Economie

KFC non halal ? La polémique enfle en Grande-Bretagne

Un boycott national à craindre ?

Rédigé par | Vendredi 23 Avril 2010 à 20:22

Alors que les musulmans de France ne sont plus aussi convaincus que le poulet made in KFC soit halal au vu du reportage censuré sur M6 et diffusé le 1er avril sur le Net, c’est au tour des KFC britanniques d’être sur le grill des musulmans comme des non-musulmans.



L'enseigne KFC dite « halal », en Grande-Bretagne, bientôt boycottée ?
KFC, la deuxième plus grande enseigne de restauration rapide outre-Manche, a récemment annoncé que 86 points de vente du pays sont désormais entièrement halal. Comme Quick France qui a décidé depuis octobre dernier de tester le halal dans huit de ses franchises jusqu'au 30 mai, KFC souhaite aussi que la période de test s’étale sur plusieurs mois.

À première vue, cette décision est une bonne nouvelle en soi pour les 2,4 millions de musulmans britanniques, qui se retrouvent d’un coup avec une liste de 86 KFC entre les mains pour manger halal. Contrairement aux KFC de France, leurs voisins d'outre-Manche s’affichent volontiers halal. Sauf qu’une partie de plus en plus grande de la communauté musulmane affirme que les poulets vendus par KFC ne sont pas abattus selon les principes de la religion musulmane.

En cause, la méthode utilisée par KFC et approuvée par l'Autorité de l'alimentation halal en Grande-Bretagne, le Halal Food Authority (HFA), un organisme de certification halal bien connu en Grande-Bretagne, qui certifie les poulets des restaurants de KFC.

Le HFA est on ne peut plus clair sur son site Internet. Leur charte autorise l’abattage mécanisé et l’étourdissement préalable avant la saignée, que les responsables jugent licites à condition, entre autres, que des sacrificateurs soient présents pour prononcer la « tasmiya » (« bismillah » ou « au nom d’Allah ») à l’abattage de chaque animal ainsi béni.

Des pratiques décriées mais que le HFA justifie

Selon le HFA, la présence des sacrificateurs n’est obligatoire que pour la « tasmiya », nécessaire afin que la viande soit propre à la consommation des musulmans. Elle n’autorise en aucun cas la présence de cassettes préenregistrées remplaçant la présence humaine. « La seule différence entre l'abattage manuel et l'abattage mécanique est que le couteau manuel utilisé par les sacrificateurs a été transformé en une lame fixe accomplissant la même tâche », lit-on sur le site de HFA.

Contrairement à la Commission britannique de contrôle du halal (Halal Monitoring Committee), le HFA fait valoir que les progrès technologiques signifient que les méthodes d'abattage doivent changer, faisant ainsi une apologie à l’industrialisation du halal. Quant à l’étourdissement préalable, l’organisme de certification affirme garantir que cette pratique ne fait ni souffrir l’animal ni ne le tue, la bête devant rester vivante avant son égorgement.

Or un grand nombre d’avis religieux (fatwas) n’autorise pas l’assommage en raison du trop grand risque de mort et de souffrance infligée à l’animal.

Pas étonnant que le représentant du Conseil des mosquées du Lancashire, au nord de l’Angleterre, menace KFC d’un boycott national si les méthodes d’abattage ne sont pas revues. Mais KFC persiste et signe : l'entreprise ne se reproche rien puisqu'elle ne fait qu’adopter les méthodes du HFA.

Comme en France, la norme halal nationale n’est pas pour demain.

Les non-musulmans montent aussi au créneau

Le boycott est une idée qu’exploitent aussi les clients non musulmans de l’enseigne, dont une partie fustige la décision de KFC d’enlever de ses cartes les menus à base de porc dans les restaurants halal. Pour calmer les ardeurs, la marque déclare, sur son site, avoir pris de mesures « afin de veiller que les restaurants halal soient situés dans un rayon de 7 miles (environ 11 km, ndlr) autour d’un KFC non halal afin de répondre à l'ensemble des besoins des clients ».

Mais rien n’y fait. Des groupes Facebook ont d’ores et déjà été créés. « Against the KFC halal trial » et « No halal at Colne KFC » (situé au Lancashire) rassemblent respectivement près de 1 500 et 3 000 membres, prêts à boycotter la chaîne de restauration. Pour le moment, KFC maintient le cap. Finira-t-elle par céder sous la pression des deux parties de sa clientèle ?




Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur