Juifs et musulmans peuvent-ils s’entendre ? Peuvent-ils dialoguer ensemble ? Ont-ils seulement des points communs ?
C’est à toutes ces interrogations aussi délicates qu’urgentes, que ce nouvel ouvrage, publié par les éditions La Découverte, tente de répondre, sous la direction d’Esther Benbassa et de Jean-Christophe Attias. On se souvient de leur remarquable travail, organisé il y a quelques semaines, sur le Pari(s) du vivre-ensemble, qui avait réuni sept jours durant, le tout-paris sur la question des discriminations
« Juifs et musulmans, une histoire partagée, un dialogue à construire » est en fait la mise en texte d’une série de rencontres qui se sont déroulées le 13 mai 2004 à la Sorbonne et à l’Institut du monde arabe. Face au succès de ces rencontres, l’idée d’en faire un livre a rapidement germé dans l’esprit de ses auteurs.
Le résultat final est un ouvrage que l’on peut diviser en deux parties. Une première étape présente les réflexions et les interventions, sous la forme de chapitres, de cinq personnes, Pierre Lory, Jean-Christophe Attias, Michel Abitbol, Esther Benbassa et Elias Sanbar, respectivement directeur d’études en sciences religieuses sur l’islam, directeur d’études en sciences religieuses sur le judaïsme rabbinique à l’Ecole pratique des hautes études, professeur à l’Université hébraïque de Jérusalem, directeur d’études en sciences religieuses sur le judaïsme moderne à l’Ecole pratique des hautes études et directeur de la Revue d’études palestiniennes.
Ces interventions écrites abordent la question des rapports judéo-musulmans à travers l’histoire, depuis l’avènement de l’islam jusqu’aux banlieues françaises d’aujourd’hui.
C’est à toutes ces interrogations aussi délicates qu’urgentes, que ce nouvel ouvrage, publié par les éditions La Découverte, tente de répondre, sous la direction d’Esther Benbassa et de Jean-Christophe Attias. On se souvient de leur remarquable travail, organisé il y a quelques semaines, sur le Pari(s) du vivre-ensemble, qui avait réuni sept jours durant, le tout-paris sur la question des discriminations
« Juifs et musulmans, une histoire partagée, un dialogue à construire » est en fait la mise en texte d’une série de rencontres qui se sont déroulées le 13 mai 2004 à la Sorbonne et à l’Institut du monde arabe. Face au succès de ces rencontres, l’idée d’en faire un livre a rapidement germé dans l’esprit de ses auteurs.
Le résultat final est un ouvrage que l’on peut diviser en deux parties. Une première étape présente les réflexions et les interventions, sous la forme de chapitres, de cinq personnes, Pierre Lory, Jean-Christophe Attias, Michel Abitbol, Esther Benbassa et Elias Sanbar, respectivement directeur d’études en sciences religieuses sur l’islam, directeur d’études en sciences religieuses sur le judaïsme rabbinique à l’Ecole pratique des hautes études, professeur à l’Université hébraïque de Jérusalem, directeur d’études en sciences religieuses sur le judaïsme moderne à l’Ecole pratique des hautes études et directeur de la Revue d’études palestiniennes.
Ces interventions écrites abordent la question des rapports judéo-musulmans à travers l’histoire, depuis l’avènement de l’islam jusqu’aux banlieues françaises d’aujourd’hui.
Un dialogue difficile
Si les textes sont riches d’informations et d’anecdotes sur ces rapports entre juifs et musulmans, retraçant les influences mutuelles et les réalisations scientifiques tout autant que les différences voire les oppositions réciproques, on ressort de cette lecture plus ou moins déçu. Le livre n’atteint pas tout à fait les objectifs qu’il s’assigne, notamment dans son traitement, pas véritablement équilibré, de ces relations inter-confessionnelles. Au gré des pages, on retrouve constamment cette image du Juif victime, d’une manière ou d’une autre de son altérité par l’Autre musulman.
Tout semble indiquer l’obsession et le ressentiment que les musulmans nourriraient vis-à-vis de leurs adversaires juifs, dès l’émergence de l’islam. Le Prophète aurait ainsi, selon Pierre Lory, tout fait pour se rapprocher des juifs de Médine, pour les convaincre de sa messianité. De nombreux éléments de la pratique religieuse musulmane sont interprétés exclusivement en fonction de la position religieuse juive comme l’adoption puis l’abandon de Jérusalem comme direction de prière par les fidèles musulmans. Les nombreux conflits judéo-musulmans, où des tribus juives ont trouvé la mort, sont présentés comme des opérations politiques d’éliminations physiques.
Un peu plus loin, les réformistes musulmans auraient déjudaïsé la tradition musulmane en extirpant un certain nombre de récits de sources juives, jugés défaillants.
L’époque contemporaine, marquée par le conflit israëlo-palestinien importé, dit-on, en France, n’échappe pas à ce développement d’un antisémitisme, présent dans toutes les couches de la société et donc, aussi, dans les milieux arabo-musulmans.
