« Nous, SCP Daniel Debes et Jean-Noel Caneri, à la requête de Mourad Zerfaoui, Abdelatif Taef, Moustapha Dali, et Azzedine Aïnouche, avons assigné» tous les membres du bureau du nouveau CRCM-PACA, élu le 4 juillet dernier : « en vertu d’une ordonnance sur pied de requête, en date du 18 juillet, autorisant les requérants à assigner en référé, d’heure en heure… ». Les rares élus visés par cette procédure, et encore présents sur leur lieu d’élection, n’en reviennent pas : c’est une sonnerie d’huissier de justice ainsi mandaté qui vient tirer leurs épouses d’un répit estival à peine entamé.
« Huissier chez les « Muhsanates »
Ce mercredi 20 juillet à 10 heures, c’était autour de Mohamed Moussaoui, secrétaire général du CRCM et dirigeant de
Cependant les termes de l’assignation restent clairs, et indiquent que le bureau au complet devra « comparaître et se trouver le lundi 25 juillet 2005, à 9heures, par devant monsieur le président du TGI de Marseille ». Cette juridiction ayant été sollicitée pour « dire que l’élection des requis aux différentes fonctions du bureau du CRCM n’a pu avoir valablement lieu », « faire interdiction aux requis de se prévaloir de qualités de président, vice-président, trésorier[…] et d’agir ou de prendre une quelconque décision à ce titre ». En outre, les plaignants ont demandé au tribunal d’ « ordonner la publication, aux frais des requis, dans le journal
« Manœuvres de perdant »
Toutefois, ce recours en justice n’est pas en soi une véritable surprise. Il a été plus qu’annoncé et ses raisons ont déjà été évoquées dans un entretien accordé à Saphirnet par Mourad Zerfaoui. Avec ses colistiers, ce dernier ne fait que reprendre, sous une forme moins « musulmane », les griefs déjà signalés, à savoir, l’irrégularité de certains votes et associations électrices. Alors, cette lecture du scrutin n’avait pas convaincu ses concurrents : « Le président du CRCM sortant a validé un Conseil régional des élections( CORELEC). Sans aucune réunion préalable. Et c’est ce conseil qui a établi la liste des délégués votants. Pourtant, le corelec n’est, à aucun moment, remis en cause dans cette assignation alors que c’est lui qui a établi et organisé les élections». Devant ce constat, le secrétaire général du CRCM-PACA se demande surtout « si les plaignants ne visent pas l’annulation pure et simple des élections du 19 juin » : « les délégués électeurs se sont déplacés de loin et à leurs frais. Ils n’apprécieront pas qu’une telle initiative vienne des personnalités responsables de la bonne tenue du scrutin. D’autant plus que le vainqueur du scrutin, Mourad Zerfaoui lui-même, leur avait déjà écrit pour les féliciter de leur large participation ».
Du côté de la mosquée de Paris, donc de la communauté algérienne dont sont issus Mourad Zerfaoui et la majorité des plaignants, c’est l’indignation qui l’emporte : « ils se sont adressés à tous les délégués pour les remercier, et maintenant ils veulent leur dire que ces élections sont viciées. C’est vraiment dommage pour Mourad Zerfaoui : si jeune et déjà si attaché à son Koursi (fauteuil). Et puis, le CRCM n’est pas une association comme les autres, et cette pratique procédurière ne sied pas à des responsables cultuels : imaginez l’envoi d’un huissier, ce n’est pas rien entre musulmans ! »s’émeut Maître Chemseddine Hafiz. Et l’avocat de
Grave dérapage
Concernant les élections du 4 juillet, le président en intérim du CRCM considère que les plaignants « ne peuvent pas arguer du fait qu’ils n’ont pas été informés de la date de cette réunion. Parce que le dernier délai était fixé au 3 juillet. Les têtes de liste avaient demandé au président sortant, par e-mail, d’y procéder avant cette date admise sur le plan national, car la voie postale, normale et ordinaire, n’était pas opératoire pour raison de délais raccourcis. Sa réponse était que les élections ne pouvaient pas se tenir avant que son recours ne soit examiné par le bureau du CFCM ». Selon lui, Mourad Zerfaoui « a manifesté dès le départ une volonté de ne pas prendre part à cette élection. D’ailleurs, il en a été informé par téléphone, fax et même par voix de presse ».
Pour l’heure, sans délai suffisant pour le choix d’un avocat et en l’absence de cinq membres du bureau assigné, les requis encore présents se demandent surtout « à quel titre, les plaignants les ont-ils assignés, et avec quels moyens et comment faire face à un tel procès ». Du côté des indépendants, un colistier de la liste indépendante laisse entendre que « cette démarche n’a pas fait l’objet d’une consultation collective préalable dans son camp ». Pourtant l’annulation du scrutin du 19 juin, c’est de facto l’annulation de son issue, c’est à dire la victoire de la liste indépendante. Une circonstance supplémentaire qui donne les allures de grave dérapage à une initiative inhabituelle entre élus du culte musulman. Tout aussi inhabituelles demeurent la sécheresse et la diligence de la procédure choisie : « billati hiya ahsanou », « de la meilleure des façons », enjoint le Coran.