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L’Initiave de Genève, forces et faiblesses

Rédigé par OURABAH Sofiane | Mardi 2 Décembre 2003 à 00:00

L'initiative de Genève est un projet non officiel de règlement du conflit israélo-palestinien. Lancée solennellement hier, lundi, en présence de centaines de personnalités venues du monde entier, ce projet d’accord divise la population israélienne, mais aussi le peuple palestinien. A défaut d’apporter des solutions viables pour les deux partis, cette démarche a le mérite de relancer le débat sur le processus de paix en Palestine. Car la mise en application de ce nouveau plan de paix intervient à un moment où les discussions entre Israéliens et Palestiniens sont bloquées.



L'Initiative de Genève est un projet non officiel de règlement du conflit israélo-palestinien. Lancé solennellement hier, lundi, en présence de centaines de personnalités venues du monde entier, ce projet d’accord divise la population israélienne, mais aussi le peuple palestinien. A défaut d’apporter des solutions viables pour les deux partis, cette démarche a le mérite de relancer le débat sur le processus de paix en Palestine. Car la mise en appliquant de ce nouveau plan de paix intervient à un moment où les discussions entre Israéliens et Palestiniens sont bloquées.

Vers une reconnaissance réciproque
L’Initiative de Genève stipule que Israël reconnaît un Etat palestinien (Palestine) qui reconnaîtra Israël. Les deux parties reconnaissent ces Etats comme les patries des deux peuples.
Le tracé des frontières est basé sur les lignes du 4 juin 1967. Selon une carte incluse dans l'accord, les Palestiniens obtiennent environ 97,5% des territoires occupés par Israël en 1967 (dont toute la bande de Gaza) et, en contrepartie des 2,5% restants (situés en Cisjordanie), reçoivent des territoires d'une superficie égale en Israël.
Les colons habitant les territoires sous souveraineté palestinienne seront réinstallés en Israël. Bâtiments et infrastructures seront remis intacts à l'Etat palestinien.

Selon la carte, la plupart des colonies seront évacuées (soit environ 160 implantations regroupant environ 230.000 résidents), à l'exception de celles composant le bloc du Goush Etzion, au sud de Jérusalem, et de certaines implantations à la périphérie de Jérusalem-est ou limitrophes du territoire israélien.

Les deux parties reconnaissent aussi 'la nécessité d'un accord mutuel sur la question des réfugiés', sans pour autant mentionner le 'droit au retour' des réfugiés palestiniens de la guerre de 1948 et de leurs descendants, soit près de quatre millions de personnes. Les réfugiés pourront s'établir dans le nouvel Etat palestinien ou dans des pays tiers. Certains d’entre eux pourront revenir en Israël, mais l'Etat d’Israël sera seul souverain pour décider de leur nombre que l’on imagine très réduit. Selon Yossi Beilin, le principal promoteur israélien de l'accord, ce nombre n’excéderait pas 30.000 personnes.

Jérusalem restera divisée
Israël et l'Etat palestinien auront leurs capitales 'dans les secteurs de Jérusalem placés sous leurs souverainetés respectives'. Selon les cartes de l’accord, les Palestiniens auront la souveraineté sur la Vieille Ville, située dans la partie orientale (arabe) de la ville, à l'exception du quartier juif et du Mur des Lamentations. Presque tous les quartiers de colonisation juifs créés depuis 1967 dans la partie est seront sous souveraineté israélienne. L'Esplanade des Mosquées sera sous souveraineté palestinienne avec un libre accès pour tous, supervisé par une force internationale. Mais les juifs n'auront pas le droit de prier sur ce lieu, qu'ils appellent le mont du Temple. Les fouilles archéologiques ne seront pas autorisées sur le site sans accord des deux parties.

Les deux parties rejettent le terrorisme et la violence sous toutes leurs formes et poursuivront des politiques conformes à ces principes. Une force multinationale sera créée pour garantir l'application de l'accord. La Palestine sera un Etat démilitarisé et les passages frontaliers seront supervisés par la force multinationale.

Tous les détenus palestiniens emprisonnés avant mai 1994 pour des actes liés au conflit seront immédiatement libérés, ainsi que tous les enfants, les femmes et les détenus en mauvaise santé.

Le soutien international est acquis
L'ancien ministre israélien de la Justice Yossi Beilin et l'ancien ministre palestinien de l'Information Yasser Abed Rabbo, les deux principaux promoteurs du document, ont appelé les gouvernements israélien et palestinien à endosser leur projet.

Le but déclaré de MM. Beilin et Abed Rabbo, qui ne disposent ni l'un ni l'autre d'aucun mandat officiel pour négocier, est de relancer l'espoir d'un règlement après trois années d'Intifada. Les discussions entre les deux gouvernements sont actuellement au point mort. 'Si vous acceptez l'objectif final dans l'esprit de Genève, il vous sera plus facile d'appliquer les deux premières phases de la Feuille de route et de parvenir à une paix durable', a estimé M. Beilin.
'C'est une solution simple à un problème compliqué, c'est la seule solution possible', a déclaré M. Abed Rabbo.

Trois prix Nobel de la paix participaient à l'événement : l'ancien président polonais Lech Walesa, l'Irlandais John Hume et l'ex-président sud-africain Nelson Mandela, qui devait intervenir par le biais d'un message vidéo.

Du fait du caractère non officiel de l'Initiative, les représentants d’Etats se sont abstenus de le soutenir ouvertement.

Palestiniens et Israéliens refusent l’accord
Si elle bénéficie de nombreux soutiens internationaux, l'Initiative de Genève divise profondément les opinions aussi bien en Israël qu’en Palestine. Rejetée sans appel par le Premier ministre israélien Ariel Sharon, l'Initiative de Genève est soutenue de manière ambiguë par le président de l'Autorité palestinienne, Yasser Arafat, contre l'avis de son propre parti, le Fatah, et des principaux autres groupes palestiniens, le Hamas et le Djihad islamique, tous ouvertement hostiles au document.

Dans les territoires palestiniens, où les adversaires de l'Initiative avaient multiplié pressions et intimidations sur leurs partisans palestiniens pour tenter de les dissuader d'aller à Genève, de nouvelles manifestations hostiles ont eu lieu lundi.

'Non à la trahison, non aux traîtres', ont scandé près de 1.500 manifestants dans le camp de réfugiés de Jabaliya, dans le nord de la bande de Gaza, à l'appel du Hamas. D'autres manifestations et colloques contre l'Initiative ont eu lieu à Gaza, à Ramallah et à Naplouse.
Selon un sondage publié lundi par le quotidien Haaretz, 38% des Israéliens sont contre l'Initiative, 31% la soutiennent.