Un colloque sur les violences sexuelles a été organisé, mardi 19 septembre, à Paris, par la Conférence des responsables de culte en France (CRCF).
La Conférence des responsables de culte en France (CRCF) a ouvert sa rentrée avec une journée d'études consacrée aux violences sexuelles, une première « historique » qui signe comme « une étape significative dans la reconnaissance de cet enjeu majeur ». « Conscients de l'ampleur du drame et de l'immensité du chantier », des représentants de six religions (catholique, protestant, orthodoxe, musulman, juif et bouddhiste) ont ainsi manifesté, mardi 19 septembre à la Maison du protestantisme, à Paris, « leur commun engagement » dans la lutte contre les abus sexuels touchant principalement les femmes et les enfants.
En présence de Juliette Part, cheffe du Bureau central des cultes (BCC), le colloque a été ouvert par le pasteur Christian Krieger, président de la Fédération protestante de France (FPF), qui a adopté en juin dernier un livret sur les violences sexuelles et spirituelles. Une action parmi d’autres dont tous dans la salle admettent qu’il a été un des effets bénéfiques des révélations accablantes faites en 2021 par la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase).
« Je veux rendre hommage au culte catholique d'avoir porté avec courage ce travail qui donne des conséquences pour nous tous » et qui a notamment inspiré la création en 2021 d’une Commission de déontologie rabbinique au sein des instances juives, indique le grand rabbin de France Haïm Korsia. Pour Carol Saba, responsable de la communication de l'Assemblée des évêques orthodoxes de France (AEOF), « rien ne sera comme avant après le rapport de la Ciase, qui s'impose comme un repère dans l'environnement juridique mais aussi socio-culturel français ».
En présence de Juliette Part, cheffe du Bureau central des cultes (BCC), le colloque a été ouvert par le pasteur Christian Krieger, président de la Fédération protestante de France (FPF), qui a adopté en juin dernier un livret sur les violences sexuelles et spirituelles. Une action parmi d’autres dont tous dans la salle admettent qu’il a été un des effets bénéfiques des révélations accablantes faites en 2021 par la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase).
« Je veux rendre hommage au culte catholique d'avoir porté avec courage ce travail qui donne des conséquences pour nous tous » et qui a notamment inspiré la création en 2021 d’une Commission de déontologie rabbinique au sein des instances juives, indique le grand rabbin de France Haïm Korsia. Pour Carol Saba, responsable de la communication de l'Assemblée des évêques orthodoxes de France (AEOF), « rien ne sera comme avant après le rapport de la Ciase, qui s'impose comme un repère dans l'environnement juridique mais aussi socio-culturel français ».
Une initiative pour « faire reculer l'indifférence » sur le phénomène
Face aux participants parmi lesquels figuraient Mgr Éric de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France (CEF), le magistrat Luc Frémiot, très engagé dans la lutte contre les violences conjugales, a alerté sur une situation « extrêmement grave » car, « en dépit de tous les efforts qui ont été faits » ces 20 dernières années, « on est encore très loin d'atteindre le but ». Les mouvements comme #MeToo ou #BalanceTonPorc ne sont que « le reflet de l'incompétence des institutions qui ont laissé la place à un grand vide qu'il a fallu combler. (…) Nous avons tous une responsabilité à prendre et (en s’adressant aux responsables des cultes, ndlr) en ce qui vous concerne, votre responsabilité est double et écrasante car vous avez un accès immédiat à l'intimité des victimes et de ceux qui vous font confiance », affirme-t-il, plaidant pour la mise sur pied d’une formation des ministres du culte sur les violences sexuelles.
Cette piste sera adoptée par la CRCF à l’issue d’une journée d’études unanimement saluée, qui aura tout de même vu poindre un désaccord entre des participants lorsque Carol Saba, avocat de profession, a affirmé qu’« il ne faut pas que la justice cultuelle remplace la justice républicaine » pour « ne pas devenir trop rapidement les justiciers d'une justice d'opinion ». Une position qui a vivement fait réagir Haïm Korsia, pour qui « on ne doit pas se laisser prendre par le principe de présomption d'innocence quand il y a un risque. (…) En tant que responsable de culte, on a un devoir de précaution » lorsque des affaires se présentent.
Le rabbin enjoint tout un chacun à ne pas céder à « la dictature du pardon » : « Je refuse que, dans les cultes, on impose aux victimes de devoir pardonner à l’agresseur, c'est-à-dire, en gros, de ne pas de la ramener, de ne pas en parler et de ne pas dire que je suis victime. (…) Mais moins on en parle, plus la réplique après est terrifiante. »
Cette piste sera adoptée par la CRCF à l’issue d’une journée d’études unanimement saluée, qui aura tout de même vu poindre un désaccord entre des participants lorsque Carol Saba, avocat de profession, a affirmé qu’« il ne faut pas que la justice cultuelle remplace la justice républicaine » pour « ne pas devenir trop rapidement les justiciers d'une justice d'opinion ». Une position qui a vivement fait réagir Haïm Korsia, pour qui « on ne doit pas se laisser prendre par le principe de présomption d'innocence quand il y a un risque. (…) En tant que responsable de culte, on a un devoir de précaution » lorsque des affaires se présentent.
