Société

Islamophobie, un terme employé par François Hollande qui s'impose

Rédigé par | Vendredi 16 Janvier 2015 à 16:00



Au lendemain de son discours prononcé à l’Institut du monde arabe (IMA), François Hollande a répété, vendredi 17 janvier, sa détermination « implacable » à vouloir lutter contre le racisme à l'occasion de ses vœux adressés au Corps diplomatique pour l'année 2015.

Dans ce passage du discours, que Saphirnews repère lors de son allocution en direct, il a de nouveau appelé à refuser les amalgames et a signifié la nécessité pour la France de protéger les citoyens dans leur ensemble. Fait notable, le chef de l’Etat a employé le terme « islamophobie » - plutôt que l'expression habituelle « actes anti-musulmans » - aux côtés des mots « racisme » et « antisémitisme ».

Ce fait, qui aurait pu passer inaperçu, paraît anodin tant le terme est largement compris sur le terrain pour désigner, sans ambiguïté, les actes de violence, de haine et de discrimination contre des institutions ou des individus en raison de leur appartenance, réelle ou supposée, à l’islam. C'est sans rappeler combien il est l’objet de débats souvent vifs ces dernières années en France.

Un mot qui dérange en France

Ses détracteurs, parmi lesquels Caroline Fourest sur qui le Premier ministre Manuel Valls s’appuye pour refuser l’emploi du mot, considèrent qu’il a été inventé par les mollahs iraniens dans les années 1970 pour empêcher toute critique de la religion. Son usage est également blâmé par la présence du suffixe « phobie » qui reviendrait à considérer l’islamophobie comme une peur incontrôlée envers l'islam.

Selon des experts, le terme est apparu dans les faits dès le début du 20e siècle. C'est dans les années 2000 qu'il fait son retour véritable pour être débattu dans le champ intellectuel et académique français. Pour les sociologues Marwan Muhammad et Abdellali Hajjat, auteurs du livre « Islamophobie : comment les élites françaises fabriquent le "problème musulman" », l’islamophobie est une conséquence de la construction du « problème musulman », à la source du processus de racialisation des musulmans qu’il est grand temps de combattre.

Doucement mais surement, le mot, porté par son usage courant à l'étranger, s’impose aujourd'hui dans la sphère médiatique en France. Les critiques n'ont pas pour autant disparu. Les pouvoirs publics ne l'utilisent encore que très rarement dans leurs discours.

Un enjeu de reconnaissance

Le terme est certes imparfait mais l'imposer dans le langage courant est primordial pour de très nombreux acteurs associatifs et militants dont le CCIF qui martèlent que l'accusation d'islamophobie ne vise pas ceux qui critiquent la religion. Une position que rappellent plusieurs acteurs engagés dans la thématique dans une tribune parue au Monde jeudi 15 janvier. « Plus que jamais, il faut combattre l’islamophobie », ont-il lancé.

Les débats qui entourent le mot révèle un enjeu premier, celui de la reconnaissance de ce fléau, en constante augmentation sur le sol français. Son non emploi est ainsi vécu par ceux qui portent la lutte comme un déni d’existence du phénomène et de son ampleur.

Après le geste symbolique de François Hollande, le débat sémantique - qui est aussi politique - serait-il en passe d'être tranché favorablement par les autorités ? La réponse à cette question ne devra pas faire oublier que les actions que doivent mener les services de l'Etat sur le terrain sont déterminants pour juger de la crédibilité des actuels discours d'apaisement bienvenus à l'égard des musulmans.



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur