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Points de vue

L’avenir du programme nucléaire iranien

Traduit du site aljazeera.net par Elmahdi ALLOUCHI

Rédigé par Mokhtar Chankiti | Mardi 31 Janvier 2006 à 00:00

           

La crise engendrée actuellement par le programme nucléaire iranien, qui vise sans vraiment le dire la détention de la bombe atomique, met tout le monde en ébullition, et pour cause ! un enjeu de taille : soit l’Iran sortira fort de cette crise, c’est alors que l’ami ou l’ennemi devrait savoir compter et inclure les nouveaux paramètres dans la nouvelle équation de force ; soit l’Iran sortira affaibli et en désarroi économique et stratégique et pourrait alors vivre un nouveau cauchemar irakien de ces deux dernières décennies.



L’avenir du programme nucléaire iranien
Si les iraniens réussissent à mettre au point une puissance nucléaire, ils seront capables de repousser tout tentation belliqueuse ennemie et leur poids régional et international ne ferra qu’augmenter, ils casseront toute barrière tendant à leur isolement dans un monde qui ne jure que par la loi de la force sous couvert de valeurs éthiques universelles respectueuses des droits et de la coexistence pacifique inter-humaine .

En revanche, si l’Iran perd son défi, la fierté légendaire des perses fondra telle que de la neige au soleil, et ce sera probablement le début de la fin de la révolution islamique et de ses visées dans la région, l’Iran sera alors soumis au diktat infernal des grandes puissances de ce monde, les états unis et Israël en tête.

Dans cette équation à deux inconnus, le pire comme le meilleure demeurent probables à l’avenir, cependant plusieurs facteurs rentrent en jeu : à savoir la volonté des dirigeants iraniens, les réactions américaines et israéliennes, le capacité à détruire le parc industriel nucléaire iraniens, le prix de ces éventuelles destructions si celles ci auront lieu un jour et enfin la position de la communauté internationale par rapport au sujet.

Les israéliens voient dans l’émergence de l’atome iranien une spoliation pure et simple de leur suprématie dans la région en temps de paix et une menace pour l’existence de leur état en temps de guerre, il font une lecture militaire de la situation.

Quand aux américains, qui savent que le programme nucléaire iranien ne constitue pas de menace directe pour leur pays, mais pris à long terme d’un point de vue stratégique, cela pourrait s’avérer une menace militaire pour leurs intérêts dans la région du golf et le moyen orient où l’influence américaine qui a plané depuis les années trente sur la région pourrait tout simplement disparaître, on peut préciser que parmi les craintes réelles des américains figurent :

1° ) l’Iran atomique sera un concurrent directe des américains dans la région, avec qui ils doivent composer dans leur comportement politique, car il n’y a pas de place à la confrontation dans une même zone pour deux concurrents détenant les armes atomiques.

2° )les monarchies pétrolières du golf qui se sont placées sous la protection des forces américaines voilà sept décennies et certains petits pays musulmans d’Asie placés ces dernières années sous le parapluie américain pourraient changer d’attitude du jour au lendemain eu égard à la nouvelle réalité des rapports de force.

3° ) la tentation pour l’Iran de se lancer dans une alliance constituée de pays tels que le Pakistan, la Turquie, l’Irak, l’Arabie saoudite ayant pour objectif la constitution d’un bloc islamique ayant son poids militaire, économique et politique, avec l’intention de voir s’opérer des changements à la tête de certains de ces régimes.

4° ) la dernière crainte des états unis est de voir l’Iran s’allier à la chine, une telle possibilité pourrait ressembler à une nouvelle alliance internationale en Asie, et entraver les efforts d’extensions américains aux pays asiatiques ce qui a pour conséquence de mettre en péril la domination américaines au proche et au moyen orient

les conditions d’une frappe efficace et ciblée des installations nucléaire iranienne :

De nombreux stratèges américains et israéliens ont fait couler beaucoup d’encres ces dernières années à propos du programme atomique iranien, sa nature militaire, ses visées politiques et stratégiques et l’éventualité de le tuer dans l’œuf .

Parmi les études les plus sérieuses, on peut citer le rapport intitulé « Se préparer à l’Iran nucléaire » (Getting Ready for a Nuclear-Ready Iran)[1] , publié en novembre 2005 par « l’institut des études stratégiques », un organisme américain financé par le pentagone et ont participé à ce travail une brochette de 16 experts spécialistes en stratégie de la défense venant d’Amérique, d’Israël et d’Europe.

Dans leur travaux, les chercheurs sont d’accord à la quasi unanimité pour dire qu’une frappe ciblée peut réussir si les conditions suivantes sont réunies :

1°) Avoir des informations précises sur les installations iraniennes, c’est en partie le travail des équipes d’inspection de l’ONU, complété par les satellites espions américaines et israéliennes conçue à cette effet.

2°) s’assurer que les points de décollage et d’approvisionnement pour les avions chargés de l’attaque ne se trouvent pas trop loin des cibles visées ; cependant, vu que les installations nucléaires iraniennes se trouvent à environ 1500 Km d’Israël, cela pose en l’état actuelle des choses un problème aux israéliens, mais nous verrons plus loin que n’est pas forcement insupportable.

