L'American civil liberty union (ACLU) a dévoilé des documents accablants pour l'armée américaine. Le 20 décembre dernier, la principale organisation de défense des libertés individuelles aux Etats-Unis, révèle de nouveaux cas de tortures et de maltraitance dans la base militaire de Guantanamo. Depuis plus de 3 ans, des hommes sont détenus sans jugement, à l’ombre du droit international et des conventions de Genève. Ils sont soupçonnés de ' terrorisme '. Diverses organisations des droits de l’homme dénoncent ces pratiques qui ont lieu dans la base américaine de cuba.
Un détenu laissé sur le sol, en position fœtale, pendant plus de 24 heures sans manger ni boire. Tel est l'un des exemples décrits par les témoignages produits par l'ACLU. Ces témoignages proviennent de messages électroniques envoyés par des agents du FBI, la police fédérale, à leur hiérarchie. Ils décrivent ce qu'ils ont vu et constaté à Guantanamo.
L’organisation a obtenu auprès d'un tribunal fédéral la divulgation de ces courriels, écrits en 2003 et 2004, en vertu de la loi sur la liberté de l'information.
Torturé pour avoir récité le Coran
Dans l'un des courriels, adressé en août au directeur du FBI, Robert Mueller, un agent de la police raconte avoir vu un détenu ' laissé dans une pièce non ventilée, à une température probablement bien supérieure à 35 degrés '. Il était ' quasiment inconscient sur le sol, un tas de cheveux à côté. Il s'était apparemment arraché sa propre chevelure durant la nuit ' témoigne l'agent, dont l'identité a été gommée.
Moazzam Begg, un détenu britannique qui devrait être libéré dans quelques semaines (après 3 ans d’incarcération), a été torturé pour avoir récité le Coran, alors qu’il lui était interdit de parler rapporte l'hebdomadaire britannique Observer. Moazzam Begg a expliqué à son avocat qu’il avait été torturé selon la méthode 'strappado', une méthode courante dans les dictatures d'Amérique latine. Selon le journal, les prisonniers sont suspendus par leurs menottes à une barre jusqu'à ce que leurs poignets soient entaillés par des coupures. Moazzam Begg aurait aussi subi des ' violences sexuelles ' qui ont eu ' des conséquences sur sa santé mentale ', ajoute l’avocat.
Parmi les méthodes d’interrogatoire autorisées à Guantanamo, figure le maintien dans des positions pénibles ou douloureuses, la mise à l’isolement, le fait d’encagouler les détenus, la privation sensorielle et l’usage de chiens. Des agents du FBI mentionnent également l’usage cruel et prolongé de chaînes ou d’entraves, la diffusion de musique à un volume sonore maximum et l’utilisation de lumières stroboscopiques.
Fin novembre, le New York times publiait un rapport confidentiel du comité international de la croix rouge (CIRC). Ce rapport dénonce ' un système intentionnellement cruel et de traitements dégradants '.
L’Administration Bush réagit mollement
Le 06 janvier 2005, l’Armée américaine a annoncé l’ouverture d’une enquête interne sur les allégations de torture. Amnesty International estime pour sa part ' qu’une nouvelle enquête interne ne suffit pas '. L’organisation réclame depuis mai 2004 une commission d’enquête indépendante ' habilitée à mener des investigations sur tous les aspects de la ' guerre au terrorisme ' déclarée par les Etats-Unis ', notamment sur les politiques et pratiques suivies en matière d’interrogatoire et de détention. ' Aucun organisme ne doit échapper au contrôle et personne ne doit être exempt de poursuites lorsque des preuves suffisantes existent ' ajoute l’organisation de défense des droits de l’Homme.
Plusieurs documents rendus publics témoignent que des agents du FBI envoyés à Guantanamo avaient signalé au gouvernement américain les mauvais traitements et sévices dès le début de l'installation du centre de détention. Une lettre écrite par un haut responsable du Département de la Justice, que l'Associated Press a pu se procurer, laisse entendre que le Pentagone n'a pas donné suite aux plaintes du FBI. Le gouvernement américain a toujours assuré que les détenus de Guantanamo étaient traités dans le respect des conventions de Genève.
En outre, le 13 janvier dernier, la Maison blanche a reconnu que l’Administration de G. Bush avait demandé au Congrès d’abandonner un projet de loi visant principalement à interdire aux agents américains l’usage de la torture et de traitements inhumains. Pour le Pentagone, ces nombreux actes de maltraitance restent considérés comme des cas ' isolés '. C’est ainsi que les tortures dans la prison d’Abou Ghraïb (Irak) avaient aussi été qualifiées par les autorités américaines.