Cher Tariq, Ils ne cesseront de te vilipender, cherchant par tous les moyens, par tous les stratagèmes d’affaiblir ta pensée, de tronquer tes dires, d’arpenter des chemins étroits et scabreux pour desceller en toi une duplicité, un double discours qui, de Mohamed Sifaoui à Caroline Fourest, reste toujours à prouver. Misérable calomnie et vaine entreprise.
Un double discours qui aurait pris forme lorsque, sans caméra, tu sillonnais les banlieues de France pour conscientiser socialement ces hommes et ces femmes qui recherchaient, dans la plénitude de leur foi, la force d’affronter la brutalité de leurs vies. J’entends déjà ces âmes « sensibles » nous dire que ton entreprise était autre. Ils s’évertueront à nous répéter à l’envi que ta volonté première fût d’islamiser ces brebis égarées de notre belle et grande République.
De toute manière, ta filiation a toujours été condamnable, tes paroles douteuses, ton charisme dérangeant et tes livres d’une diabolique perspicacité. Ce petit cénacle parisien avait déjà décidé de te mener la vie dure et te condamner toi, « l’intellectuel musulman » qui avait eu l’outrecuidance d’affronter leur regard, leur hypocrisie et mettre à nu leurs mensonges éhontés sur ce fameux vivre-ensemble en faisant exploser au grand jour leur profond mépris pour ces communautés musulmanes coupables de se manifester.
Cher Tariq, j’aimerais te murmurer à quel point nous étions honorés qu’un esprit aussi brillant porte nos peines, nos frustrations et en parle avec autant de clarté et de sincérité. Une sincérité qui a tant manqué à tes contradicteurs qui repartaient bredouilles après avoir pris une correction verbale. Il fallait nous voir au petit matin raconter ces émissions en bas de nos tours, autour d’un café, à la sortie de nos mosquées ou à l’entrée de la fac ; dire comment tu avais démonté avec une précision chirurgicale les contres-vérités d’un Philippe de Villiers, les facéties de l’intellectuel à la chemise blanche semi-ouverte ou les obsessions et les digressions maladives d’Alain Finkielkraut.
Même si je sais qu’il n’a jamais été question pour toi d’épater la galerie, j’aimerais simplement en mon nom et au nom de tous ceux qui s’associeront à cette lettre te remercier pour ces moments de grâce télévisuelle où nous, les sans-voix, avions trouvé dans ta repartie notre champion.
Un double discours qui aurait pris forme lorsque, sans caméra, tu sillonnais les banlieues de France pour conscientiser socialement ces hommes et ces femmes qui recherchaient, dans la plénitude de leur foi, la force d’affronter la brutalité de leurs vies. J’entends déjà ces âmes « sensibles » nous dire que ton entreprise était autre. Ils s’évertueront à nous répéter à l’envi que ta volonté première fût d’islamiser ces brebis égarées de notre belle et grande République.
De toute manière, ta filiation a toujours été condamnable, tes paroles douteuses, ton charisme dérangeant et tes livres d’une diabolique perspicacité. Ce petit cénacle parisien avait déjà décidé de te mener la vie dure et te condamner toi, « l’intellectuel musulman » qui avait eu l’outrecuidance d’affronter leur regard, leur hypocrisie et mettre à nu leurs mensonges éhontés sur ce fameux vivre-ensemble en faisant exploser au grand jour leur profond mépris pour ces communautés musulmanes coupables de se manifester.
Cher Tariq, j’aimerais te murmurer à quel point nous étions honorés qu’un esprit aussi brillant porte nos peines, nos frustrations et en parle avec autant de clarté et de sincérité. Une sincérité qui a tant manqué à tes contradicteurs qui repartaient bredouilles après avoir pris une correction verbale. Il fallait nous voir au petit matin raconter ces émissions en bas de nos tours, autour d’un café, à la sortie de nos mosquées ou à l’entrée de la fac ; dire comment tu avais démonté avec une précision chirurgicale les contres-vérités d’un Philippe de Villiers, les facéties de l’intellectuel à la chemise blanche semi-ouverte ou les obsessions et les digressions maladives d’Alain Finkielkraut.
Même si je sais qu’il n’a jamais été question pour toi d’épater la galerie, j’aimerais simplement en mon nom et au nom de tous ceux qui s’associeront à cette lettre te remercier pour ces moments de grâce télévisuelle où nous, les sans-voix, avions trouvé dans ta repartie notre champion.
Un double discours qui ne t'appartient pas
Cher Tariq, nous avons toujours su qu’il y avait, lors de ces débats, un double discours. Mais celui-ci ne t’appartenait pas. Il a toujours appartenu à ceux qui, à Paris, proclamaient l’universalité de nos valeurs, la grandeur de nos principes et qui, aujourd’hui, arment sans vergogne des monarchies dictatoriales, décorent dans le plus grand des secrets d’une Légion d’honneur un prince d’Arabie qui compte à son actif plus de 70 exécutions depuis janvier 2016. Devant l’argent, la France se couche, la France se tait. La vertu à Paris, le cynisme meurtrier en Arabie…
Ce double discours est également celui des intellectuels faussaires qui condamnent le meurtre d’innocents à Paris et cautionnent des crimes de guerre à Gaza en donnant même à ces crimes odieux d’hommes, de femmes et d’enfants un caractère sacré en invoquant une certaine caution morale pour justifier l’innommable barbarie d’une armée d’occupation. La liberté à Paris, la légitimation de la barbarie en Palestine...
