Société

Antisémitisme : l’indignation générale face au meurtre de Mireille Knoll et au CRIF

Rédigé par Benjamin Andria | Mercredi 28 Mars 2018 à 17:40



Le meurtre de Mireille Knoll, survenue vendredi 23 mars à Paris, indigne la France entière. Le corps mutilé de l’octogénaire a été retrouvé en partie carbonisé dans son appartement parisien. Deux hommes ont été mis en examen, mardi 27 mars, pour « homicide volontaire » à caractère antisémite et « vol aggravé ». Ils ont été placés en détention provisoire.

Si les enquêteurs restent encore prudents sur les motivations du crime, cette tragédie a rapidement soulevé un haut-le-cœur général à travers le pays, d’autant que l’histoire de Mireille Knoll renvoie à celle de l’Holocauste. Celle qui fut autrefois une fillette de 10 ans a en effet failli périr lors de la rafle du Vel d’Hiv’ en 1942. C’est un passeport brésilien dont elle a hérité de son père qui l’a sauvé de justesse. Après avoir trouvé refuge en zone libre puis au Portugal avec sa mère, elle est revenue à Paris après la guerre et y a épousé un homme rescapé du camp d’Auschwitz.


Le mobile du crime reste à éclaircir

La mort l’a brutalement rattrapé 75 ans après la rafle. La police privilégie la piste d’un crime crapuleux, les suspects étant accusés d’avoir profité de la faiblesse de la victime pour la voler. Elle vivait seule depuis le décès de son mari dans les années 2000 et était atteinte de la maladie Parkinson au point de devoir se déplacer en fauteuil roulant. Pour l’avocat de la famille de la victime Gilles-William Goldnadel, « il n’y avait absolument rien de valeur à voler » chez cette femme qualifiée d’« extrêmement modeste ».

L’un des suspects, un voisin résidant dans le même immeuble, était apparemment connu de Mireille Knoll qui « le connaissait très bien et le considérait comme un fils », selon Daniel Knoll. Son casier judiciaire est tout de même entaché par une affaire d’agression sexuelle sur la fille de l’ancienne aide à domicile de l’octogénaire, des faits pour lesquels il a été condamné. Le second suspect est un ami du premier, un SDF déjà arrêté pour vols avec violences. « Au départ, nous pensions que c'était vraiment que crapuleux, mais c'est le parquet qui a défini cela (le caractère antisémite du meurtre, ndlr) et nous avons fait confiance à la police et à la justice », a déclaré à France Info Daniel Knoll.

Un moment de communion nationale que le CRIF veut gâcher

Les enquêteurs devront donc déterminer avec justesse le rôle de chacun des suspects de même que les mobiles du crime. En attendant, et à l’appel de multiples organisations juives, une marche blanche est organisée ce mercredi 28 mars à 18h30 en hommage à l’octogénaire décédée, depuis la place de la Nation jusque devant l’immeuble où elle résidait dans le 11e arrondissement de la capitale, afin de dénoncer le racisme et l’antisémitisme.

Ce qui devrait être un moment de communion nationale a été entaché par la prise de position du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) et de son président Francis Khalifat. « Soyons clairs, ni Jean-Luc Mélenchon et les Insoumis ni Marine Le Pen et le FN seront les bienvenus » au rassemblement, a-t-il fait savoir, mettant ainsi dans le même sac deux mouvements politiques au passé et aux héritages bien différents.

Sa faute : se servir de l'affaire Knoll pour instrumentaliser la lutte contre l’antisémitisme à des fins politiques, les partis d’extrême gauche étant diabolisés de longue date par le CRIF qui, en fervent soutien à Israël, assimile régulièrement ceux qui critiquent de la politique israélienne à des vecteurs d’antisémitisme.

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Une telle position de la part du CRIF n’est pas nouvelle. Mais une fois n’est pas coutume, sa déclaration n’a pas manqué de provoquer un tollé dans la classe politique, Israël n’ayant rien à faire dans une affaire française qu’est celle de Mireille Knoll. « Chacun est libre de se rendre à une manifestation dans ce pays », a indiqué Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement. « Nous combattons les communautarismes, je ne crois pas que cette marche concerne uniquement la communauté juive ou concerne uniquement le CRIF », a affirmé, pour sa part, Rachida Dati. Jean-Luc Mélenchon, comme Marine Le Pen, ont fait savoir qu’ils seront présent à la marche blanche.

Face à la haine et au spectre de la division, l’unité comme remède

La meilleure réponse au CRIF est encore celle donnée par le fils de Mireille Knoll, qui a appelé l’ensemble des citoyens, dans leur diversité, à se joindre au rassemblement. « Le CRIF fait de la politique. Moi, j'ouvre mon cœur. A tout le monde, à tous ceux qui ont une mère. Tous les gens sont concernés », a-t-il déclaré sur RMC. Car oui, la lutte contre l'antisémitisme est une affaire qui nous concerne tous, au même titre que la lutte contre toutes les autres formes de racisme. Et se rendre à la marche, en tant que citoyens, est l'expression d'une solidarité envers, avant tout, la famille de la victime.

Pour la Grande Mosquée de Paris, « comment rester silencieux face à de tels actes. Le caractère antisémite avéré de ce meurtre est dénoncé et condamné par l’ensemble des musulmans de France. La longue et traditionnelle fraternité qui unit indéfectiblement nos deux communautés (juives et musulmanes) ne peut accepter une telle barbarie ».

« Face à la haine et au spectre de la division, notre réponse sera toujours la même : l’unité, la fraternité et la volonté d’agir au quotidien pour mieux vivre ensemble. Il est nécessaire que tous les acteurs de la lutte contre les racismes et l’antisémitisme se rassemblent, et continuent de sensibiliser et d’éduquer afin de créer toujours plus de liens dans la société », a fait savoir l'association Coexister, qui a appelé à participer à la marche blanche.

*Mise à jour : Plusieurs milliers de personnes dont de nombreuses personnalités politiques ont participé à la marche blanche parisienne, qui a été perturbé par des huées et des bousculades envers la délégation du FN mais aussi envers celle des Insoumis. Une cérémonie en mémoire de Mireille Knoll a, par la suite, été organisée par le Consistoire israélite dans une synagogue. Plusieurs marches blanches ont aussi été recensées à travers la France.

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