Politique

Fillon Gate : ces révélations qui font vaciller François Fillon

Rédigé par | Lundi 6 Février 2017 à 08:00

Depuis le 25 janvier, rien ne va plus pour François Fillon. Le candidat des Républicains, qui était voici peu favori à l’élection présidentielle, dégringole dramatiquement dans les sondages au fur et à mesure que les révélations du Canard enchaîné sur des emplois présumés fictifs de Pénélope Fillon. Le point sur le Fillon Gate qui pourrait bien écarter François Fillon de la course à la présidence.



François Fillon au meeting de Charleville-Mézières le 2 février. © LR
« Tous les hommes politiques, surtout au sommet, doivent être irréprochables. » François Fillon, à qui le dites-vous ? Le nouvel éclairage sur le Pénélope Gate apporté à la diffusion de l’émission Envoyé Spécial sur France 2 jeudi 2 février vient porter un grand coup à la candidature de François Fillon.

« Je n'ai jamais été son assistante, ou quoi que ce soit de ce genre-là. Je ne me suis pas occupée de sa communication non plus. », avait déclaré Pénélope Fillon dans une ancienne interview filmée accordée en mai 2007 au Sunday Telegraph. S'exprimant en anglais, l'épouse de François Fillon, d’origine galloise, appuient ainsi les soupçons d'emplois fictifs qui pèsent sur elle dix ans plus tard. Un coup dur pour l’ancien Premier ministre sous l'ère Sarkozy (2007-2012), qui fait l’objet de révélations en cascade depuis une dizaine de jours et voit l'Elysée s’éloigner chaque jour un peu plus de lui.

De l'argent public versé à Pénélope Fillon

Tout a commencé le 25 janvier lorsque le Canard enchaîné révèle que Pénélope Clarke Fillon, l’épouse du député de Paris, aurait touché près de 500 000 euros d'argent public en tant qu’assistante parlementaire. Elle aurait eu un contrat comme assistante de son mari entre 1998 et 2002, puis de son suppléant Marc Joulaud de 2007 à 2012 et enfin de nouveau de François Fillon durant six mois en 2012. Sauf qu'aucune preuve de son implication n’est disponible.

Dès le lendemain de ces révélations, le vainqueur de la primaire de la droite et du centre s’est présenté au journal de 20h de TF1 et a déclaré que sa femme travaillait « depuis toujours » à ses côtés bénévolement avant de l'embaucher en 1997. Malheureusement pour lui, le Canard dans son numéro du 1er février nous apprend que Pénélope Fillon a touché non pas 500 000 euros mais 831 440 euros brut, une rémunération qui va bien au-delà de la moyenne des salaires des collaborateurs. Elle aurait également été assistante parlementaire entre 1988 et 1990 et son dernier contrat se serait achevé non pas fin 2012 mais le 30 novembre 2013.

Des soupçons sur les enfants Fillon

Lors de son passage sur TF1, François Fillon avait anticipé sur de futures révélations en reconnaissant qu’il a employé deux de ses enfants comme assistants parlementaires lorsqu’il était sénateur de la Sarthe entre 2005 et 2007. Leurs « compétences d’avocats » auraient servi la mandature de leur père.

Problème, ni Marie, ni Charles Fillon n’avaient obtenu leurs diplômes à l’époque. Marie Fillon aurait reçu 57 000 euros entre le 18 septembre 2005 et le 31 décembre 2006, quand son cadet a perçu 26 000 euros entre le 1er janvier et le 17 juin 2007.

En parallèle, François Fillon est accusé d'avoir bénéficié de fonds publics détournés du temps où il était sénateur, grâce à un système de commissions occultes mis en place par plusieurs sénateurs UMP. Selon Mediapart, il aurait perçu au total sept chèques d'une valeur d'environ 3 000 euros chacun. Dans le cadre de ce dossier, une information judiciaire est en cours, visant plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Pour le moment, François Fillon n'est pas visé par l'enquête mais les dernières révélations à ce propos fragilisent encore un peu plus une candidature vacillante.

La Revue des deux mondes impliquée

Le milliardaire Marc Ladreit de Lacharrière, PDG de Fimalac et ami de François Fillon, est aussi concerné par le Pénélope Gate. Dans son édition du 25 janvier, le Canard enchaîné a révélé que Pénélope Fillon a touché 5 000 euros brut par mois comme salarié de la Revue des deux mondes entre mai 2012 et décembre 2013. La publication, qui appartient au milliardaire, a donc rémunéré 100 000 euros une femme qui n’a produit que deux notes de lecture.

Marc Ladreit de Lacharrière a aussi employé Alexia Demirdjian au sein de sa Fondation culture et diversité en mars 2015 en tant que « chargée de mission » selon Mediapart. Or, la jeune femme est depuis cette période-là responsable de la campagne numérique de François Fillon. Elle est elle aussi soupçonné d'avoir bénéficié d'un emploi fictif.

2F Conseil, la société controversée

En novembre 2016, le Canard nous apprenait que François Fillon possède la société de consulting 2F Conseil qui lui aurait rapporté plus de 757 526 euros entre juin 2012 et décembre 2015, durant donc sa mandature de député de Paris. Pourtant, il est interdit aux parlementaires de travailler dans le consulting durant leur mandat pour éviter les conflits d’intérêt, sauf si cette activité a débuté « avant le début de son mandat ».*

Parmi les clients du candidat à la présidentielle, le cabinet Ricol Lasteyrie Corporate Finance, leader de l’évaluation financière et du conseil aux entreprises. Aujourd’hui encore, François Fillon fait partie des « seniors advisors », conseillers de référence du cabinet. Ce contrat aurait rapporté, selon Le Monde, entre 40 000 et 60 000 euros par an à l’ancien Premier ministre.

Malgré une position intenable et une famille politique ébranlée, l'élu de la primaire de la droite n'est pas prêt à jeter l'éponge. Pour encore combien de temps ? « Si je suis mis en examen, je renonce » à être candidat à l'élection présidentielle, disait François Fillon le 26 janvier. Le parquet national financier a d'ores et déjà lancé une enquête préliminaire pour « détournement de fonds publics, abus de biens sociaux et recel de ces délits », qui s'est élargie aux emplois comme assistants parlementaires de deux enfants du candidat dans le but de rassembler des éléments prouvant l'effectivité ou non des travaux menés par Pénélope, Charles et Marie Fillon.

Mise à jour lundi 6 février : François Fillon, lors d'une conférence de presse à son QG de campagne, a affirmé face aux journalistes que son épouse a été employé auprès de lui et de son suppléant Marc Joulaud durant 15 ans pour une rémunération mensuelle moyenne de « 3677 euros net ». « En travaillant avec ma femme et mes enfants, j'ai privilégié cette collaboration de confiance qui suscite aujourd'hui la défiance. C'était une erreur et je présente mes excuses aux Français », a-t-il déclaré, qui maintient sa candidature pour la présidentielle envers et contre tout. En revanche, aucune question sur le présumé emploi fictif de Pénélope Fillon à La Revue des deux mondes n'a été posé.

*Nouvelle mise à jour : La société 2F Conseil a été officiellement créée le 6 juin 2012, avant qu'il ne devienne député le 17 juin de la même année. De ce point de vue, l'exercice de l'activité est légal. « La liste de mes clients ne comprend aucune entreprise russe, ni le gouvernement russe, ni aucun organisme de ce pays et toutes les conférences que j’ai données en Russie l’ont été à titre gratuit », a-t-il également assuré lors de la conférence de presse.

Lire aussi :
Islam, laïcité, famille, diplomatie... Ce qu'il faut retenir du programme de François Fillon
« Ali Juppé », une intox de l’extrême droite qui favorise François Fillon