Points de vue

Avec l'exposition hommage aux soldats musulmans, « ce sont nos racines communes qui sont mises en valeur »

Rédigé par Geneviève Darrieussecq | Vendredi 11 Janvier 2019 à 17:30

L'aumônerie musulmane aux armées a inauguré, lundi 10 janvier à la Grande Mosquée de Paris, une exposition retraçant deux siècles d'engagement des soldats musulmans dans l'histoire militaire française. Une inauguration faite en présence de Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’Etat auprès de la ministre des Armées. Voici son discours reproduit dans sa quasi intégralité sur Saphirnews.



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C’est un fait bien connu, l’armée française est un des piliers de la République. Son histoire de l’armée française épouse celle de notre nation. Dans ce creuset national, toute la diversité et la richesse de la France s’y retrouve et s’y fond. Nous en sommes fiers ! Dans cette histoire, les soldats musulmans occupent une place éminente.

Mamelouks de la Garde impériale, spahis de la Grande Guerre, tirailleurs et goumiers de la Seconde Guerre mondiale, harkis de la Guerre d’Algérie : en deux siècles, ce sont des milliers de soldats de religion et de culture musulmane qui ont servi les armes de la France et qui ont porté ses couleurs avec bravoure. Et pourtant, tous n’avaient pas la nationalité française.

Ce sont aussi des milliers d’entre eux qui y ont laissé la vie. Nombre de stèles, portant les symboles de l’islam, peuplent nos nécropoles militaires. Plus de 600 à Verdun comme à Notre-Dame-de-Lorette, 1 300 à Rougemont ou encore 2 000 à Suippes dans la Marne. Dans ces carrés musulmans reposent des soldats qui ont combattu pour la France et qui ont fait le sacrifice de leur vie. La France le sait et s’en souvient.

Il y a quelques semaines, en Corse, j’ai d’ailleurs eu l’honneur de rencontrer les derniers Goumiers ayant participé à la libération de l’Ile de Beauté en 1943. Nous nous sommes recueillis sur les tombes de leurs camarades tombés au col de Teghime. Sans eux, rien n’aurait été possible. Leur souvenir est ancré dans la terre de Corse, leur mémoire est gravée dans la pierre. Nous n’oublions pas.

Ce sont nos racines communes qui sont mises en valeur

Ce sont à ces hommes et à ces femmes, à ces soldats musulmans qui ont combattu sous l’étendard tricolore, qu’est consacrée cette exposition. Avant qu’elle ne débute son itinérance dans notre territoire, c’est un beau symbole de l’inaugurer, ici, à la Grande Mosquée de Paris. Docteur Boubakeur, merci de nous y accueillir.

A travers des photographies, des films, des images et des objets, c’est bien l’humain qui est au cœur. Grâce à ces tranches de vie, c’est la diversité de nos armées, c’est la notion d’engagement et ce sont nos racines communes qui sont mises en valeur. Je vous en remercie. Je salue particulièrement l’Aumônerie musulmane aux armées et son aumônier en chef. Vous contribuez à un travail de transmission de la mémoire et plus encore à un travail d’éducation. (...)

Ils ne sont pas des militaires musulmans ou des musulmans militaires, mais ils sont militaires et musulmans

Mesdames et messieurs, cette exposition pédagogique a vocation à être itinérante. Je dois dire que je suis particulièrement attachée et sensible à cette idée. (...) Nos lycées militaires ainsi que des lycées en REP+ pourront en bénéficier. Je salue et encourage cette initiative. Les quelques centaines d’élèves ainsi concernés découvriront un autre visage de l’armée française et une facette méconnue de l’histoire de leur pays. Cette transmission est un élément d’appropriation d’une identité commune et, je l’espère, un gage supplémentaire de cohésion nationale.

Depuis deux siècles, des soldats musulmans ne cessent de pourvoir les rangs de l’armée française. Aujourd’hui, ils sont Français et continuent de servir notre drapeau avec courage et détermination. Ils ne sont pas des militaires musulmans ou des musulmans militaires, mais ils sont militaires et musulmans. Engagés en opex ou dans l’opération sentinelle, comme leurs frères d’armes, ils sont au service de la France. Ils portent fièrement leur uniforme et risquent leur vie.

Contrairement à d’autres époques, aujourd’hui, l’engagement de nos jeunes n’est plus une obligation civique. Il est véritablement un choix. Il peut être patriotique ou encore professionnel mais c’est toujours un engagement volontaire à part entière.

Les jeunes français, qui pratiquent l’islam ou qui sont de culture musulmane, démontrent par leur engagement un attachement profond à la patrie et une haute considération du service à la nation. C’est une démonstration supplémentaire d’une confession musulmane intégrée dans le pays.

Permettre à nos soldats de vivre leur foi

Le militaire qui sert son pays doit pouvoir pratiquer sa religion là où sa mission et le service l’appellent. Cette liberté religieuse est le principe fondamental de l’aumônerie militaire. Vous soutenez spirituellement le soldat qui le souhaite et vous lui permettez d’accomplir son devoir. Car ne l’oublions pas, la mission prime toujours !

Ainsi, depuis 13 ans, le service de l’aumônerie musulmane permet à nos soldats de vivre leur foi et, pour ceux qui le souhaitent d’en respecter les obligations. Evidemment, dans la limite de la bonne exécution du service, dans le respect des lois de la République et dans le respect de la loi de 1905. Au sein de l’armée française, la neutralité comme la laïcité sont des principes naturels, car c’est une garantie de notre vivre ensemble et surtout de notre bien vivre ensemble.

L’aumônier est à la disposition du militaire ou du civil, il est à l’écoute et suscite la confiance. Ces hommes et ces femmes sont des vecteurs essentiels pour nous faire remonter des éléments sur le moral des forces et les difficultés ressenties en complément des personnels médicaux et sociaux. Chers amis, l’aumônerie musulmane se montre à la hauteur de sa mission et répond aux attentes placées en elle. Cette exposition en est un brillant témoignage. Je crois que nous pouvons être collectivement fiers du travail accompli. Je souhaite à cette exposition le succès public qu’elle mérite. Et notamment auprès de la jeunesse.

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