Des objets financiers non identifiés…
Aujourd’hui, bien peu d’ouvrages évoquent les fonds souverains (une dizaine tout au plus, littérature anglo-saxonne comprise). C’est donc à un monde mal connu que s’attaquent les auteurs.
Dès les premières pages, ils nous expliquent que ces fonds d’investissement détenus par les pouvoirs publics sont des étrangetés financières. Il est difficile d’en parler sans confusion tant ils sont variés. Les plus visibles d’entre eux sont les fonds dits de stabilisation qui permettent à un État de s’abriter d’éventuelles variations excessives des prix des matières premières qu’il exporte.
Dès les premières pages, ils nous expliquent que ces fonds d’investissement détenus par les pouvoirs publics sont des étrangetés financières. Il est difficile d’en parler sans confusion tant ils sont variés. Les plus visibles d’entre eux sont les fonds dits de stabilisation qui permettent à un État de s’abriter d’éventuelles variations excessives des prix des matières premières qu’il exporte.
… mais politiquement marqués
Le lecteur pourra rapidement se rendre compte de la proximité des auteurs avec leur sujet : deux d’entre eux travaillent respectivement pour le cabinet d’Arnaud Montebourg et au sein de l’Agence des participations de l’État. C’est peut-être cette position d’acteur-observateur qui permet aux auteurs de souligner la dimension politique des fonds souverains. Le très médiatique fonds du Qatar ne déroge pas à la règle, et d’autres fonds le rejoignent : Singapour ou la Chine lui disputent la première place en termes de politisation de la finance.
Ententes et mésententes avec les acteurs financiers traditionnels
Quelles relations entretiennent les fonds souverains avec les acteurs sur l’échiquier de la finance internationale ? Sont-ils acceptés dans les échanges ?
Si leur puissance est respectée, leur statut particulier suscite la méfiance. Les fonds souverains n’ont en effet aucune obligation formalisée à l’égard de leurs actionnaires (l’État) à la différence des fonds de pensions ou des fonds d’investissement « classiques ». Dès lors, la concurrence est faussée quand les fonds souverains font leur entrée sur les marchés. Dès que des liquidités doivent être injectées dans une entreprise (capital-investment et private equity) ou qu’une société émet des obligations, les fonds souverains disposent d’une marge de manœuvre considérable, largement inégale face à celle des acteurs financiers traditionnels.
Si leur puissance est respectée, leur statut particulier suscite la méfiance. Les fonds souverains n’ont en effet aucune obligation formalisée à l’égard de leurs actionnaires (l’État) à la différence des fonds de pensions ou des fonds d’investissement « classiques ». Dès lors, la concurrence est faussée quand les fonds souverains font leur entrée sur les marchés. Dès que des liquidités doivent être injectées dans une entreprise (capital-investment et private equity) ou qu’une société émet des obligations, les fonds souverains disposent d’une marge de manœuvre considérable, largement inégale face à celle des acteurs financiers traditionnels.
Des exemples éloquents
Les auteurs ont souhaité guider le profane dans un univers où le jargon financier reste peu accessible et l’information rare. L’ouvrage foisonne ainsi d’exemples qui permettent de comprendre les enjeux stratégiques portés par ces fonds.
Il en est ainsi pour le fonds souverain du Koweït qui a participé à la reconstruction du pays après l’invasion des forces irakiennes : 100 milliards de dollars d’emprunts publics ont été garantis par la KIA (Kuwait Investment Authority).
De la même façon, l’archipel des Kiribati a créé son fonds souverains dès 1956 : la présence de phosphates en grande quantité ont permis d’engendrer des excédents budgétaires que le pays a réinvestis. Les auteurs pointent à juste titre que les pouvoirs publics n’ont utilisé cet argent pour le développement du pays : malgré leur puissance financière, les Kiribati sont demeurés l’un des pays les plus pauvres de la planète.
Il en est ainsi pour le fonds souverain du Koweït qui a participé à la reconstruction du pays après l’invasion des forces irakiennes : 100 milliards de dollars d’emprunts publics ont été garantis par la KIA (Kuwait Investment Authority).
De la même façon, l’archipel des Kiribati a créé son fonds souverains dès 1956 : la présence de phosphates en grande quantité ont permis d’engendrer des excédents budgétaires que le pays a réinvestis. Les auteurs pointent à juste titre que les pouvoirs publics n’ont utilisé cet argent pour le développement du pays : malgré leur puissance financière, les Kiribati sont demeurés l’un des pays les plus pauvres de la planète.
