Jakarta – Avec le Nouvel An chinois, le 10 février, l’Indonésie a l’opportunité de reconsidérer ce qui, fondamentalement, défini son identité nationale.
L’Indonésie, la plus grande population musulmane du monde et le pays archipélagique le plus vaste de la planète, comprend diverses ethnies, y compris des Chinois, qui font partie de la diversité du pays depuis le XVe siècle (bien avant que l’Indonésie ne devienne un pays en déclarant son indépendance des Néerlandais en 1945).
Avant 1965, alors que l’Indonésie était dirigée par son premier président, Soekarno, le Nouvel An chinois était célébré ouvertement par le peuple à travers le pays.
Je me souviens du Nouvel An chinois en Indonésie célébré alors que j’étais enfant. Des semaines avant les vacances, les restaurants, les magasins, les marchés et les rues étaient parés avec des lanternes, des bannières et des affiches. Partout où vous alliez, des nuances de rouge de différents aspects et formes vous englobaient dans une gaîté criarde.
Gongxi Gongxi, la chanson traditionnelle du Nouvel An chinois, remplissait l’air. Ses rythmes étaient évocateurs des festivités attendues avec impatiences. La nuit était sporadiquement interrompue par des pétards et des feux d’artifices. A la maison, les femmes pressaient les gaufrettes triangulaires croustillantes, le « fortune cookie » (gâteau de riz renfermant une devise) de l’occasion, et enfournaient un assortiment de cakes.
Mais sous le règne de Soeharto, qui fût président de 1965 à 1999, on a essayé de créer une identité indonésienne unifiée en bannissant la langue, les célébrations et même les noms chinois.
Zoom avant sur 1999 : le nouveau président élu, Gus Dur, restitue aux Chinois d’Indonésie le droit de célébrer le Nouvel An chinois. Puis, cinq ans plus tard, en 2004, le président Megawati prononce officiellement le Nouvel An chinois comme jour de congé national.
Mais, le temps que les lois, s’opposant à l’expression culturelle des Chinois soient levées, beaucoup a été perdu. Ceux qui ont grandi dans cet intervalle de temps ont largement abandonné leurs origines culturelles ethniques, avec seulement quelques poches de résistance survivant au sein des populations du Medan, province de Sumatra du Nord, celle d’une île de la côte est de Sumatra appelée Belitung et celle de Singkawang dans Kalimatan-Ouest, qui ont su conserver les vestiges de leur héritage.
Aujourd’hui, je m’inquiète du fait que mes enfants et mes petits enfants ne pourront peut-être jamais faire l’expérience des festivités du Nouvel An chinois telles que je les ai vécues dans mon enfance. Ils ne pourront peut-être jamais vivre l’éveil des maisons au point du jour, ni les chansons du Nouvel An avec leurs accents mélodiques perpétuels, les enveloppes rouges transmises cérémonieusement aussi bien aux enfants de la famille qu’à ceux des voisins qui timidement frappaient à la porte, chacun habillés sur son trente et un. Jamais il n’y avait le moindre conflit durant une occasion aussi propice. Encouragements et cordialités constituaient les inclinations du jour.
Ce qui a été perdu peut difficilement être attribué à une fierté nationale rationalisée. L’un des fils du tissu coloré de la nationalité indonésienne a été perdu. Dans une nation qui se vante d’une myriade d’ethnies, l’Indonésie peut parfaitement bénéficier de son côté hybride plutôt que d’une uniformité culturelle impossible.
Toutefois il y a de l’espoir pour le futur. Nous assisterons peut-être au retour des clubs sociaux dans lesquels les Chinois d’Indonésie pourraient apprendre à lire, à cuisiner, à chanter et à jouer de la musique ou encore apprendre le délicat art du papier découpé. Peut être y a-t-il encore quelques anciens qui peuvent aider à faire passer à leurs enfants les histoires importantes qui concernent leur histoire familiale, qui peuvent les guider au travers des rites d’une cérémonie et leur apprendre comment préparer des médicaments traditionnels à la maison.
Plus important encore, peut-être verrons nous un retour des réunions familiales, des efforts collaboratifs afin d’organiser les dîners du réveillon et l’invitation aux voisins afin de partager ces festivités.
