Sur le vif

Grande Mosquée de Bruxelles : les instances musulmanes belges dénoncent les accusations d'espionnage à la solde du Maroc

Rédigé par Radjaa Abdelsadok | Lundi 7 Décembre 2020 à 16:00



Le ministre belge de la Justice, Vincent Van Quickenborne, a récemment décidé de la suspension du processus de reconnaissance de la Grande Mosquée de Bruxelles, qui permettra notamment à la structure de bénéficier d'aides publiques. Pour cause, des dirigeants du lieu de culte, désignés pour mettre fin à la tutelle saoudienne, sont soupçonnés par les autorités d’espionnage supposé pour le compte du Maroc.

Selon un rapport de Sureté de l’Etat mentionné par la RTBF, il s’agirait en particulier du lien de proximité noué entre le Maroc et Salah Echallaoui, vice-président de l’Exécutif des musulmans de Belgique (EMB), institution représentative du culte musulman de ce pays.

Dans une interview à la chaine flamande VRT vendredi 4 décembre, il a déclaré que « les tentacules du Maroc s’étendent loin et empêchent un islam autonome de se développer en Belgique ». Et d'affirmer avec détermination que gouvernement belge « n’acceptera jamais que d'autres pays essaient de détourner l'islam à des fins politiques ». C’est pourquoi le ministre a appelé l'EMB à renouveler ses instances et « promouvoir un islam progressiste compatible avec les valeurs de notre société ».

Une ingérence de la justice dans les cultes jugée inappropriée

« Nous ne pouvons qu’exprimer nos regrets sincères quant à la suspension du processus de reconnaissance de la Grande mosquée de Bruxelles malgré un travail de longue haleine constructif et concerté avec les pouvoirs publics et les services compétents de notre pays. Les déclarations du ministre de la Justice (...) font fi de tous les acquis réalisés dans le domaine de l’institutionnalisation de l’islam en Belgique et ce, depuis 1998 », ont dénoncé par voie de communiqué l’EMB, l’Association de gestion de la Grande Mosquée de Bruxelles et le Conseil de coordination des institutions islamiques de Belgique, rappelant que le ministre n’a toujours pas répondu à leur demande de rendez-vous en vue d’organiser un rapport d’évaluation officiel.

Les accusations d’ingérence et d'espionnage sont balayées. « Nos institutions sont des organisations de droit public et droit civil belge dont les membres sont citoyens belges à part entière », indique-t-on. Il est donc « diffamatoire, injurieux et calomnieux de déclarer que nos membres seraient des espions à la solde de pays étrangers ». En définitive, « ces accusations sont infondées, contestées et contestables ».

Pour ces institutions, les propos du ministre portent atteinte à la liberté de culte, le principe de neutralité ainsi que le principe de séparation entre l’Eglise et l’Etat. Cette intervention politique constitue « une ingérence manifeste dans les affaires du culte islamique ». Pour eux, « il n’appartient pas aux politiques de définir des qualifications pour un culte, ni de lancer un appel aux communautés religieuses quant au choix de leurs représentants », avant d'affirmer avec conviction que « la communauté musulmane de Belgique n’acceptera pas d’être intimidée et stigmatisée à travers ses institutions et ses membres ». Pour autant, les instances musulmanes « restent ouverts au dialogue avec les pouvoirs publics ».

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