Les fonds souverains à la manœuvre : des craintes fictives
Objets de tous les fantasmes depuis qu’ils effectuent des entrées remarquées au capital de certains fleurons nationaux, les fonds souverains intriguent. L’ouvrage s’emploie à déconstruire avec brio les fantasmes plus ou moins entretenus autour des fonds.
Non, les fonds souverains ne sont pas devenus propriétaires de toutes les grandes entreprises du jour au lendemain. Non, ils ne sont pas non plus à la recherche de l’actionnariat majoritaire. Non, ils ne sont pas une menace pour la gouvernance des entreprises. Non, leurs intérêts ne sont pas identiques à ceux des fonds d’investissement traditionnels. Les auteurs s’emploient à dissiper l’imaginarium qui persiste autour de l’action des fonds souverains, perçus comme des « ogres » qui avalent les usines, les sièges sociaux, les actions et tout ce qui s’apparente de près ou de loin à la finance.
Non, les fonds souverains ne sont pas devenus propriétaires de toutes les grandes entreprises du jour au lendemain. Non, ils ne sont pas non plus à la recherche de l’actionnariat majoritaire. Non, ils ne sont pas une menace pour la gouvernance des entreprises. Non, leurs intérêts ne sont pas identiques à ceux des fonds d’investissement traditionnels. Les auteurs s’emploient à dissiper l’imaginarium qui persiste autour de l’action des fonds souverains, perçus comme des « ogres » qui avalent les usines, les sièges sociaux, les actions et tout ce qui s’apparente de près ou de loin à la finance.
L’actionnaire idéal ?
Quand un fonds souverain possède des parts dans une entreprise, qu’en fait-il ? Les fonds de secours revendront leurs parts une fois la tempête passée. En témoigne la recapitalisation de certaines banques pendant la crise financière de 2008 puis la revente des actions deux ou trois ans après, une fois les établissements sécurisés. D’autres fonds demeureront plus durablement au capital.
À la lecture de l’ouvrage, on peut découvrir que peu de fonds souverains exercent les droits accolés à cette prise de participation. Les auteurs voient dans cette retenue la volonté de ne pas interférer dans les orientations stratégiques de l’entreprise.
À la lecture de l’ouvrage, on peut découvrir que peu de fonds souverains exercent les droits accolés à cette prise de participation. Les auteurs voient dans cette retenue la volonté de ne pas interférer dans les orientations stratégiques de l’entreprise.
Un livre utile et stimulant mais incomplet
Au-delà de tout esprit polémique, cet ouvrage offre une analyse fine et éclairée de ces nouveaux instruments que sont les fonds souverains, permet d’en savoir un peu plus sur leurs buts affichés ou inavoués.
Il est cependant dommage que les auteurs se soient arrêtés en cours de route quand d’autres portes méritaient d’être enfoncées.
Les enjeux, les motifs qui animent les fonds ne sont pas tous traités.
Ainsi, il existe, dans certains pays, des fonds de soutien à la recherche et développement nationale, à la sécurité alimentaire – le Koweït, via son fonds souverain, a acheté des terres arables au Soudan, au Vietnam et… en Australie – ou encore au positionnement stratégique des entreprises nationales comme en atteste le très médiatique rachat d’un terminal du port grec du Pirée par la société publique chinoise COSCO.
Et si, par leurs visées politiques omniprésentes bien que cachées, les fonds souverains n’avaient jamais eu un qualificatif aussi pertinent ?
* Samia BUISINE, Benoit JOURJON, Benoît MALAPERT, Les fonds souverains, Presses des Mines, Paris, 2012, 188 pages, 22 euros.
Il est cependant dommage que les auteurs se soient arrêtés en cours de route quand d’autres portes méritaient d’être enfoncées.
Les enjeux, les motifs qui animent les fonds ne sont pas tous traités.
Ainsi, il existe, dans certains pays, des fonds de soutien à la recherche et développement nationale, à la sécurité alimentaire – le Koweït, via son fonds souverain, a acheté des terres arables au Soudan, au Vietnam et… en Australie – ou encore au positionnement stratégique des entreprises nationales comme en atteste le très médiatique rachat d’un terminal du port grec du Pirée par la société publique chinoise COSCO.
Et si, par leurs visées politiques omniprésentes bien que cachées, les fonds souverains n’avaient jamais eu un qualificatif aussi pertinent ?
* Samia BUISINE, Benoit JOURJON, Benoît MALAPERT, Les fonds souverains, Presses des Mines, Paris, 2012, 188 pages, 22 euros.