Aujourd’hui, la France est engagée au front, au Mali où trois groupes extrémistes se revendiquant de l’islam contrôlent près des deux tiers du territoire dans la partie nord du pays. Ces derniers voudraient plus et cherchent à conquérir tout le pays. Leur offensive récente pour prendre le contrôle de la localité de Konna, à 700km de Bamako, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase pour la France.
En réponse, les forces françaises sont venues appuyer les militaires maliens, vendredi 11 janvier, rentrant de plein fouet dans le conflit. A présent, la France est de la partie.
En réponse, les forces françaises sont venues appuyer les militaires maliens, vendredi 11 janvier, rentrant de plein fouet dans le conflit. A présent, la France est de la partie.
En guerre contre le terrorisme ou l'islamisme ?
« Les forces françaises ont apporté leur soutien à l’armée malienne pour lutter contre les terroristes », a déclaré François Hollande, confirmant l’intervention armée de la France, vendredi 11 janvier. La mobilisation des forces françaises durera le temps qu’il faut, a-t-il précisé.
Neuf mois après sa prise de pouvoir, le président français revêt son costume de chef des armées en usant du discours sur le terrorisme pour légitimer sa décision. L'intervention française « n'a pas d'autre but que la lutte contre le terrorisme », a-t-il réaffirmé samedi 12 janvier, après s’être félicité du succès de la contre-offensive qui a permis de reprendre Konna aux groupes insurgés.
Les éléments de langage ont été choisis : on parlera de « terrorisme » et non d’« islamisme ». Un choix sémantique dont s'est félicité le Conseil français du culte musulman qui, dans un communiqué, « salue cette précaution utile et nécessaire (…) écartant ainsi tout amalgame et toute confusion entre islam et terrorisme ».
Neuf mois après sa prise de pouvoir, le président français revêt son costume de chef des armées en usant du discours sur le terrorisme pour légitimer sa décision. L'intervention française « n'a pas d'autre but que la lutte contre le terrorisme », a-t-il réaffirmé samedi 12 janvier, après s’être félicité du succès de la contre-offensive qui a permis de reprendre Konna aux groupes insurgés.
Les éléments de langage ont été choisis : on parlera de « terrorisme » et non d’« islamisme ». Un choix sémantique dont s'est félicité le Conseil français du culte musulman qui, dans un communiqué, « salue cette précaution utile et nécessaire (…) écartant ainsi tout amalgame et toute confusion entre islam et terrorisme ».
Des groupes mafieux avant tout
Cette confusion est aussi entretenue par les groupes se revendiquant de l'islam qui sévissent dans le pays. Ils appartiennent à trois groupes distincts : Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Ansar Dine et le Mouvement pour l’unicité du jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO).
« Ces groupes, soi-disant musulmans, sont des groupes mafieux, des bandits » souligne à Saphirnews Pierre Jacquemot, chercheur spécialiste des questions économiques et politiques africaines associé à l’Institut des Relations Internationales et stratégiques (IRIS). Ils vivent d’une « économie mafieuse avec des trafics de drogues, de cigarettes, de cocaïne et d’une économie de la rançon ».
Leur volonté de conquérir le territoire malien cache, avant tout, des « intérêts financiers ». Pour satisfaire leur soif de pouvoir, ils sont prêts à menacer l’intégrité territoriale du Mali. Une menace à laquelle la France a décidé de riposter en intervenant dans son ancienne colonie.
Le secrétaire général de l'Organisation de la coopération islamique (OCI), Ekmeleddin Ihsanoglu, a appelé, mardi 15 janvier, à un « cessez-le-feu immédiat » et à la reprise des négociations, sous l'égide du Burkina Faso, entre les autorités maliennes et les rebelles afin de trouver une « solution pacifique du conflit ». Profondément préoccupé par la situation au Mali, il a exhorté à « la retenue toutes les parties en conflit ».
« Ces groupes, soi-disant musulmans, sont des groupes mafieux, des bandits » souligne à Saphirnews Pierre Jacquemot, chercheur spécialiste des questions économiques et politiques africaines associé à l’Institut des Relations Internationales et stratégiques (IRIS). Ils vivent d’une « économie mafieuse avec des trafics de drogues, de cigarettes, de cocaïne et d’une économie de la rançon ».
Leur volonté de conquérir le territoire malien cache, avant tout, des « intérêts financiers ». Pour satisfaire leur soif de pouvoir, ils sont prêts à menacer l’intégrité territoriale du Mali. Une menace à laquelle la France a décidé de riposter en intervenant dans son ancienne colonie.
Le secrétaire général de l'Organisation de la coopération islamique (OCI), Ekmeleddin Ihsanoglu, a appelé, mardi 15 janvier, à un « cessez-le-feu immédiat » et à la reprise des négociations, sous l'égide du Burkina Faso, entre les autorités maliennes et les rebelles afin de trouver une « solution pacifique du conflit ». Profondément préoccupé par la situation au Mali, il a exhorté à « la retenue toutes les parties en conflit ».