On a donc, dessiné au fil des lignes, par petites touches, le portrait global de musulmans qui, au gré des circonstances historiques, ne seront pas parvenus pas à éviter la tentation antisémite.
Cette image subliminale, et tout en filigrane, est d’autant plus regrettable que les dérives de la communauté juive de France, sont à peine évoquées. Certes, « l’instrumentalisation de l’antisémitisme par une frange du leadership juif » est bien soulignée par Esther Benbassa. Mais rien sur les propos islamophobes de représentants communautaires ou d’intellectuels juifs, à l’instar des fréquentes déclarations de Roger Cukierman, actuel président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), sur la dangerosité des musulmans de France, qui avaient été reprises par Sharon dans son fameux appel vers les juifs de France. Rien non plus sur le rapprochement plutôt visible de cette même institution avec Philippe de Villiers, le chantre de la lutte contre l’islamisation de la France, invité et célébré pour son courageux combat. On pourrait aussi rappeler les propos dangereux tenus par un BHL ou un Finkielkraut.
Cette absence, au-delà du principe de réciprocité, ne peut que donner à penser que les musulmans demeurent responsables de cette situation conflictuelle et les juifs, seules victimes.
Tout semble indiquer l’obsession et le ressentiment que les musulmans nourriraient vis-à-vis de leurs adversaires juifs, dès l’émergence de l’islam. Le Prophète aurait ainsi, selon Pierre Lory, tout fait pour se rapprocher des juifs de Médine, pour les convaincre de sa messianité. De nombreux éléments de la pratique religieuse musulmane sont interprétés exclusivement en fonction de la position religieuse juive comme l’adoption puis l’abandon de Jérusalem comme direction de prière par les fidèles musulmans. Les nombreux conflits judéo-musulmans, où des tribus juives ont trouvé la mort, sont présentés comme des opérations politiques d’éliminations physiques.
Un peu plus loin, les réformistes musulmans auraient déjudaïsé la tradition musulmane en extirpant un certain nombre de récits de sources juives, jugés défaillants.
L’époque contemporaine, marquée par le conflit israëlo-palestinien importé, dit-on, en France, n’échappe pas à ce développement d’un antisémitisme, présent dans toutes les couches de la société et donc, aussi, dans les milieux arabo-musulmans.
On a donc, dessiné au fil des lignes, par petites touches, le portrait global de musulmans qui, au gré des circonstances historiques, ne seront pas parvenus pas à éviter la tentation antisémite.
Cette image subliminale, et tout en filigrane, est d’autant plus regrettable que les dérives de la communauté juive de France, sont à peine évoquées. Certes, « l’instrumentalisation de l’antisémitisme par une frange du leadership juif » est bien soulignée par Esther Benbassa. Mais rien sur les propos islamophobes de représentants communautaires ou d’intellectuels juifs, à l’instar des fréquentes déclarations de Roger Cukierman, actuel président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), sur la dangerosité des musulmans de France, qui avaient été reprises par Sharon dans son fameux appel vers les juifs de France. Rien non plus sur le rapprochement plutôt visible de cette même institution avec Philippe de Villiers, le chantre de la lutte contre l’islamisation de la France, invité et célébré pour son courageux combat. On pourrait aussi rappeler les propos dangereux tenus par un BHL ou un Finkielkraut.
Cette absence, au-delà du principe de réciprocité, ne peut que donner à penser que les musulmans demeurent responsables de cette situation conflictuelle et les juifs, seules victimes.
Une initiative courageuse
La seconde partie de l’ouvrage, il faut le souligner, est plus ouverte au dialogue, plus équilibrée. Il s’agit de la retranscription des débats animés autour des relations judéo-musulmanes à la lumière du conflit israëlo-palestinien et de la montée des racismes en France.
La diversité des invités et la possibilité de réaction aux différentes interventions donne une teneur plus harmonieuse à ce débat. Elle resitue dans leur contexte, les difficultés réciproques de la question palestinienne, admet les insuffisances et va au cœur des contradictions d’un processus que tout le monde sait figé. On regrettera seulement l’absence de représentant communautaire musulman à ce débat, auquel ont participé des intellectuels de confession musulmane.
Au-delà de ses omissions, de ses erreurs ou de ses déséquilibres, ce que l’on retiendra de ce livre sera sa tentative courageuse, dans le contexte actuel, d’établir et d’initier un dialogue franc et juste entre deux communautés qui ont vécu et vivront encore, longtemps, ensemble.
La diversité des invités et la possibilité de réaction aux différentes interventions donne une teneur plus harmonieuse à ce débat. Elle resitue dans leur contexte, les difficultés réciproques de la question palestinienne, admet les insuffisances et va au cœur des contradictions d’un processus que tout le monde sait figé. On regrettera seulement l’absence de représentant communautaire musulman à ce débat, auquel ont participé des intellectuels de confession musulmane.
Au-delà de ses omissions, de ses erreurs ou de ses déséquilibres, ce que l’on retiendra de ce livre sera sa tentative courageuse, dans le contexte actuel, d’établir et d’initier un dialogue franc et juste entre deux communautés qui ont vécu et vivront encore, longtemps, ensemble.