La fête commémorant le sacrifice du prophète Ibrahim aura lieu, au final, le jeudi 20 janvier. Le CFCM qui avait dans premier temps annoncé la date du vendredi 21 janvier en se conformant aux déclarations du royaume de l’Arabie Saoudite avait été induit en erreur.* Ce changement de date n’est pas sans conséquence. L’organisation de l’office religieux risque d’être perturbé car beaucoup de mosquées ont déjà réservé leur salle pour accueillir les fidèles. Sans parler de la suppression des abattoirs mobiles qui risque de durcir les conditions d’abattage déjà folkloriques pour des millions de fidèles souhaitant reproduire le geste du prophète Ibrahim.
Pour les musulmans de France, 2005 entonnera le même désagréable refrain qu’ils connaissent maintenant par cœur : pas de mouton pour tous.
La célébration de l’une des deux grandes fêtes du calendrier musulman, en souvenir du sacrifice d’une bête (bélier ou mouton) par le Prophète Ibrahim, sur ordre de Dieu, en substitution de celle de son propre fils Ismaël, aura donc lieu le 10 du mois de Dhul-Hijja 1425, soit le jeudi 20 janvier 2005. Et comme chaque année, en la même occasion, le nombre insuffisant d’abattoirs mis à disposition des fidèles fera office de trouble fête.
De curieux blocages administratifs
Sur ce plan-là, 2005 sera même pire que 2004. L’an dernier, des abattoirs mobiles avaient pu être mis en place, notamment en Ile de France, qui regroupe une grande partie des 5 à 6 millions de musulmans de France. Cette année, l’expérience ne sera pas ' reconduite ' selon les termes policés du communiqué des Conseils régionaux du culte musulman (CRCM) d’Ile-de-France Centre, Est et Ouest. Selon une source de ces CRCM, 'des blocages provenant de plusieurs employés préfectoraux ' seraient à l’origine de cette déconvenue. On savait, depuis l’arrêt du Conseil d’Etat du 10 octobre 2001 interdisant à tout site dérogatoire autres que ceux dits ' aménagés ', que les pouvoirs publics avaient durci la législation administrative en ce domaine, prétextant la moindre faille pour invoquer l’interdiction. Quelques sites tels que ceux de Bourg, Bellegarde, Hotonnes ou Aumont-en-Halatte en avaient fait les frais. Sans que des solutions de rechange soient proposées pour pratiquer librement et dignement ce culte.
Le prix du mouton flambe
Sur les 9 abattoirs franciliens, trois sont municipaux (Meaux, Montereau, Mantes-la-jolie). Les autres sont privés. Aucune initiative particulière ne semble avoir été prise pour faire face à la demande massive des franciliens. Une situation inquiétante pour les présidents des CRCM Ile de France qui se sont empressés de rappeler le béaba des règles régissant le sacrifice, en neuf points. Des remarques qui reflètent précisément les préoccupations liées aux difficultés matérielles et structurelles des conditions d’abattage. Les règles rituelles de sacrifice devant survenir seulement après la prière de l’Aïd et sur une période de trois jours, y sont soulignées. En effet, une tendance à sacrifier des bêtes avant même la prière, ce qui annule la valeur du sacrifice, avait été constatée ces dernières années. Le respect des ' normes de sécurité et sanitaire ' et la possibilité pour des boucheries Hallal respectant les règles d’abattage rituel, d’'être chargées du sacrifice (..) afin d’éviter les abattages clandestins accomplis souvent dans des conditions condamnables ' sont aussi évoqués. La seule alternative proposée aux musulmans de France étant la possibilité de faire don à des organismes caritatifs musulmans du prix de la bête, pour permettre à des déshérités de l’accomplir à leur place. Enfin, les CRCM appellent les commerçants à ne pas augmenter abusivement les tarifs de leurs bêtes. Un appel resté lettre morte. Les prix ne cessent d’augmenter ces dernières années, atteignant jusqu’à 300 euros le mouton, pour 70 euros le reste de l’année.
Boycotter les spéculateurs
Pourtant, un appel au boycott permettrait aux fidèles de voir les prix baisser, la demande baissant elle-même. Des associations musulmanes hollandaises locales y seraient parvenues, selon le site Internet Tariq Al Hallal. Rien ne semble indiquer qu’un tel appel puisse voir le jour en France. Les associations ou fédérations musulmanes sont trop divisées et timorées pour suivre un tel appel. Quant aux problèmes d’abattoirs, il semble vain de croire que les CRCM ou le CFCM puissent les régler. Il s’agit là autant d’un problème de fonds financiers que de blocages politiques. A moins de consentir à se déplacer loin de l’Ile de France, il paraît clair que cette année encore l’abstinence festive sera de mise pour de nombreux français musulmans. En attendant 2006 ?
* Article modifié le samedi 15 janvier 2005