Illustration ©Christine Guais
Saphirnews : Quel est le concept de Quartiers Lointains?
Claire Diao : Il s'agit d'un programme itinérant composé de plusieurs courts-métrages réunis chaque année autour d'une thématique commune et sélectionnés, soit sur la base des films que j'ai l'occasion de voir lors de festivals, soit d'auteurs dont j'ai fait le portrait pour Le Bondy Blog ou mon blog L'Afrique en films hébergé par Courrier International. Les films sont diffusés tous ensemble selon un ordre établi et avec des cartons intertitres qui soulignent leur continuité.
Pourquoi avoir choisi de mettre en avant des films africains ?
Le film Destino, réalisé par Zangro met en scène Mehdi, un cameraman pour mariages maghrébins qui se retrouve face à son ex-petite amie.
Claire Diao : L'axe central est l'Afrique car je suis franco-burkinabè, mais il est aussi centré sur les points communs plus que sur les différences. En tant que métisse, on m'a constamment considérée comme l'Autre, celle qui n'est pas pareille, sans jamais chercher les points communs qui me faisait ressembler au groupe ou aux personnes qui me pensaient différente. Or, la richesse du métissage, c'est d'être un assemblage de points communs nés de la différence. J'ai grandi entre deux cultures, deux pays, deux religions, deux couleurs de peau. Et je regrette qu'aujourd'hui, les gens prônent l'entre-soi et se méfient de ceux qui - en apparence - ne paraissent pas comme eux.
Avec Quartiers Lointains, nous programmons une année des films français qui voyagent à l'étranger, notamment en Afrique, et l'autre année des films des quatre bassins linguistiques d'Afrique (anglophone, arabophone, francophone, lusophone) pour montrer la diversité de ce continent aux quatre coins de la France. L'objectif est d'offrir aux spectateurs une autre image du lointain : en allant chercher dans ces films de la différence, les spectateurs ressortent souvent surpris par les points communs qui font écho à leur intimité.
Avec Quartiers Lointains, nous programmons une année des films français qui voyagent à l'étranger, notamment en Afrique, et l'autre année des films des quatre bassins linguistiques d'Afrique (anglophone, arabophone, francophone, lusophone) pour montrer la diversité de ce continent aux quatre coins de la France. L'objectif est d'offrir aux spectateurs une autre image du lointain : en allant chercher dans ces films de la différence, les spectateurs ressortent souvent surpris par les points communs qui font écho à leur intimité.
Pourquoi cet événement est nécessaire ?
Claire Diao : Par mon travail de journaliste, j'écris sur des cinéastes émergents que le public ne connaît pas et qui, par conséquent, n'a pas l'occasion de voir leurs oeuvres. Parce qu'ils sont marginalisés, voire non considérés par les grands médias, ces auteurs semblent ne pas exister alors même qu'ils cartonnent en festival. La génération de demain est déjà là, il suffit d'aller les chercher pour les présenter.
Le problème, c'est que le grand public ne fait pas ce travail de recherche. Et s'il ne lit que les grands médias qui ne parlent pas des cinéastes que nous défendons, il ne risque pas de connaître les auteurs que nous présentons ! Nous faisons donc la démarche d'aller à la rencontre du public où qu'il soit, pour faire découvrir, susciter un intérêt et, je l'espère, attirer leur attention sur la carrière future de ces cinéastes.
Le problème, c'est que le grand public ne fait pas ce travail de recherche. Et s'il ne lit que les grands médias qui ne parlent pas des cinéastes que nous défendons, il ne risque pas de connaître les auteurs que nous présentons ! Nous faisons donc la démarche d'aller à la rencontre du public où qu'il soit, pour faire découvrir, susciter un intérêt et, je l'espère, attirer leur attention sur la carrière future de ces cinéastes.
Pourquoi avoir choisi le thème de l’amour?
Le sens du toucher de Jean-Charles Mbotti Malolo est un film d'animation où les deux personnes centraux n'osent s'avouer leur amour réciproque, le geste se substitue alors à la parole pour donner une chorégraphie.
Claire Diao : Cette année, la troisième saison s'intitule « L'amour à la française » justement parce qu'à l'étranger, un Français est Français quelle que soit sa couleur de peau. C'est une série de courts-métrage de fiction (Le retour de Yohann Kouam, Destino de Zangro), d'animation (Le sens du toucher de Jean-Charles Mbotti Malolo) et documentaire (Vers la Tendresse d'Alice Diop) qui interrogent l'amour dans notre société, qu'il soit hétérosexuel ou homosexuel, que la personne soit handicapée ou valide, qu'elle soit catholique, athée ou musulmane.
Comme tout le monde, j'ai été frappée par les attentats de Paris mais aussi, dix jours plus tard, par ceux de Tunis où j'étais. Toutes les nationalités étaient réunies à l'Hôtel Africa de Tunis où nous étions confinés. Et le constat était que les attentats peuvent nous toucher partout, à n'importe quel moment, de manière imprévisible. Alors plutôt que de se replier sur soi et de se méfier de tout le monde, nous nous sommes dit qu'un sentiment aussi universel que l'amour pouvait être un beau point commun à mettre en avant.
Le côté « à la française », c'est un clin d’œil pour l'exportation des films. Les gens aiment le « French Kiss », l'équation Paris égale à amour, tout ça... On leur présente la même chose mais en rappelant que les Français sont métissés, qu'ils ont plusieurs couleurs de peau, plusieurs religions... Ces garçons et ces filles parlent français, ils ont grandi là, ils sont nés là ! Il y a de nombreux talents français que les gens ne connaissent pas. A nous de les révéler.
Comme tout le monde, j'ai été frappée par les attentats de Paris mais aussi, dix jours plus tard, par ceux de Tunis où j'étais. Toutes les nationalités étaient réunies à l'Hôtel Africa de Tunis où nous étions confinés. Et le constat était que les attentats peuvent nous toucher partout, à n'importe quel moment, de manière imprévisible. Alors plutôt que de se replier sur soi et de se méfier de tout le monde, nous nous sommes dit qu'un sentiment aussi universel que l'amour pouvait être un beau point commun à mettre en avant.
Le côté « à la française », c'est un clin d’œil pour l'exportation des films. Les gens aiment le « French Kiss », l'équation Paris égale à amour, tout ça... On leur présente la même chose mais en rappelant que les Français sont métissés, qu'ils ont plusieurs couleurs de peau, plusieurs religions... Ces garçons et ces filles parlent français, ils ont grandi là, ils sont nés là ! Il y a de nombreux talents français que les gens ne connaissent pas. A nous de les révéler.
Quartiers Lointains est programmé mardi 19 avril au Magic Cinema de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Une tournée américaine est prévue en mai : le 7 au Lincoln Center de New York, le 9 au Film Society de Minneapolis, le 11 au Musée d'Art Contemporain de Detroit et à la Black Cinema House de Chicago le 12 mai. D'autres dates sont à venir en province d'ici septembre 2016 suivi d'une tournée africaine (Burkina Faso, Afrique du Sud, Bénin, Sénégal...).
Plus d'infos sur le site de Quartiers Lointains
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