Avec la capacité des Indonésiens à vivre les célébrations de leurs concitoyens, peut-être cela éveillera-t-il la curiosité des jeunes Indonésiens, de nos enfants et de nos petits-enfants et cela les poussera à découvrir la richesse culturelle du pays.
Enfin, avec l’émancipation arrive l’égalité et, avec l’égalité, l’intégration sociale de beaucoup de groupes ethniques indonésiens. Cela s’observe déjà clairement dans le mélange insouciant des diverses populations d’Indonésie sur les campus universitaires, sur les lieux de travail et dans les zones résidentielles.
Et, si nous sommes patients, peut-être pourrons-nous voir à nouveau quelques gaufrettes triangulaires.
* Richard Oh est un romancier et un réalisateur basé à Jakarta.
L’Indonésie, la plus grande population musulmane du monde et le pays archipélagique le plus vaste de la planète, comprend diverses ethnies, y compris des Chinois, qui font partie de la diversité du pays depuis le XVe siècle (bien avant que l’Indonésie ne devienne un pays en déclarant son indépendance des Néerlandais en 1945).
Avant 1965, alors que l’Indonésie était dirigée par son premier président, Soekarno, le Nouvel An chinois était célébré ouvertement par le peuple à travers le pays.
Je me souviens du Nouvel An chinois en Indonésie célébré alors que j’étais enfant. Des semaines avant les vacances, les restaurants, les magasins, les marchés et les rues étaient parés avec des lanternes, des bannières et des affiches. Partout où vous alliez, des nuances de rouge de différents aspects et formes vous englobaient dans une gaîté criarde.
Gongxi Gongxi, la chanson traditionnelle du Nouvel An chinois, remplissait l’air. Ses rythmes étaient évocateurs des festivités attendues avec impatiences. La nuit était sporadiquement interrompue par des pétards et des feux d’artifices. A la maison, les femmes pressaient les gaufrettes triangulaires croustillantes, le « fortune cookie » (gâteau de riz renfermant une devise) de l’occasion, et enfournaient un assortiment de cakes.
Mais sous le règne de Soeharto, qui fût président de 1965 à 1999, on a essayé de créer une identité indonésienne unifiée en bannissant la langue, les célébrations et même les noms chinois.
Zoom avant sur 1999 : le nouveau président élu, Gus Dur, restitue aux Chinois d’Indonésie le droit de célébrer le Nouvel An chinois. Puis, cinq ans plus tard, en 2004, le président Megawati prononce officiellement le Nouvel An chinois comme jour de congé national.
Mais, le temps que les lois, s’opposant à l’expression culturelle des Chinois soient levées, beaucoup a été perdu. Ceux qui ont grandi dans cet intervalle de temps ont largement abandonné leurs origines culturelles ethniques, avec seulement quelques poches de résistance survivant au sein des populations du Medan, province de Sumatra du Nord, celle d’une île de la côte est de Sumatra appelée Belitung et celle de Singkawang dans Kalimatan-Ouest, qui ont su conserver les vestiges de leur héritage.
Aujourd’hui, je m’inquiète du fait que mes enfants et mes petits enfants ne pourront peut-être jamais faire l’expérience des festivités du Nouvel An chinois telles que je les ai vécues dans mon enfance. Ils ne pourront peut-être jamais vivre l’éveil des maisons au point du jour, ni les chansons du Nouvel An avec leurs accents mélodiques perpétuels, les enveloppes rouges transmises cérémonieusement aussi bien aux enfants de la famille qu’à ceux des voisins qui timidement frappaient à la porte, chacun habillés sur son trente et un. Jamais il n’y avait le moindre conflit durant une occasion aussi propice. Encouragements et cordialités constituaient les inclinations du jour.
Ce qui a été perdu peut difficilement être attribué à une fierté nationale rationalisée. L’un des fils du tissu coloré de la nationalité indonésienne a été perdu. Dans une nation qui se vante d’une myriade d’ethnies, l’Indonésie peut parfaitement bénéficier de son côté hybride plutôt que d’une uniformité culturelle impossible.
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