qui le partenariat entre les deux institutions vient « renforcer la signature du Guide de la bonne pratique entre les trois CRCM Île-de-France Centre, Est et Ouest sous l’égide du préfet de la Région, Daniel Canepa », en novembre dernier.

« Demander aux musulmans d’être discrets est une méconnaissance de la laïcité. La laïcité telle qu’elle est conçue par le Conseil d’Etat garantit l’expression publique d’une croyance. Cette expression publique ne veut pas dire prosélytisme », ajoute le président régional du CRCM. « De telles initiatives est la meilleure réponse à la campagne de dénigrement permanente (qui) représente l’islam et les musulmans comme un danger », conclut-il.




Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur