Société

Jacques Toubon, Défenseur des droits pour tous sauf des femmes voilées

Rédigé par Maria Magassa-Konaté | Mercredi 9 Juillet 2014 à 18:30



Jacques Toubon, le nouveau Défenseur des droits.
Jacques Toubon a été nommé, mercredi 9 juillet, Défenseur des droits pour un mandat de six ans non renouvelable, après le vote organisé au sein des commissions des Lois de l’Assemblée nationale et du Sénat, L’ancien ministre de la Justice (UMP) a obtenu au total 48 voix pour (32 à l'Assemblée, 16 au Sénat), et 33 contre (19 à l'Assemblée, 14 au Sénat).

François Hollande, qui l’avait proposé à ce poste en remplacement de Dominique Baudis, décédé en avril dernier, s'était attiré les critiques d'une partie de la gauche qui dénonçait les prises de positions passées de Jacques Toubon.

Ce dernier, auditionné le 2 juillet par la commission des Lois de l'Assemblée en amont du vote de mercredi, s’est évertué à démonter les critiques dont il a été la cible. Accusé d'avoir rejeté la loi abolissant la peine de mort en 1981, il a rappelé qu’il avait « voté pour l'article premier abolissant la peine de mort, mais pas pour l'ensemble, car il n'y avait pas de peine de remplacement ». « Je ne suis pas l'homme que certains disent », s’est-il défendu, déplorant l'« anachronisme intellectuel » dont il serait victime.

Un défenseur de la circulaire Chatel

Devant les députés de la commission des Lois dont il a convaincu la majorité, l’homme a aussi exprimé une vision inquiétante pour l’égalité des droits. Interrogé par le député de la 4e circonscription des Bouches-du-Rhône Patrick Mennucci quant à sa position sur les mères voilées exclues des sorties scolaires, il a répondu être « favorable à l'application de la circulaire Chatel », relève-t-on.

« Nous nous devons d'être attentifs aux personnes qui entourent les enfants dans leurs activités éducatives. Cette question complexe se pose tant au ministre de l'Éducation nationale qu'aux inspecteurs d'académie, aux inspecteurs de l'éducation nationale et aux maires. Et ce n'est pas le Défenseur des droits qui s'opposera aux prérogatives dont disposent ces derniers », a-t-il argué. Alors qu’il est censé assurer la défense de tous contre toutes formes discriminations, il ne voit aucun mal à l’existence d’un traitement inégal contre les femmes voilées.

Un homme favorable à une nouvelle loi d'interdiction

« Je me réjouis de la décision de la Cour européenne des droits de l'homme relative à la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public. Je me félicite aussi de la décision de la Cour de cassation concernant la crèche Baby Loup (la dernière rendue le 25 juin, ndlr), même s'il est vrai que, ne traitant que du cas d'espèce, elle ne règle pas en principe la question. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'elle n'est pas contradictoire avec l'avis rendu par le Conseil d'État le 19 décembre 2013 », a également déclaré Jacques Toubon. L'ancien ministre a été de ceux qui ont signé, en mars 2013, une pétition appelant à une loi d'interdiction du voile dans les structures d'accueil de la petite enfance.

Sa position sur le voile n’augure rien de bon sur l’impulsion qui compte donner à l’institution qu'il dirige à présent, même s’il dit vouloir faire « la guerre à l'injustice, injustice ressentie, injustice subie, qui naît de l'inégalité et qui ne peut être vaincue que par une réelle égalité des droits ». Sa nomination - mauvaise nouvelle pour les femmes musulmanes discriminées - sera inscrite à l'ordre du jour du conseil des ministres, mercredi 16 juillet.

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