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Gaza : « La paix tant désirée par le monde doit reposer sur le droit et la justice »

Rédigé par | Jeudi 10 Juillet 2014 à 17:03

Ramadan ou pas, Israël promet d'intensifier ses attaques contre Gaza, au grand désespoir de la population palestinienne qui compte dans ses rangs, au cinquième jour de l'offensive, plus de 100 morts et 500 blessés. Parmi les ONG humanitaires mobilisées sur le terrain, le Comité de Bienfaisance et de Secours aux Palestiniens (CBSP) pare à l'urgence, tout en assurant la distribution de colis alimentaires aux familles dans le besoin qui leur assure de tenir le mois du jeûne. Youcef Benderbal, le chargé de communication du CBSP répond aux questions de Saphirnews.




Saphirnews : Quel est le retour de vos équipes sur la situation à Gaza ?

Youcef Benderbal : Depuis le 8 juillet dernier, la situation sur le terrain est des plus alarmantes. Gaza est bombardée de façon massive, de nuit comme de jour. On dénombre plus de 70 victimes et près de 700 blessés. Une fois encore, ce sont des civils qui sont touchés dont un grand nombre d’enfants. L’hôpital Shifa vient de tirer la sonnette d’alarme quant à sa capacité de soigner tous les blessés qui affluent. A cause du blocus, il y a un manque cruel de médicaments et de produits médicaux. La population souffre terriblement. Les habitants vivent cloîtrés et terrorisés dans leurs maisons. Les rues sont désertes. Il est très risqué de sortir à cause des bombardements.

Les raids aériens ont lieu en plein mois du Ramadan, en quoi ceci vient-t-il compliquer la situation ?

Youcef Benderbal : Un Ramadan sous blocus est déjà en soi pénible à vivre. Avec l’agression israélienne, la vie est encore plus difficile. Les habitants ne peuvent circuler librement tant que les bombardements se poursuivent. Il en est de même pour nos partenaires locaux. Ils limitent leur déplacement car tout véhicule peut être pris pour cible par les drones israéliens.

Comme chaque année, le CBSP lance sa campagne Ramadan afin de préserver la dignité des plus démunis en ce mois de jeûne. Nous avons engagé la somme de 500 000 euros pour mener à bien cette vaste opération de solidarité. Avec les circonstances actuelles, nos partenaires locaux font tout leur possible pour aider les familles pauvres en distribuant notamment des colis alimentaires. Le problème qui se pose aujourd’hui, c’est les bombardements. Ces derniers entravent gravement notre action humanitaire et c’est ce que nous dénonçons vigoureusement. Il est inhumain de priver une population de solidarité sachant qu’elle vit déjà sous blocus depuis 2007.

Est visé officiellement le Hamas qu’Israël souhaite « éradiquer ». Quelle est son rapport avec les populations dans une telle situation ? Quelles réponses politiques apporte-t-il ?

Youcef Benderbal : C’est une question qui ne relève pas de mon champ d’action. Je suis un humanitaire qui agit face à une tragédie connue de tous. Là réside ma mission principale. Ceci étant dit, il convient de préciser qu’il est hautement condamnable d’infliger des châtiments collectifs à une population civile. Le droit international humanitaire l’interdit.

Quelle est l’attitude de l’Egypte vis-à-vis de Gaza ? Plus globalement, comment l’arrivée au pouvoir du maréchal Al-Sissi, désormais président, s’est traduite pour les Gazaouis ?

Youcef Benderbal : Les Gazaouis n’ont pas à souffrir de la tournure que prennent les événements dans la région. Ils aspirent à vivre en paix sur leurs propres terres. Malgré leur calvaire, leur cœur demeure toujours rempli de fraternité vis-à-vis du peuple égyptien. Le blocus israélien les plonge dans une pauvreté intolérable depuis sept ans déjà. Il ne faudrait surtout qu’un pays frère soit insensible à leur sort surtout dans les moments douloureux. Nous appelons l’Egypte à ouvrir rapidement le passage de Rafah au vu de la situation extrêmement dramatique qui prévaut dans la bande de Gaza.

Les autorités égyptiennes facilitent-elles le travail des ONG opérant à Gaza ? Quelle est votre expérience ?

Youcef Benderbal : Nous formulons le vœu que l’action des ONG ne fera l’objet d’aucune entrave. Ce qui se passe actuellement à Gaza est une réelle catastrophe humanitaire. Nous espérons que le bon sens et la raison l’emportent sur d’autres considérations. Au temps de Moubarak, le CBSP et d’autres ONG rencontraient de nombreuses difficultés dans l’accomplissement de leur mission. Nous étions en 2009. Gaza était à feu et à sang suite à l’opération sanglante et meurtrière « Plomb durci ». Des enfants grièvement atteints n’ont pas pu aller à l’étranger pour des soins. Malgré les documents en règle, les autorités égyptiennes de l’époque avaient refusé.

Aujourd'hui, qu'en est-il ?

Youcef Benderbal : Le CBSP comptait déjà participer à un convoi humanitaire prévu de longue date avec d’autres associations caritatives. A l’heure qu’il est, l’initiative risque d’être compromise vu les évènements actuels. Sinon, lorsque les démarches sont entreprises au nom d’un collectif regroupant des ONG, les autorités égyptiennes donnent le plus souvent leur aval pour entrer à Gaza via le poste frontalier de Rafah.

Les raids, s’ils n’ont jamais cessé, s’intensifient contre Gaza. A quoi faudrait-il s’attendre selon vous dans les prochains jours ? Comment y répondre à notre échelle ?

Youcef Benderbal : Plus le temps passe, plus la situation se dégrade sur tous les plans. Il est inacceptable de laisser ainsi souffrir des êtres humains. Les ONG n’ont aucun pouvoir pour faire cesser l’horreur. Notre rôle est d’aider les populations en détresse. Chacun se doit d’agir devant une tragédie d’une telle ampleur. La communauté internationale doit assumer pleinement ses responsabilités.

Pour notre part, nous avons réactivé l’opération SOS Gaza pour venir en aide aux familles palestiniennes durement touchés par les bombardements israéliens. D'ores et déjà, le CBSP a décidé d’engager 1 million d’euros pour agir dans ce sens. Nous lançons enfin un appel pressant à toute personne sensible à la détresse humaine. Tout le monde doit se sentir concerné par un tel drame. A nos yeux, aucun geste n’est insignifiant. Les dons constituent une source intarissable de bonheur pour ceux qui souffrent dans l’indifférence. Le CBSP œuvre grâce à la générosité de ses donateurs. Que ces derniers soient de plus en plus nombreux à nous soutenir !

Que vous évoque le communiqué de l'Elysée qui signe la solidarité de la France avec Israël ?

Youcef Benderbal : Les bonnes relations devraient servir à obtenir des résultats significatifs en matière des droits de l’Homme. Or, force est de constater que la vie des Palestiniens ne s’est guère améliorée depuis la seconde Intifada déclenchée en septembre 2000. Au contraire, leurs conditions de vie s’est considérablement dégradée à tous les niveaux. Que ce soit à Gaza où perdure le blocus ou bien en Cisjordanie où prolifèrent les colonies.

J’estime qu’à un certain moment, les actes doivent traduire l’attachement de la France aux questions liées au respect de la dignité humaine. Il est temps de comprendre que le bonheur d’un peuple ne construit pas sur le malheur d’un autre. La paix tant désirée par le monde doit reposer sur le droit et la justice. C’est la condition sine qua none pour qu’elle soit effective et durable. Les violations flagrantes ne font qu’assombrir l’avenir. Après 66 ans de souffrances, les Palestiniens veulent autre chose que des paroles ou des promesses.

Site officiel du CBSP



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