Politique

Islamophobie, la recette gagnante : Marine Le Pen élue à la tête du FN

Rédigé par Propos recueillis par Pauline Compan | Lundi 17 Janvier 2011 à 11:47

Avec 67,65 % des suffrages exprimés, Marine Le Pen est devenue, dimanche 16 janvier, la nouvelle présidente du Front national. Intronisée lors d’un congrès à Tours, la fille du chef a assuré vouloir un FN « renouvelé, ouvert et efficace ». Décryptage avec Nicolas Lebourg, enseignant à l’université de Perpignan, historien et spécialiste de l’extrême droite.



Marine Le Pen en route pour les présidentielles de 2012. Ici, lors de la conférence de presse du 13 décembre au siège du Front national (au bord de la banqueroute), accusant les musulmans d'« occupation de l'espace public pour motif religieux ».

Saphirnews : Marine Le Pen succède à son père à la tête du FN, une victoire prévisible ?

Nicolas Lebourg : Marine le Pen a gagné avec près du deux tiers des voix exprimées. Il s’agit d’une victoire que je qualifierais de raisonnable. En effet, son élection ne faisait aucun doute, mais les interrogations portaient plutôt sur son score. Il y avait un risque d’explosion au sein du parti. Les partisans de Bruno Gollnisch, les militants d’extrême droite traditionnels, auraient pu partir.

Pourquoi un tel risque ?

N. L. : Marine Le Pen est allée très loin pour une partie de sa base. Le FN des années 1990 se positionne par son antisémitisme. Aujourd’hui, la nouvelle génération de militants se construit plutôt dans son opposition à l’islam. Un virage idéologique initié depuis 2002. Elle est même allée jusqu’à affirmer récemment que le FN n’avait jamais était antisémite. Des propos qui ne résistent pas à la relecture de l’histoire du parti. Cette nouvelle génération multiplie pourtant les gestes en faveur de la communauté juive au nom de la défense face à un ennemi commun : l’islam. La benjamine du clan Le Pen est habile. Elle a bien réussi à donner des gages aux deux tendances de son parti.

Elle a tenu des propos très violents envers les musulmans de France…

N. L. : Elle veut vendre le parti au système, c’est d’ailleurs une des choses qui lui sont reprochées par certains militants. Je ne pense pas qu’elle croit réellement aux propos qu’elle a tenus dans la presse. Il s’agit de provocations et de sorties sur des thèmes nouveaux et chers désormais au Front national. Les problèmes économiques actuels ne font que donner plus d’écho à ce discours.

Quelles pourraient être les conséquences de cette élection sur le monde politique ?

N. L. : Marine Le Pen sera candidate à l’élection présidentielle de 2012, avec l’intention de répéter le scénario du printemps 2002. Ses chances dépendront du profil de ses adversaires. En 2002, c’est Jacques Chirac lui-même qui avait fait la campagne du FN. De même, souvenez-vous, les propos de Valéry Giscard d’Estaing en 1991. Il avait alors comparé l’immigration à une invasion. Jean-Marie Le Pen était ensuite devenu la « personnalité politique préférée » des Français. L’UMP devrait avoir compris la leçon...