Le rabbin enjoint tout un chacun à ne pas céder à « la dictature du pardon » : « Je refuse que, dans les cultes, on impose aux victimes de devoir pardonner à l’agresseur, c'est-à-dire, en gros, de ne pas de la ramener, de ne pas en parler et de ne pas dire que je suis victime. (…) Mais moins on en parle, plus la réplique après est terrifiante. »
Une mise en garde contre le détournement des principes du droit et de la religion au profit des agresseurs
Edouard Durant, co-président de la CIIVISE
A l’image de Luc Frémiot, qui prône la tolérance zéro avec « la prohibition de la médiation » entre agresseurs et victimes et « la chasse aux interprétations erronées sur le culte », Edouard Durant ne mâche pas ses mots. Le co-président de la Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVISE), qui a annoncé avoir reçu 27 000 témoignages de victimes en deux ans, déplore « l’écart entre une posture de principe consistant à dire que les violences sexuelles existent et sont graves et une absence totale de protection dans la réalité », ce qui crée « une injonction paradoxale ».
« Il y a une altérité radicale entre l'agresseur et la victime. La commune humanité n'est retrouvée que si l'inflexibilité de la loi est matérialisée de manière claire », fait-il part, en dénonçant lui aussi les interprétations trop souvent « erronées » de principes religieux mais aussi de principes fondamentaux du droit comme la présomption d’innocence et le principe du contradictoire au profit des agresseurs. « Croire et protéger l'enfant (témoignant d’un abus) de manière inconditionnelle » est « la seule attitude raisonnable et rationnelle » à adopter, plaide Edouard Durant. Or, selon le rapport de la CIIVISE rendu public jeudi 21 septembre, seules 8 % des victimes qui ont parlé ont reçu un « soutien social positif » : elles ont été crues, écoutées, protégées. Le défi est immense et pourtant, la CIIVISE est aujourd’hui menacée de disparition. La CRCF appelle au maintien de la commission inceste après décembre 2023.
« Il y a une altérité radicale entre l'agresseur et la victime. La commune humanité n'est retrouvée que si l'inflexibilité de la loi est matérialisée de manière claire », fait-il part, en dénonçant lui aussi les interprétations trop souvent « erronées » de principes religieux mais aussi de principes fondamentaux du droit comme la présomption d’innocence et le principe du contradictoire au profit des agresseurs. « Croire et protéger l'enfant (témoignant d’un abus) de manière inconditionnelle » est « la seule attitude raisonnable et rationnelle » à adopter, plaide Edouard Durant. Or, selon le rapport de la CIIVISE rendu public jeudi 21 septembre, seules 8 % des victimes qui ont parlé ont reçu un « soutien social positif » : elles ont été crues, écoutées, protégées. Le défi est immense et pourtant, la CIIVISE est aujourd’hui menacée de disparition. La CRCF appelle au maintien de la commission inceste après décembre 2023.
Avancer main dans la main avec les victimes
« Comment les institutions religieuses prennent leurs responsabilités pour lutter contre ces violences et s'engagent en interne et bien au-delà ? D'abord avec des positions fermes des plus hautes instances religieuses en refusant le déni, le secret, le silence et toute tergiversation face à l'inacceptable », assure Patricia Sitruk, présidente de la Commission de déontologie rabbinique.
Parce qu’il faut « avancer avec les victimes » et « co-construire des mesures avec elles », Valentine Buck, coordinatrice de la Commission Reconnaissance et Réparation (CRR) créée en en novembre 2021 par la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref) dans la foulée du rapport Sauvé. est venue accompagnée de deux victimes d’abus sexuels lorsqu’ils étaient enfants, dans les années 1960 et qui se disent « extrêmement déterminés » à combattre ces « crimes contre l'humanité » commis sur des enfants.
« Avant de déboucher sur des violences sexuelles, tout commence presque systématiquement par des abus spirituels », fait part, au nom du bouddhisme, Jean-Marc Falcombello. L’Union bouddhiste de France (UBF) a aussi constitué depuis un an un groupe de travail sur le pouvoir, sa mauvaise utilisation et les abus qui peuvent en découler (sexuels, psychologiques et financiers) pour « favoriser une prise de conscience des communautés bouddhistes sur la réalité de ces problèmes qui existent parfois déjà chez elles ou qui alertent sur la possibilité de leur apparition ».
Parce qu’il faut « avancer avec les victimes » et « co-construire des mesures avec elles », Valentine Buck, coordinatrice de la Commission Reconnaissance et Réparation (CRR) créée en en novembre 2021 par la Conférence des religieux et religieuses de France (Corref) dans la foulée du rapport Sauvé. est venue accompagnée de deux victimes d’abus sexuels lorsqu’ils étaient enfants, dans les années 1960 et qui se disent « extrêmement déterminés » à combattre ces « crimes contre l'humanité » commis sur des enfants.
