Le Forum Européen des Femmes Musulmanes (EFOMW : European Forum Of Muslim Women).
Quatorze associations féminines musulmanes ont créé le Forum Européen des Femmes Musulmanes, au début de l'année 2006. De la Suède à l’Italie en passant par la Roumanie, la Bosnie-Herzégovine, la Grande Bretagne, l’Irlande ainsi que le Danemark : quatorze pays sont ainsi représentés.
Le samedi 4 mars, les porte-parole de ces associations ont élus les sept membres du conseil d’administration qui siègera à Bruxelles. Son but : favoriser l’engagement citoyen de la femme musulmane au sein de l’Union Européenne, mais aussi représenter ces femmes et défendre leurs intérêts auprès des instances européennes et internationales. Un véritable défi!
C’est à l’Institut de Sociologie de l’Université Libre de Bruxelles, ce dimanche 5 mars, que l’ EFOMW a ouvert son 1er Congrès Européen. L’ouverture officielle a été menée par la française Malika Dif (conférencière et auteur de nombreux ouvrages), Noura Jaballah (présidente élue de l’EFOMW) ainsi que Lhaj Thami Breze, président de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF).
Cette journée s’est organisée autour de trois « tables rondes », durant lesquelles différentes intervenantes ont abordé des sujets tels que les enjeux islamiques, sociaux et politiques de la participation de la femme musulmane dans la vie sociale, les obstacles rencontrés et quelques témoignages de ces « femmes qui inventent l’Europe ».
Les interventions ont monté que la femme musulmane n’est plus silencieuse et soumise, « elle a son mot à dire ». Plus encore, elle a un devoir d’action. Ainsi, Soumaya Ben Khaldoun, parlementaire marocaine, insiste sur la notion que l’être humain a pour mission de contribuer au développement de l’Humanité. Elle met l’accent sur l’équité et explique que l’apport de chacun est distinct mais son importance est égale dans la construction de la société. L’homme et la femme sont égaux pour bâtir et développer la civilisation. La femme musulmane a donc une véritable responsabilité d’engagement citoyen.
Musulmane et citoyenne d’Europe.
Soumaya Ben Khaldoun, Parlementaire marocaine
La citoyenneté se manifeste, entre autre, par la possession du passeport qui octroie une liberté de mouvements, par le droit de vote qui permet la participation à la vie politique du pays et par la possibilité de s’organiser en association afin de dynamiser le développement social. Cette citoyenneté doit être mise à profit par les femmes musulmanes explique Lamia Elamri, conseillère municipale à Stockholm. Elle souligne la nécessité d’améliorer la présence de ces femmes dans la vie politique des pays européens, et ainsi permettre l’accroissement d’une influence sur la société : « Il faut démontrer que les musulmanes ont la capacité de contribuer à ce changement. Nous sommes des êtres sociaux, nous devons participer à la dynamique de la société. »
Les femmes sont au premier plan d’une avancée historique pour l’intégration et l’acceptation du fait musulman en Europe. Pour la vice-présidente du Forum, Dorsaf Ben Diab, cette journée est une fête de l’engagement. Cet engagement ne peut avoir lieu sans la persévérance, la générosité, la pédagogie et surtout l’ouverture et la découverte de l’ « Autre ». Cet « Autre » qui est différent et qui suscite en nous la crainte et la peur ; le préjugé doit être rompu des deux côtés ; les femmes musulmanes doivent montrer l’exemple et ouvrir le dialogue.
Noura Jaballah, présidente élue de l’EFOMW, insiste sur la volonté de rapprochement entre les cultures, les religions et les nations, pour construire ensemble une Europe de paix et de connaissance des uns et des autres. L’attention est portée sur l’écoute de l’autre et le partage, au delà de la communauté musulmane, avec tous les peuples d’Europe.
Les sept membres élus du conseil d'administration
Cette initiative n’a pas eu l’écho escompté particulièrement auprès des non musulmans. « Nous voulons vraiment décommunautariser ce type d’actions, ouvrir un véritable dialogue. Mais ni la presse occidentale, ni les associations non musulmanes que nous avons contactées n’ont répondu à nos invitations. Cependant Al Jazeera, ainsi qu’Al Arabia, un journaliste iranien, un saoudien et une chaîne égyptienne se sont déplacés pour l’évènement. Il n’y a qu’un journaliste de RTBF qui est passé. (ndlr : Radio et Télévision Belge Francophone)» Explique Nicole Amal Thill, présidente de l’association belge Al Ma’rifa et coordinatrice du congrès. « Pourtant nous avons envoyé des communiqués de presse à tous les grands journaux européens, ainsi qu’aux chaînes de télévision. »
L’initiative est pourtant de taille et concerne la société dans son ensemble. « Les sociétés occidentales s’ouvrent à certaines minorités qu’elles considèrent comme un avancement. Mais cette ouverture est limitée ; l’Islam et la religion sont perçus comme une régression. Leur peur de l’islam fait resurgir un passé ou le spectre du religieux est mis en avant.» indique Nadine Weibel sociologue et ethnologue, chercheur au CNRS, (Auteur de « au-delà du voile, les femmes musulmanes d’Europe »). « Cependant, i[continue-t-elle, le problème majeur reste la méconnaissance de l’autre. Il est fondamental d’aller vers l’autre. Il faut s’accepter dans nos différences. C’est ahurissant, mais nous vivons côte à côte sans se connaître. L’information doit circuler pour désamorcer la situation ». ]i
L’initiative est pourtant de taille et concerne la société dans son ensemble. « Les sociétés occidentales s’ouvrent à certaines minorités qu’elles considèrent comme un avancement. Mais cette ouverture est limitée ; l’Islam et la religion sont perçus comme une régression. Leur peur de l’islam fait resurgir un passé ou le spectre du religieux est mis en avant.» indique Nadine Weibel sociologue et ethnologue, chercheur au CNRS, (Auteur de « au-delà du voile, les femmes musulmanes d’Europe »). « Cependant, i[continue-t-elle, le problème majeur reste la méconnaissance de l’autre. Il est fondamental d’aller vers l’autre. Il faut s’accepter dans nos différences. C’est ahurissant, mais nous vivons côte à côte sans se connaître. L’information doit circuler pour désamorcer la situation ». ]i
Ni libertine, ni soumise
Porte-parole des associations européennes
Un nouveau « genre » de femme se développe en Europe. C’est le constat de Nadine Weibel, qui étudie depuis de nombreuses années les femmes musulmanes pratiquantes en Europe: « Les femmes musulmanes inventent un nouveau modèle à mi chemin entre le modèle traditionnel et celui proposé par l’Occident. C’est totalement novateur. Dans ce sens, elles s’inscrivent dans une forme de modernité.»
Cette journée souligne une volonté des musulmanes européennes d’agir et de participer activement à la construction d’une Europe plus juste et plus humaine; une Europe multiculturelle ou le dialogue est possible et essentiel. Leur résolution : casser l’image archaïque de la femme musulmane, démontrer son importance, son action et son engagement. Musulmanes certes, mais citoyennes et engagées. L’Europe ne se construira pas sans elles, c’est leur mot d’ordre ! Reste à espérer que les actions à venir soient à la hauteur des intentions exprimées durant cette première rencontre historique.