Cette conférence était attendue. Elle se tint dans la salle Scandinavie. Tout un symbole. Mais simplement « un pur hasard » précise M. Ramadan quand la question lui est posée. Il est vrai que ce « hasard » n'a pas échappé à l'assistance. Il en a même fait sourire plus d'un. Mais dans la salle, l'ambiance était plutôt à l'écoute comme si chacun attendait que la conférence l'apaise des tensions dues aux récents événements.
La diversité est une volonté divine
Madame Rhamri Khadija, commerçante à Chatou (78) et mère de trois enfants, nous confie qu'elle est rassurée d'être là pour suivre un sujet particulièrement intéressant au milieu d'un public de filles voilées et non voilées, de musulmans et non musulmans, jeunes et adultes…Marjorie est étudiante à Paris. Elle est athée mais elle se sent concernée par le discours du conférencier. Elle explique qu'elle n'est pas venue dans une optique religieuse mais dans le but de comprendre.
D'entrée, M. Ramadan souligne l'importance que les musulmans accordent au principe de liberté d'expression. Il rappelle que ce dernier ne saurait se soustraire au respect fondamental des religions. Il poursuit en soulèvant quelques questions : « comment vivre avec autrui, celui qui ne me ressemble pas, dans nos sociétés contemporaines ? Comment faire face au pluralisme et à la diversité dans le contexte actuel qui est celui de la globalisation ? »
C'est à la lumière du Coran et de "la Sunna" du Prophète que des réponses sont apportées. En effet, l'islam considère que le pluralisme est une volonté divine. Car, si Dieu avait voulu, tous les hommes se ressembleraient. L'humanité doit donc gérer cette diversité car l'humanité n'est pas destinée à l'uniformité.
Si le musulman doit gérer les tensions qui sont dans son cœur, s'il doit harmoniser ce qu'il a en lui afin d'atteindre la paix, il doit en faire de même avec les autres. C'est donc au nom du respect et de la paix que chacun est invité à cohabiter avec autrui. Et c'est bien parce que Dieu a voulu cette diversité qu'il est interdit d'imposer ses croyances à autrui.
Ainsi, l'islam va au-delà de la simple tolérance qui n'est que l'acceptation pénible de l'autre. L'islam ordonne le respect d'autrui au nom de la diversité que Dieu a voulu sur terre. En islam, il est donc impossible de nier l'autre. Le vrai respect, rappelle Tariq Ramadan, c'est la connaissance de l'autre dans sa différence.
Caricatures: la réponse intelligente
La question des caricatures finit par venir au devant de la scène. Les avis sont divers comme pour rappeler le thème de la conférence. Interpelé sur le sujet, M. Ramadan répond que les manifestations et le boycott ne sont pas les solutions au problème. Un avis qui ne manque pas de surprendre l'auditoire. Mais selon le conférencier, la réponse intelligente, dans cette crise, commence par le dialogue. Expliquer aux non musulmans que le musulman ne fait d'humour sur la religion, encore moins sur le Prophète. Ne pas céder à la tentation de la violence et des manifestations qui ne servent que les fanatiques, les dictatures et l'extrême droite.
Et M. Ramadan de rappeler un sondage qui montre que 53% des Français pensent que les caricatures sont une provocation inutile. Par conséquent, manifester ou boycotter le Danemark, c'est ternir le dialogue, accentuer l'incompréhension en faisant le jeu des gouvernements arabes qui usent de cette crise pour distraire leurs peuples des problèmes sociaux. En somme, selon Tariq Ramadan, les musulmans doivent réagir en prenant en compte ces différents facteurs sans céder à la colère ni à la provocation. Car, explique-t-il c'est certainement ainsi que le Prophète aurait agit.