La guerre que se livrent la presse privée et le Président de la République s'intensifie. Après avoir longtemps répondu par le mépris aux critiques et aux insultes, le chef de l'Etat a choisi de répliquer. Dans ses meetings, il qualifie à présent les journalistes de 'mercenaires de la plume' et de 'terroristes'. Tandis que la campagne pour l'élection présidentielle du 8 avril en Algérie se poursuit dans un climat de tension.
Une campagne plus qu’agitée
Pas un jour sans saccage ou incendie de permanence, agression de militants ou perturbation de meetings. Ali Benflis, ancien chef du gouvernement et rival du président Bouteflika, semble être la principale victime de ces violences même si les six candidats en lice se plaignent tous de dérapages.
Selon la presse ce sont de jeunes casseurs, brandissant des portraits du Président de la République, qui bloquent ainsi le cortège du secrétaire général du FLN (Front de libération nationale, l'ancien parti unique) ou font irruption dans la salle de réunion et provoquent une bagarre. Fauteuils arrachés, banderoles piétinées, spectateurs molestés.
La presse qui fait quotidiennement l'inventaire des incidents et ajoute souvent de l'huile sur le feu. Ali Benflis accuse les autorités locales et le ministère de l'intérieur de 'complicité', la police n'intervenant pas pour mettre fin à ces 'agressions'.
La situation actuelle provoque des craintes pour le soir du 8 avril (ou du 22 avril s'il y a un second tour.) La rivalité personnelle entre Abdelaziz Bouteflika et Ali Benflis est si vive qu’elle risque de faire naître des conséquences en cas de défaite de l’un des camps.
De son côté l'entourage de M. Bouteflika affirme que le candidat rival incite à l'émeute, depuis qu'Ali Benflis a déclaré qu'en cas de fraude, le peuple se défendra et descendra dans la rue, les proches du chef de l’état parlent de 'manipulation' et affirment que les partisans d'Abdelaziz Bouteflika 'sont les premiers à subir des violences physiques et verbales'. Les proches du président-candidat se plaignent surtout des 'dérapages verbaux' attribués au secrétaire général du FLN ou à son entourage.
Visite en Kabylie du Président sous tension
L'accueil réservé au président Abdelaziz Bouteflika par la capitale de la Petite Kabylie, lundi matin 29 mars, a été distant, lointain, presque froid. Les Kabyles entendaient rappeler au Président-candidat qu'entre lui et eux existe un passif douloureux : les 120 morts et les milliers de blessés du 'printemps noir' de 2001.
Pour son meeting électoral à Tizi-Ouzou, la Kabylie était quadrillée par un impressionnant dispositif policier. Le mouvement contestataire des Arouch et le FFS (Front des forces socialistes), bien implantés dans la région, appellent à boycotter. La ville Bejaïa avec ses « quelques » 100 000 habitants était pour le candidat Bouteflika une étape incontournable.
En moins d'une demi-heure, la visite était réglée, sans incident. La salle omnisports de 2 000 à 3 000 places, où le Président a tenu son meeting, n'était qu'aux trois quarts remplie.
Cette visite a même été vécue, par de nombreux Kabyles, comme une nouvelle provocation. Les commerces ont baissé leurs rideaux. A 10H, alors que le Président entamait son discours à la Maisons de la Culture Mouloud Mammeri transformée en bunker, la ville s'embrase brusquement. Au cri de 'pouvoir assassin' et 'Ulac smah ulac (Non à l'impuinité)', des centaines de jeunes dressent des barricades en brûlant des pneus.