Il y a près d’un an et demi maintenant, le 21 avril 2002, l’accession du leader d’extrême droite au second tour des élections présidentielles sonnait comme un choc pour la majorité des français. Cependant, il ne semble pas que ces élections aient provoqué un effet repoussoir puisque l’enquête annuelle de TNS-Sofres pour le monde et RTL, publiée le 10 décembre, révèle que près d’un français sur quatre adhère aux idées de J.M Le Pen. Les Français deviendraient- ils plus intolérants ?
Depuis plus de deux ans maintenant, il est difficile de nier l’augmentation des actes à caractères racistes (islamophobie et antisémitismes compris) et plus généralement les discriminations à l’endroit des étrangers et des français issus de l’immigration. Il semblerait à priori que la population française trouve certaines difficultés à accepter les différences des autres citoyens français et des résidents étrangers aux origines extérieures aux frontières européennes.
Aussi, l’enquête annuelle réalisée par TNS-Sofres a révélé que 22% des français adhèraientt aux idées de l’extrême droite.
Le FN, un danger pour la démocratie
Un an et demi après le choc du 21 avril, le front national reste une force majeure dans le champ politique tant par son potentiel électoral que par l’influence qu’il continue d‘exercer.
A croire que l’idéologie du parti s’enracine dans le paysage français puisque 22% des personnes interrogées déclarent y adhérer ou être assez d’accord. 28% ne seraient pas choqués qu’un élu FN préside leur région et 4% estiment que ce serait même souhaitable.
Cependant il faut noter un recul par rapport à 2002, puisqu’à l’époque 28% avaient exprimé leur accord, mais un niveau élevé par rapport à 1999 où 11% avaient exprimé une opinion favorable.
Toujours est-il que même si 70% des français jugent que l’idéologie et la politique du front nationale sont un danger pour la démocratie, les élections de 2002 n’ont pas provoqué un effet de repoussoir aux idées de l’extrême droite.
De la remise en cause des valeurs traditionnelles…
Finalement, les Français sont peu majoritaires à juger inacceptables les positions défendues par le FN : 42% expriment cet avis, 42% pensent qu’elles sont excessives et 13% les trouvent justes.
Parmi les thématiques principales du FN, celles qui suscitent l'approbation la plus importante sont, comme en 2002, 'la défense des valeurs traditionnelles' (34 %) et 'la sécurité et la justice' (28 %). Mais sur ce second sujet apparaît un reflux imposant puisque, l'an dernier, 40% exprimaient une approbation du discours de M. Le Pen. Il semble que l'action de Nicolas Sarkozy au ministère de l'intérieur ait contribué à ce recul.. Si elle reste élevée, l'adhésion aux thèses du FN sur 'les immigrés' (23 %) s'établit, elle, à son niveau le plus bas depuis 1985.
Cependant, 59 % des personnes interrogées considèrent qu'il y a 'trop d'immigrés en France'. Notons aussi qu’à partir du moment où cette idée n’est plus prêtée à l’extrême droite, l’opinion française est beaucoup moins réservée puisque 67 % des sympathisants de l'UMP, 64 % de ceux de l'UDF, 55 % de ceux du PCF et 47 % de ceux du PS considèrent que la population immigrée est trop importante.
De même, l'insuffisance de la défense des 'valeurs traditionnelles' est ressentie par 70 % des Français, et 44 % estiment qu''on ne se sent plus chez soi en France'.
Hymne au nationalisme
Alors que jusqu’ici les jeunes représentaient le vivier des contestations anti-fascistes, l’enquête montre aussi que le discours et les idées de J.M.Le Pen rencontrent de plus en plus de succès au près de ceux-ci. Ainsi 22% des 18-24 ans approuvent l’ensemble de ses idées, 34% adhèrent à ses propositions sur la sécurité et 27 % des 18-24 ans considèrent qu'il faut 'donner la priorité aux Français' dans l'attribution des emplois, et 28 % dans le versement des prestations sociales. Un an et demi après le 21 avril, cette adhésion au thème de la 'préférence nationale' semble assurer à l'extrême droite une présence persistante.
Les Français deviendraient ils plus intolérants ?
Les enquêtes réalisées par la TNS-Sofres tendent à monter qu’il faut distinguer deux périodes.
Jusqu’en 2000, la conjoncture économique très favorable et l’unité derrière l’équipe nationale de football multiculturelle, vainqueur de la coupe du monde 1998 et de la coupe d’Europe 2000, semblaient avoir donné un nouvel élan à la cohésion sociale.
Depuis 2001 il s’avère que la cohésion social retrouvée s’est brisée sous les coups d’une conjoncture économique qui bat de l’aile et sous les coups d’une surenchère médiatique qui n’a cessé d’alimenter les préjugés avec les évènements du 11 septembre et les élections présidentielles de 2002. Ce qui s’est traduit par une augmentation des clichés négatifs sur les populations issues de l’immigration et une peur des cultures etrangères et différentes.