Sur le vif

Irak: un photographe d'AP détenu par l'armée américaine

Rédigé par Laila Elmaaddi | Lundi 18 Septembre 2006 à 00:39



L'armée américaine en Irak détient depuis cinq mois un photographe irakien de l'Associated Press, accusé de constituer une menace à la sécurité. Mais aucune inculpation n'a à ce jour été portée contre lui.

Bilal Hussein, ressortissant irakien de 35 ans natif de Falloujah, est selon l'armée américaine détenu pour "raisons impératives de sécurité". La direction de l'Associated Press dit n'avoir rien trouvé dans le travail de son photographe qui indique des contacts inappropriés avec l'insurrection irakienne, et juge que toute preuve contre lui doit être présentée devant la justice irakienne.

"Nous voulons que le droit prévale. Il doit soit être inculpé, soit libéré. La détention indéfinie est inacceptable", a déclaré à New York le PDG d'Associated Press Tom Curley. "Ceci est inacceptable tant en vertu du droit irakien, des conventions de Genève, ou d'une quelconque procédure militaire".

L'Associated Press avait préféré jusqu'à présent agir dans la discrétion, estimant que cela constituait la meilleure approche. Mais, l'armée américaine ne laissant pas penser qu'elle pourrait changer d'attitude, l'AP a décidé de rendre désormais l'affaire publique. L'agence, selon Tom Curley, espère ainsi attirer l'attention sur le cas du photographe et celui de milliers d'autres actuellement détenus en Irak.

Hussein a commencé à travailler pour l'Associated Press en Irak en septembre 2004, à Falloujah où il a couvert l'offensive américaine, puis à Ramadi, avant d'être arrêté le 12 avril de cette année.

Selon la direction d'Associated Press, l'armée n'a fourni aucune preuve concrète des accusations portées contre lui et ne lui a pas non plus fourni l'occasion de présenter une défense.

Selon l'armée américaine, Bilal Hussein a été arrêté avec deux rebelles, dont Hamid Hamad Motib, un dirigeant présumé d'Al-Qaïda en Irak. "Il a des relations étroites avec des personnes connues pour kidnapping, trafic, attaques à la bombe artisanale et autres attaques contre les forces de la coalition", écrit dans un mail du 7 mai le général américain Jack Gardner, responsables des détenus en Irak.

Hussein, qui clame son innocence, aurait eu "accès à des activités de l'insurrection qui va au-delà du niveau normal accordé à des journalistes menant des activités légitimes", selon le général Gardner.

Les responsables d'AP à New York et Bagdad ont cherché à avoir de plus amples informations et à obtenir le transfert du dossier de Bilal Hussein à la justice irakienne, et ont contacté à cet effet des responsables au Pentagone ainsi que l'ambassadeur américain en Irak Zalmay Khalilzad.

Bilal Hussein est l'une des quelque 14.000 personnes détenues par l'armée américaine dans le monde, dont 13.000 en Irak. La plupart sont dans une "zone grise" juridique, seul un petit nombre faisant l'objet d'une inculpation spécifique ou étant autorisé à se défendre devant un quelconque organe judiciaire.