« Une intervention justifiée »…
Cette intervention de la France au Mali a été bien accueillie par la majorité de la classe politique. Le président de l'UMP Jean-François Copé et l'ancien Premier ministre François Fillon ont tout naturellement apporté leur soutien à cette intervention.
Même Marine Le Pen qui avait dénoncé l’ingérence de la France dans la révolution libyenne et son opposition à une intervention internationale en Syrie, a qualifié de « légitime » l'engagement de l'armée française au Mali.
Pierre Jacquemot trouve aussi cette intervention « parfaitement justifiée et pertinente ». « La France est dans son rôle qu’elle occupe au sein du Conseil de sécurité des Nations unies où elle est dans le devoir de préserver l’intégrité des Etats », juge-t-il. « Il y avait urgence pour contrer le terrorisme et, en plus, l’intervention française a été explicitement demandée par le président malien » Diougounda Traoré, ajoute-t-il.
Avec une armée désorganisée depuis le début du conflit, opposant au départ les militaires aux Touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), une aide extérieure leur devenait nécessaire.
Par ailleurs, le nombre de réfugiés chassés par le conflit au Mali approche les 150 000 personnes dans les pays voisins (Mauritanie, Niger, Burkina Faso principalement), a indiqué, mardi 15 janvier, le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) des Nations unies. Le nombre de personnes déplacées dans le pays est proche de 230 000, a précisé le bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA).
Même Marine Le Pen qui avait dénoncé l’ingérence de la France dans la révolution libyenne et son opposition à une intervention internationale en Syrie, a qualifié de « légitime » l'engagement de l'armée française au Mali.
Pierre Jacquemot trouve aussi cette intervention « parfaitement justifiée et pertinente ». « La France est dans son rôle qu’elle occupe au sein du Conseil de sécurité des Nations unies où elle est dans le devoir de préserver l’intégrité des Etats », juge-t-il. « Il y avait urgence pour contrer le terrorisme et, en plus, l’intervention française a été explicitement demandée par le président malien » Diougounda Traoré, ajoute-t-il.
Avec une armée désorganisée depuis le début du conflit, opposant au départ les militaires aux Touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), une aide extérieure leur devenait nécessaire.
Par ailleurs, le nombre de réfugiés chassés par le conflit au Mali approche les 150 000 personnes dans les pays voisins (Mauritanie, Niger, Burkina Faso principalement), a indiqué, mardi 15 janvier, le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) des Nations unies. Le nombre de personnes déplacées dans le pays est proche de 230 000, a précisé le bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA).
… ou une « intervention impérialiste » ?
Du côté du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), le son de cloche est différent. Le NPA dénonce une « intervention militaire impérialiste décidée par Hollande, une fois de plus sur le dos des peuples ! », lit-on sur le site du parti politique.
« L’ancienne puissance coloniale n’entretient pas des troupes sur ce continent pour rien. Elle poursuit, dans la tradition de tous les gouvernements qui se sont succédés, son rôle de gendarme, pour protéger ses intérêts, pour soutenir les gouvernements qui sont à sa botte. La menace islamiste constitue le paravent de cette opération militaire », estime le parti, qui constate que la Françafrique n’est pas finie.
Pourtant, en visite à Dakar, au Sénégal, au mois d’octobre 2012, François Hollande déclarait que le temps de la Françafrique était révolu. « Il y a la France, il y a l'Afrique, il y a le partenariat entre la France et l'Afrique, avec des relations fondées sur le respect, la clarté et la solidarité », clamait-t-il. Visiblement, la France a eu du mal à lâcher ce rôle de gendarme qu’elle occupe sur le continent africain.
Alors que le Conseil de sécurité des Nations Unies avait voté pour le déploiement d'une force internationale, sous conduite africaine, la Mission internationale de soutien au Mali (MISMA), la France était déjà présente sur le terrain. « Il faut tout faire maintenant pour que les Africains soient les seuls maîtres d'œuvre de l'opération », a toutefois assuré François Hollande.
Sauf que dans le même temps, le chef de l'Etat a assuré qu'il veillera à la transition politique au Mali : les troupes françaises se retireront dès lors qu'un processus électoral sera mis en oeuvre et que « des autorités légitimes » seront en place. Une façon aussi de s'assurer le soutien des prochains dirigeants du pays.
« L’ancienne puissance coloniale n’entretient pas des troupes sur ce continent pour rien. Elle poursuit, dans la tradition de tous les gouvernements qui se sont succédés, son rôle de gendarme, pour protéger ses intérêts, pour soutenir les gouvernements qui sont à sa botte. La menace islamiste constitue le paravent de cette opération militaire », estime le parti, qui constate que la Françafrique n’est pas finie.
