Religions

Après les attentats de Barcelone, l’Espagne veut ficher tous ses imams

Rédigé par | Lundi 28 Aout 2017 à 18:30

Les autorités espagnoles sont pointées du doigt pour le manque de clairvoyance de leurs services de renseignement concernant les attaques de Barcelone et de Cambrils. Parmi les nouvelles mesures envisagées, figure celle d'un fichage des imams et prédicateurs musulmans par l'intermédiaire la Commission islamique d'Espagne, organe représentatif des communautés musulmanes espagnoles.



Le Centre culturel islamique de Madrid.
L’Espagne est encore sous le choc des attentats de Barcelone et Cambrils qui ont coûté la vie à 16 personnes. Depuis, les débats font rage pour déterminer les causes de ce drame et les ratés des services de renseignements.

Le cas de l’imam de Ripoll, Abdelbaki Es-Satty, est au centre de la controverse. Considéré comme le cerveau des attentats, le Marocain, âgé d’une quarantaine d’années, aurait endoctriné des jeunes afin de commettre leurs actes meurtriers.

Incarcéré en 2010 pour trafic de drogues après avoir transporté 12 kilos de haschich entre Ceuta et Algesiras, il a passé quatre ans en prison et aurait noué des contacts avec Mohamed Mrabet, l’un des auteurs des attentats de Madrid le 11 mars 2004. Il s’installe à Ripoll en 2015 mais, entre janvier et mars 2016, Abdelbaki Es-Satty part exercer la fonction d’imam à Vilvoorde en Belgique, avant d’être dénoncé pour ses positions par la communauté musulmane locale. De retour en Espagne, il aurait fomenté les actes terroristes d’août 2017.

Une liste promise d'ici la fin de l'année

La question de la surveillance des mosquées et de leurs prédicateurs pose problème. En vertu de la liberté de culte, le gouvernement espagnol ne peut pas avoir de contrôle sur le recrutement des imams et le contenu des prêches dans les mosquées. C’est pourquoi les autorités misent en partie leurs espoirs sur le rôle que pourrait jouer la Commission islamique d'Espagne (CIE), un organisme qui représente près de 1 200 associations et collectifs musulmans en Espagne. Depuis 1992, la CIE est l’interlocuteur privilégié entre l’Etat espagnol et diverses fédérations musulmanes. La CIE travaille aujourd’hui sur l’élaboration d’un recensement de tous les imams qui officient dans des mosquées et autres salles de prières du pays.

La même réflexion et le même processus sont actuellement en cours en Belgique où l’Exécutif des musulmans de Belgique pourrait concevoir une liste des imams à la demande du gouvernement belge.

Néanmoins, en Espagne comme au plat pays, la grande méfiance des communautés musulmanes envers les structures proches du pouvoir génère d'ores et déjà des critiques sur une initiative signant le début d'une ingérence du gouvernement sur les affaires religieuses. « Les propres membres de la communauté sont en quête de sécurité pour eux et leurs mosquées », balaie la CIE dans un communiqué. Elle précise qu’elle envisage d’obtenir la liste « d'ici la fin de l’année ». L’organisme, qui voudrait s'assurer de la formation des prédicateurs et de leur capacité à prêcher, explique que, parmi les imams, « beaucoup de gens exercent bénévolement et ne sont pas comptabilisés comme tels » et ceci particulièrement dans « les petites communautés » qui n’ont pas les moyens d’embaucher une personne.

Le manque d'imams qualifiés relevé

Depuis l’établissement d’une politique facilitant les regroupements familiaux en 2004, la population de confession musulmane a sensiblement augmenté en Espagne. Mohamed Iqbal, responsable associatif, explique au journal El Pais que les communautés musulmanes souffrent d’un manque de moyens et que, par ailleurs, les bons imams ne sont pas assez nombreux. « Si vous avez cinq candidats, vous pouvez choisir le meilleur. Si vous en avez qu’un… », ajoute-t-il, précisant qu’il s’agit d’un problème qui concerne « toute l’Europe, pas seulement l’Espagne ».

Selon le quotidien El Mundo, la CIE serait sur le point de conclure un accord avec l’université de Saragosse pour créer un diplôme pour la formation d’imams et de professeurs de théologie islamique. Le programme devrait accueillir 30 à 35 étudiants à partir de la rentrée 2018.

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