Une cérémonie marquant les dix de l'aumônerie musulmane des armées a été organisée le 6 octobre à Douaumont-Verdun. Ici au mémorial des soldats musulmans morts pour la France. © Saphirnews.com
Dix ans que l’aumônerie du culte musulman des armées existe. « Une révolution dans la condition des militaires de confession musulmane », selon les mots de Soufiane B. Cet ancien militaire de carrière, qui a pu se rendre compte par lui-même du changement notable procuré par l’émergence de cette structure cultuelle en 2006, a été une des toutes premières recrues de l’aumônerie. C’est lui qui a conduit avec brio la cérémonie militaire organisée jeudi 6 octobre à Verdun pour marquer les dix ans de l’institution dirigée depuis ses débuts par Abdelkader Arbi.
Aux dix ans de l'aumônerie musulmane des armées, une brigade du premier régiment des tirailleurs d'Epinal, qui ont repris des traditions de regiments de l'Armée d'Afrique. © Saphirnews.com
Désigné chef du protocole à l’occasion, Soufiane, 39 ans, n’est pas peu fier de faire partie du corps de l’aumônerie militaire musulmane. Et il n’est pas le seul. Ils sont 38 aujourd’hui à travers la France à occuper un poste dans cette institution, qui compte un personnel majoritairement issu de la communauté civile et non militaire.
Pour la plupart en tenue interarmées, ils ont fait le déplacement à la nécropole nationale de Douaumont et au mémorial dédié aux soldats musulmans morts durant la Grande Guerre, où ont été déposées des gerbes en hommage aux soldats morts pour la France. Un acte fort symbolique, suivi d’une Marseillaise chantée au rythme militaire en compagnie de porte-drapeaux représentant des associations d’anciens combattants et une brigade du premier régiment des tirailleurs d’Epinal, ressuscitée en 1994 en reprenant l’héritage des tirailleurs de l’Armée d’Afrique. Leur insigne de tenue, un croissant lunaire qui fait référence à l’islam, orne d’ailleurs les képis bleus vissés sur leurs têtes.
Pour la plupart en tenue interarmées, ils ont fait le déplacement à la nécropole nationale de Douaumont et au mémorial dédié aux soldats musulmans morts durant la Grande Guerre, où ont été déposées des gerbes en hommage aux soldats morts pour la France. Un acte fort symbolique, suivi d’une Marseillaise chantée au rythme militaire en compagnie de porte-drapeaux représentant des associations d’anciens combattants et une brigade du premier régiment des tirailleurs d’Epinal, ressuscitée en 1994 en reprenant l’héritage des tirailleurs de l’Armée d’Afrique. Leur insigne de tenue, un croissant lunaire qui fait référence à l’islam, orne d’ailleurs les képis bleus vissés sur leurs têtes.
Une chance que « les premiers » n’ont pas eue
« Nous célébrons aujourd’hui une décennie d’existence de notre service cultuel. Et ce n’est pas un hasard si nous avons choisi Douaumont et son mémorial dédié aux soldats musulmans morts durant la Grande Guerre, comme lieu de commémoration. Inauguré le 24 juin 2006, le monument aux morts a également vu s’écouler dix ans depuis son édification », a lancé Abdelkader Arbi face à des représentants de l’Etat et de l’armée ainsi que les maires de Verdun et de Douaumont.
L’aumônier militaire en chef souligne par là « un double anniversaire » célébré dans un lieu chargé d’Histoire afin de « saluer la mémoire de ces milliers de tirailleurs, goumiers, spahis, venus d’Afrique subsaharienne et du Maghreb, qui ont été jusqu’au sacrifice ultime pour défendre le drapeau sous lequel ils ont été enrôlés, sous lequel ils se sont engagés ». Ils « n’ont pas eu cette chance qu’ont nos soldats aujourd’hui de pouvoir trouver soutien et réconfort auprès de ministres du culte spécifiquement dédiés. C’est par eux et pour eux que notre structure trouve tout son sens. Ils auraient toute légitimité, aujourd’hui, à revendiquer la paternité de l’aumônerie musulmane. »
L’aumônier militaire en chef souligne par là « un double anniversaire » célébré dans un lieu chargé d’Histoire afin de « saluer la mémoire de ces milliers de tirailleurs, goumiers, spahis, venus d’Afrique subsaharienne et du Maghreb, qui ont été jusqu’au sacrifice ultime pour défendre le drapeau sous lequel ils ont été enrôlés, sous lequel ils se sont engagés ». Ils « n’ont pas eu cette chance qu’ont nos soldats aujourd’hui de pouvoir trouver soutien et réconfort auprès de ministres du culte spécifiquement dédiés. C’est par eux et pour eux que notre structure trouve tout son sens. Ils auraient toute légitimité, aujourd’hui, à revendiquer la paternité de l’aumônerie musulmane. »
L'aumônier militaire en chef du culte musulman Abdelkader Arbi (à dr.) aux côtés du général Christian Blanchon et du sous préfet de Verdun Benoît Vidon.
« Cette jeune aumônerie, qui s’institutionnalise désormais remarquablement, des siècles après l’avènement des trois autres aumôneries (catholique, israélite et protestante), traduit aussi la vitalité de la communauté musulmane de France », indique le général Christian Blanchon.
« Aujourd’hui, nous voyons de plus en plus de jeunes officiers de confession musulmane qui sortent des écoles militaires. Malgré eux, en dépit de leur confession, ils sont les héritiers des premiers. A la différence qu’ils commanderont. A eux donc de ne pas rater leur rendez-vous avec l’Histoire, celui d’un islam fort des valeurs d’humanisme et de respect », dont les aumôniers militaires musulmans sont « les premiers ambassadeurs » pour le général, venu témoigner « la fierté, la considération et le respect de la République envers les aumôniers militaires du culte musulman qui ont porté bien haut le défi qui fut le leur ».
« Aujourd’hui, nous voyons de plus en plus de jeunes officiers de confession musulmane qui sortent des écoles militaires. Malgré eux, en dépit de leur confession, ils sont les héritiers des premiers. A la différence qu’ils commanderont. A eux donc de ne pas rater leur rendez-vous avec l’Histoire, celui d’un islam fort des valeurs d’humanisme et de respect », dont les aumôniers militaires musulmans sont « les premiers ambassadeurs » pour le général, venu témoigner « la fierté, la considération et le respect de la République envers les aumôniers militaires du culte musulman qui ont porté bien haut le défi qui fut le leur ».
« Une mission d’intérêt public » au sein des armées
Un défi qu’entend bien porter Yousra O., 30 ans, la dernière recrue de la famille des aumôniers militaires musulmans. Cette ex-enseignante-chercheure à l’Ecole de l'air, à Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône), a démissionné de l’armée de l’air pour servir le corps de l’aumônerie. Une motivation qui s’inscrit dans l’ordre d’une « conviction profonde » qui est « le fruit d’une réflexion ». « Les tragiques évènements (à Paris) ont fini d’achever ma détermination », nous explique-t-elle en marge de la cérémonie. La structure est encore jeune « mais il y a une réelle historicité du fait musulman dans les armées françaises et il me tient à cœur de rappeler cette Histoire » à la société.
A Verdun, la plupart des aumôniers militaires musulmans arboraient leur tenue interarmées (bleue). Ces derniers sont en effet amenés à servir les quatre armées (armée de terre, armée de l’air, marine et gendarmerie). © Saphirnews.com
En outre, « le rôle de l'aumônier ne se tient pas qu’à être au service des musulmans. Nous permettons une meilleure compréhension du fait musulman auprès des non-musulmans qui concourt à une mission d’intérêt public et à des objectifs de vivre-ensemble », dit-elle. Soufiane abonde en ce sens.
A l'annonce de la création de la structure, « ni une ni deux, j’ai directement candidaté à un poste », fait-il savoir, arguant que l’absence d’interlocuteur musulman déterminé auprès de ses frères d’armes mais aussi auprès de la chaine de commandement était criante lors de la prise de décisions. Lorsque l'officier était alors sollicité, son travail de conseil était informel. Désormais, « il y a des personnes qualifiées, identifiées et légitimes vers qui se tourner » au besoin et « ce qui relevait d’une activité annexe est devenu ma fonction à plein temps », déclare Soufiane. L’aumônerie musulmane a vocation à être non pas une entité éphémère, mais bien une structure visant, avec le temps, à être aussi grande et aussi forte que les autres aumôneries et à égalité avec celles-ci.
« On participe à une déculturation de l’islam », indique Abdelkader Arbi. « Après le temps de la normalisation de l’islam dans les armées vient celui de la production et de la maturation. Je sais pouvoir compter sur l’ensemble des acteurs de l’institution pour accompagner la montée en puissance de notre structure », avait-il déclaré plus tôt dans son discours.
Compter sur tous sauf, pour le moment, le Conseil français du culte musulman (CFCM), « censé être l’instance de tutelle de l’aumônerie » mais qui « a brillé par son absence » à la cérémonie, nous dira-t-il plus tard. Cet évènement « fait partie des hommages auxquels il faut être fidèle », affirme, pour sa part, le sous-préfet de Verdun Benoît Vidon. « Tout reste à faire » en vue de servir les générations futures, pour Yousra, dont le recrutement est le signe d’une jeunesse renouvelée de l’aumônerie qu’elle, Soufiane et les autres savent si bien représenter.
A l'annonce de la création de la structure, « ni une ni deux, j’ai directement candidaté à un poste », fait-il savoir, arguant que l’absence d’interlocuteur musulman déterminé auprès de ses frères d’armes mais aussi auprès de la chaine de commandement était criante lors de la prise de décisions. Lorsque l'officier était alors sollicité, son travail de conseil était informel. Désormais, « il y a des personnes qualifiées, identifiées et légitimes vers qui se tourner » au besoin et « ce qui relevait d’une activité annexe est devenu ma fonction à plein temps », déclare Soufiane. L’aumônerie musulmane a vocation à être non pas une entité éphémère, mais bien une structure visant, avec le temps, à être aussi grande et aussi forte que les autres aumôneries et à égalité avec celles-ci.
« On participe à une déculturation de l’islam », indique Abdelkader Arbi. « Après le temps de la normalisation de l’islam dans les armées vient celui de la production et de la maturation. Je sais pouvoir compter sur l’ensemble des acteurs de l’institution pour accompagner la montée en puissance de notre structure », avait-il déclaré plus tôt dans son discours.
Compter sur tous sauf, pour le moment, le Conseil français du culte musulman (CFCM), « censé être l’instance de tutelle de l’aumônerie » mais qui « a brillé par son absence » à la cérémonie, nous dira-t-il plus tard. Cet évènement « fait partie des hommages auxquels il faut être fidèle », affirme, pour sa part, le sous-préfet de Verdun Benoît Vidon. « Tout reste à faire » en vue de servir les générations futures, pour Yousra, dont le recrutement est le signe d’une jeunesse renouvelée de l’aumônerie qu’elle, Soufiane et les autres savent si bien représenter.
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