Pourtant, en visite à Dakar, au Sénégal, au mois d’octobre 2012, François Hollande déclarait que le temps de la Françafrique était révolu. « Il y a la France, il y a l'Afrique, il y a le partenariat entre la France et l'Afrique, avec des relations fondées sur le respect, la clarté et la solidarité », clamait-t-il. Visiblement, la France a eu du mal à lâcher ce rôle de gendarme qu’elle occupe sur le continent africain.
Alors que le Conseil de sécurité des Nations Unies avait voté pour le déploiement d'une force internationale, sous conduite africaine, la Mission internationale de soutien au Mali (MISMA), la France était déjà présente sur le terrain. « Il faut tout faire maintenant pour que les Africains soient les seuls maîtres d'œuvre de l'opération », a toutefois assuré François Hollande.
Sauf que dans le même temps, le chef de l'Etat a assuré qu'il veillera à la transition politique au Mali : les troupes françaises se retireront dès lors qu'un processus électoral sera mis en oeuvre et que « des autorités légitimes » seront en place. Une façon aussi de s'assurer le soutien des prochains dirigeants du pays.
L’uranium du Niger en vue ?
Reste que la France, par son intervention rapide, s'est positionnée comme leader dans ce conflit. Les intérêts économiques doivent y être importants ? Non, pour M. Jacquemot, qui souligne « la pauvreté » du Mali.
Les intérêts géopolitiques de la France ne sont pas situés dans cette zone de l’Afrique, selon le chercheur. « Il n’y a pas de pétrole au Mali et la production du coton n’y est pas décisif. A la limite, il y a Areva au Niger et ses ressources en uranium », note-t-il simplement.
A l’inverse, Walter Bruyères-Ostells, maître de conférence à Sciences-Po Aix et chercheur en histoire militaire et géostratégique, va plus loin. « L'accès convoité aux richesses minières (pétrole, gaz, uranium, or, phosphates...) est potentiellement au centre de la bataille géopolitique qui se déroule dans le désert. Dans cette bataille, tout l'intérêt de l'Algérie est que la crise dure. L'une de ses préoccupations est sans doute un retour d'une influence forte de la France », écrit-t-il dans l’édition française du site Huffington Post.
Pour lui, Paris souhaite « participer à la lutte entre puissances qui se dessine pour les ressources du continent noir », avec en ligne de mire l’uranium extrait par Areva à Arlit au Niger. Marquer sa présence au Mali est ainsi hautement stratégique pour la France. D’où l’hostilité de l’Algérie, acteur décisif de cette zone, à une intervention étrangère au Mali.
Mais attendue par Bamako et saluée par les représentants de la communauté malienne en France qui compte 100 000 personnes, cette intervention démontre aussi l’incapacité de certaines anciennes colonies africaines de l’Hexagone à se doter d’une force militaire, capable de protéger leur population.
750 militaires français sont actuellement mobilisés au Mali et leurs effectifs vont encore augmenter. La France déploiera progressivement 2 500 soldats au Mali, selon l'entourage du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Les rebelles touarègues du MNLA, non inscrits dans le fondamentalisme affichés des trois autres groupes, souhaitent à présent « combattre aux côtés de l’armée malienne et des Français », fait savoir M. Jacquemot. Toutefois, ces rebelles, qui revendiquent le territoire de l’Azawad au Nord, pourraient toujours se retourner contre le gouvernement malien qui, rappelons-le, est la conséquence d’un coup d’Etat, en mars 2012. Même une fois les « terroristes » délogés, l’incertitude sur l’avenir du Mali reste grande.
Les intérêts géopolitiques de la France ne sont pas situés dans cette zone de l’Afrique, selon le chercheur. « Il n’y a pas de pétrole au Mali et la production du coton n’y est pas décisif. A la limite, il y a Areva au Niger et ses ressources en uranium », note-t-il simplement.
A l’inverse, Walter Bruyères-Ostells, maître de conférence à Sciences-Po Aix et chercheur en histoire militaire et géostratégique, va plus loin. « L'accès convoité aux richesses minières (pétrole, gaz, uranium, or, phosphates...) est potentiellement au centre de la bataille géopolitique qui se déroule dans le désert. Dans cette bataille, tout l'intérêt de l'Algérie est que la crise dure. L'une de ses préoccupations est sans doute un retour d'une influence forte de la France », écrit-t-il dans l’édition française du site Huffington Post.
Pour lui, Paris souhaite « participer à la lutte entre puissances qui se dessine pour les ressources du continent noir », avec en ligne de mire l’uranium extrait par Areva à Arlit au Niger. Marquer sa présence au Mali est ainsi hautement stratégique pour la France. D’où l’hostilité de l’Algérie, acteur décisif de cette zone, à une intervention étrangère au Mali.
Mais attendue par Bamako et saluée par les représentants de la communauté malienne en France qui compte 100 000 personnes, cette intervention démontre aussi l’incapacité de certaines anciennes colonies africaines de l’Hexagone à se doter d’une force militaire, capable de protéger leur population.
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