« Avant de déboucher sur des violences sexuelles, tout commence presque systématiquement par des abus spirituels », fait part, au nom du bouddhisme, Jean-Marc Falcombello. L’Union bouddhiste de France (UBF) a aussi constitué depuis un an un groupe de travail sur le pouvoir, sa mauvaise utilisation et les abus qui peuvent en découler (sexuels, psychologiques et financiers) pour « favoriser une prise de conscience des communautés bouddhistes sur la réalité de ces problèmes qui existent parfois déjà chez elles ou qui alertent sur la possibilité de leur apparition ».
Loin derrière, le culte musulman désireux de « profiter de l’expérience des autres cultes »
Tous les cultes se retrouvent autour d'un même fait : aucune communauté religieuse n'est épargnée par le phénomène des violences sexuelles et toutes ont un rôle à jouer pour mettre un stop au fléau. Le culte musulman aussi, comme en témoigne l’affaire de l’imam de Montpellier, que Saphirnews a exposé en 2020 et qui a appelé la rédaction à lancer un appel à la libération de la parole au sein des communautés musulmanes. Néanmoins, en termes d’actions, il se détache très clairement des autres cultes sur le plan institutionnel du fait qu'il n’existe pas à ce jour d’organisation musulmane forte capable aujourd’hui de porter et de prendre en charge cette question sociétale et d'autres.
« A ma connaissance, les institutions musulmanes ne sont pas sollicitées par les victimes des violences sexuelles », affirme Mohammed Moussaoui, président du Conseil français du culte musulman (CFCM) et de l’Union des mosquées de France (UMF). « Est-ce à dire que ces agressions n’existent pas dans les rangs du personnel cultuel institutionnel ? J’aurais aimé que ce soit le cas. Je crains que la réalité ne soit pas visible ou perceptible en l’absence, au sein de nos institutions, de structures dédiées aux questions de violences sexuelles et dotées de moyens d’alerte, de vigilance et d’écoute des victimes. »
Déplorant des traditions religieuses « souvent détournées » de leurs objectifs et qui empêchent des victimes de s’exprimer, il appelle de ses vœux que sa participation lui permette de « profiter de l’expérience des autres cultes » pour faire avancer le sujet. Outre la formation des ministres des cultes, d'autres pistes de « collaboration interreligieuse » existent et la CRCF est décidée à travailler dessus.
Lire aussi :
Abus sexuels : depuis Lourdes, l'Eglise de France reconnaît sa responsabilité institutionnelle
Abus sexuels dans l'Eglise : des révélations accablantes pour un impératif reconnaissance de la responsabilité institutionnelle
Un imam accusé d'agressions sexuelles à Montpellier : une famille en quête de justice
Et aussi :
Violences sexuelles : il est temps de libérer la parole parmi les musulmans !
Harcèlement psychologique des femmes musulmanes : brisons l'omerta !
Viols et harcèlements : des Weinstein dans les communautés musulmanes ?
Stop au tabou sur la sexualité et les violences sexuelles sur mineurs
« A ma connaissance, les institutions musulmanes ne sont pas sollicitées par les victimes des violences sexuelles », affirme Mohammed Moussaoui, président du Conseil français du culte musulman (CFCM) et de l’Union des mosquées de France (UMF). « Est-ce à dire que ces agressions n’existent pas dans les rangs du personnel cultuel institutionnel ? J’aurais aimé que ce soit le cas. Je crains que la réalité ne soit pas visible ou perceptible en l’absence, au sein de nos institutions, de structures dédiées aux questions de violences sexuelles et dotées de moyens d’alerte, de vigilance et d’écoute des victimes. »
Déplorant des traditions religieuses « souvent détournées » de leurs objectifs et qui empêchent des victimes de s’exprimer, il appelle de ses vœux que sa participation lui permette de « profiter de l’expérience des autres cultes » pour faire avancer le sujet. Outre la formation des ministres des cultes, d'autres pistes de « collaboration interreligieuse » existent et la CRCF est décidée à travailler dessus.
Lire aussi :
Abus sexuels : depuis Lourdes, l'Eglise de France reconnaît sa responsabilité institutionnelle
Abus sexuels dans l'Eglise : des révélations accablantes pour un impératif reconnaissance de la responsabilité institutionnelle
Un imam accusé d'agressions sexuelles à Montpellier : une famille en quête de justice
Et aussi :
Violences sexuelles : il est temps de libérer la parole parmi les musulmans !
Harcèlement psychologique des femmes musulmanes : brisons l'omerta !
Viols et harcèlements : des Weinstein dans les communautés musulmanes ?
Stop au tabou sur la sexualité et les violences sexuelles sur mineurs