Sans oublier les faux dévots de la raison, les pourfendeurs de la République qui acceptent le racisme d’Etat, cautionnent la discrimination ethnique et construisent l’apartheid économique.
Ce double discours est également celui des intellectuels faussaires qui condamnent le meurtre d’innocents à Paris et cautionnent des crimes de guerre à Gaza en donnant même à ces crimes odieux d’hommes, de femmes et d’enfants un caractère sacré en invoquant une certaine caution morale pour justifier l’innommable barbarie d’une armée d’occupation. La liberté à Paris, la légitimation de la barbarie en Palestine...
Sans oublier les faux dévots de la raison, les pourfendeurs de la République qui acceptent le racisme d’Etat, cautionnent la discrimination ethnique et construisent l’apartheid économique.
L'art de la double trahison
Cher Tariq, nous avons appris à nos dépens que le chômage de masse, les inégalités scolaires, les confrontations violentes et répétées avec la police, les conditions de logement indécentes, les expulsions des plus pauvres des zones « rénovées », la paupérisation galopante, la fin avancée et programmée de nos vies citoyennes avaient un gout amer et que les vrais manipulateurs avançaient désormais à visage découvert.
En fait, nous avons appris avec le temps qu’ils maîtrisaient à la perfection l’art du double discours, voire aussi celui de la double trahison. Et du haut de nos tours, saisis par le vertige de nos vies, enfermés dans des cages à poules, réveillés par la détonation sourde des armes à feu, endeuillés par ces corps d’enfants criblés de balles, nous avons appris à fermer les portes d’un rêve devenu trop grand pour nos petites vies et encore trop petit pour nos profondes ambitions respectives. Nous avons découvert avec effroi qu’une seule plongée dans ces abîmes du désespoir pouvait être fatale pour nous et nos proches.
En fait, nous avons appris avec le temps qu’ils maîtrisaient à la perfection l’art du double discours, voire aussi celui de la double trahison. Et du haut de nos tours, saisis par le vertige de nos vies, enfermés dans des cages à poules, réveillés par la détonation sourde des armes à feu, endeuillés par ces corps d’enfants criblés de balles, nous avons appris à fermer les portes d’un rêve devenu trop grand pour nos petites vies et encore trop petit pour nos profondes ambitions respectives. Nous avons découvert avec effroi qu’une seule plongée dans ces abîmes du désespoir pouvait être fatale pour nous et nos proches.
Nous avons été trop longtemps assignés à être des musulmans de prétoire, invités à devenir le centre de gravité de tous les maux qui divisent la société française. Il ne suffisait point d’être rejetés par une partie de la société française, d’être la cible expiatoire de certains prétendants à l’Elysée. Il fallait y laisser la peau de nos enfants, la santé de nos parents et le crépitement de nos peurs aux morsures du soleil et du vent telle une plaie ouverte.
Qu’il est parfois insupportable d’écouter ces journalistes et ces experts nous expliquer que le moment viendra où le racisme se dissipera et où les discriminations reculeront. Mon Dieu, qu’il est difficile de voir toutes ces trahisons, toutes ces injonctions incantatoires de ces hommes et de ces femmes qui marchandent sous les dorures du pouvoir l’évasion sociale de nos vies.
Détrompe-toi, nous savons à qui appartient ce double discours et nous te remercions pour cette double présence qui, à l’intérieur de l’islam, bouscule et, au sein de la communauté des hommes, essaie avec tact et intelligence d’avancer vers l’Autre qui n’est en fait que le prolongement d’un moi. J’aimerais te dire en toute humilité que nous avions depuis fort longtemps compris ton langage clair basé sur la subtilité de la raison et de l’intelligence du cœur, un langage teinté d’humanisme et de réalisme qui est une chance pour les progressistes de tout horizon.
Alors moi, Français de naissance, Marseillais, d'origine africaine, de filiation comorienne, de culture et de confession musulmane, je te souhaite la bienvenue chez moi, chez toi, chez nous.
*****
Nassurdine Haidari est ancien élu socialiste et président du Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN) dans la région PACA.
Qu’il est parfois insupportable d’écouter ces journalistes et ces experts nous expliquer que le moment viendra où le racisme se dissipera et où les discriminations reculeront. Mon Dieu, qu’il est difficile de voir toutes ces trahisons, toutes ces injonctions incantatoires de ces hommes et de ces femmes qui marchandent sous les dorures du pouvoir l’évasion sociale de nos vies.
Détrompe-toi, nous savons à qui appartient ce double discours et nous te remercions pour cette double présence qui, à l’intérieur de l’islam, bouscule et, au sein de la communauté des hommes, essaie avec tact et intelligence d’avancer vers l’Autre qui n’est en fait que le prolongement d’un moi. J’aimerais te dire en toute humilité que nous avions depuis fort longtemps compris ton langage clair basé sur la subtilité de la raison et de l’intelligence du cœur, un langage teinté d’humanisme et de réalisme qui est une chance pour les progressistes de tout horizon.
Alors moi, Français de naissance, Marseillais, d'origine africaine, de filiation comorienne, de culture et de confession musulmane, je te souhaite la bienvenue chez moi, chez toi, chez nous.
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Nassurdine Haidari est ancien élu socialiste et président du Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN) dans la région PACA.
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