Politique

Burqa : Besson passe à la vitesse supérieure

Parlons chiffon en politique

Rédigé par Leïla Belghiti | Mercredi 3 Février 2010 à 17:59

Le ministre de l'Immigration Eric Besson veut aller vite. À peine sorti du fameux débat sur le voile intégral, Eric Besson a pris une première mesure, mardi, en refusant la nationalité française à un étranger qui imposerait le voile intégral à sa femme.



Dans un communiqué, le ministre de l'Immigration affirme avoir « contresigné et transmis au Premier ministre un projet de décret refusant l’acquisition de la nationalité française par un ressortissant étranger marié à une Française, il est apparu, lors de l’enquête réglementaire et de l’entretien préalable, que cette personne imposait à son épouse le port du voile intégral, la privait de la liberté d’aller et venir à visage découvert et rejetait les principes de laïcité et d’égalité entre homme et femme ».

L'affaire tombe à pic (sic), pour donner un bon coup d'accélérateur à l'indice de popularité du ministre -selon un sondage publié le 1er février, seuls 22,2 % des Français ont trouvé le débat sur l’identité nationale « constructif », à quelques semaines des élections régionales.

Un décret en attendant la loi

Il avait prévenu ! Lors de son audition parlementaire, le 16 décembre dernier, Eric Besson avait déclaré qu'il n'attendrait pas une loi pour appliquer cette interdiction du voile intégral : « Dans le cadre des activités du ministère dont j’ai la charge (…), j’ai demandé que le port du voile intégral soit systématiquement considéré comme preuve d’une intégration insuffisante à la société française, faisant obstacle à l’accession à la nationalité. » Ce qui fut dit fut fait.

Le Conseil d'État a émis un « avis favorable » au projet de décret de M. Besson, qui pourra sans doute faire jurisprudence. Le Conseil d'État avait déjà rendu un arrêt en juin 2008, confirmant le refus d'octroyer la nationalité française à une Marocaine intégralement voilée. Nul besoin de loi donc ? Que nenni ! Eric Besson souhaite au minimum une résolution parlementaire, accompagnée d'un dispositif législatif pour interdire le port du voile intégral dans l'espace public, alors que la majorité UMP se positionne derrière Jean-François Copé en faveur d'une loi.

Débat schizophrène

Un souhait que ne partage pas Martine Aubry, la numéro un du PS. Bien qu'avouant qu'en tant que femme elle hésitait entre avoir de la « colère » ou de la « pitié » envers ces femmes voilées des pieds à la tête, sur France 5, elle qualifie ce débat d'« ignoble », qui cherche à trouver des « boucs émissaires » en voulant adopter une « loi de circonstance qui stigmatiserait », alors que i[« notre jurisprudence permet d'empêcher » le voile intégral.

Selon un sondage, 53 % estiment que ce débat est « une démarche électoraliste ». Les comédiens aussi s'y mettent : Jamel Debbouze avait qualifié la semaine dernière le débat de « schizophrénique », Rayhana – la comédienne et auteure agressée en plein Paris à cause d'une pièce sur la condition des femmes musulmanes – a jugé « ridicule » l'idée d'une loi, désapprouvant même l'existence d'un ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale.

Une femme « foulardée » sur une liste du NPA

Empêtré dans un débat qu'il ne maîtrise plus, Eric Besson tente de sauver sa rhétorique, en invitant ce mercredi les représentants des cultes pour une présentation de la synthèse des 350 débats locaux organisés sur tout le territoire français.

Un séminaire gouvernemental se tiendra le 8 février, remplaçant le colloque prévu le 4 février. « Nous allons donc maintenant en tirer les conclusions, nous allons examiner l'ensemble des propositions qui ont été faites tout au long de ce débat et puis on va sélectionner celles qui méritent d'être mises en oeuvre et qui justifient des décisions », a annoncé le Premier ministre sur Europe 1. Pendant ce temps, dans le Vaucluse, le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste) de Besancenot présente sans complexes une jeune candidate musulmane voilée (d'un simple foulard).

Les chiens aboient, la caravane passe.