3°)La capacité des attaquants à surprendre la défense aérienne iranienne moins sophistiquée que celle des états unis et d’Israël, faute de quoi les avions risquent d’être théoriquement abattus et pourraient offrir de précieux temps aux iraniens pour organiser la riposte et déplacer les éléments mobiles de leur programme nucléaire.

4°)Une couverture politique internationale, dont les conditions ne sont pas actuellement remplies, mais cela pourrait évoluer si la chine et la Russie, les soutiens diplomatiques traditionnels de l’Iran décident de s’en tenir uniquement au poids de leurs intérêts économiques qui sont infiniment plus importants dans le camps occidental que dans le camps iraniens.

Cependant, ce qui peut véritablement empêcher toute une frappe ciblée couronnée de succès des installations nucléaires iraniennes est :

Premièrement : les installations nucléaire iraniennes sont nombreuses, distantes et dispersées aux quatre coins du pays, certaines de ces installations sont des forteresses souterraines, et si des frappes sont décidées, par les états unis et/ou Israël, il ne doit pas y avoir une seule, mais bien plusieurs frappes intensives 24 heures/24, s’étalant sur deux ou trois jours.

Le général israélien Shlomo Broum qui a participé à l’élaboration de cette étude, a déclaré en ce sens que « toute tentative de frappe du nucléaire iranien oblige à faire de nombreuses frappes intensives sur un nombre relativement important de sites bien fortifiées » .

La succès d’une telle opération, est beaucoup plus difficile que compliqué, et n’a rien à voir avec la destruction du réacteur nucléaire irakien en 1981 qui n’a nécessité qu’une seule frappe, et l’effet de la surprise par lequel brille toute la stratégie militaire israélienne s’arrêtera à la première frappe, ce qui permettrait à la défense aérienne iranienne de s’organiser efficacement et de sauver ainsi ce qui pourrait être sauvé.

Deuxièmement : En cas d’attaque, la réaction iranienne ne se ferra pas attendre, d’autant que les israéliens craignent une riposte immédiate du Hizballah installé au sud du Liban déjà bien fourni par l’Iran en roquettes «Fajr » faisant ainsi planer une menace permanente sur la partie nord israélienne, l’Iran pourrait aussi faire usage de ses missiles « Shahab 3 » capables d’atteindre Israël, mais la riposte sera beaucoup plus terrible si les frappes font apparaître des traces de radioactivités, l’usage de l’arme chimique et bactériologique par l’Iran sera plus que probable, cette option fait craindre aux israéliens de vivre le cauchemar de leur vie .

Les iraniens pourraient également recourir aux attaques des intérêts israéliens à travers le monde par l’intermédiaire de groupuscules qui leur sont liés.

De ce fait, de nombreux stratèges israéliens sont arrivés à la conclusions que dans tous les cas, ce n’est pas chose aisée de s’attaquer militairement au nucléaire iranien, car la probabilité de succès n’est pas garantie et toute tentative en ce sens restera hasardeuse, sans tenir compte des conséquences désastreux d’une telle initiative.

L’Irak serait il une base d’attaque ?

L’invasion américaine de l’Irak fait sans aucun doute partie d’une stratégie long terme, destinée à mettre une pression permanente sur l’Iran, qualifié par le président américain George Bush d’une composante de « l’axe du mal », ce qui laisse à penser que toute frappe du nucléaire iranien, si frappe aura lieu, se ferra à partir du sol irakien, une occasion en or pour les israéliens qui voit la distance avec leurs cibles écourtée de quelques milliers à quelques centaine de kilomètres.
Les américains pourraient aussi fournir toute les facilités nécessaires à l’aviation israélienne à l’accomplissement des opérations, leur assurer une couverture du ciel irakien et leur donner un coup de pouce au cas où.

Mais, en permettant aux israéliens d’assurer des frappes à partir du sol irakien, les américains se verront facturer un lourd tribus politique, car l’Iran pourrait élargir le champ de la résistance et de soulèvement aux chïtes irakiens et leur assurer une fourniture en arme de pointe en étendant leurs alliances à la guérilla sunnites combattante en Irak, allant des bassistes aux militants d’Alqaëda, cela même que les américains comptait monter les uns contre les autres pour se faire une place royal en Irak.

En outre, il est intéressant de noter un lien suspect en guise d’avertissement entre les déclarations de l’armée américaine en Irak faisant état ces derniers temps d’un nombre inhabituels d’hélicoptères abattus par des missiles bien évolué et le fait que l’Iran ait pu fournir ces armes à la guérilla .


Le ministre iranien des affaires étrangères, après avoir annoncé récemment que son pays riposterait efficacement à toute attaque de ses installations nucléaires, a ajouté qu’il n’exclut pas « d’envahir tout Etat… ». le message est adressé en filigrane aux pays voisins qui serviront de base au décollage aux avions devant bombarder les installations nucléaires iraniennes, en particulier aux états unis, l’occupant en titre de l’Irak.

Si l’arme atomique est avant tout une arme de dissuasion, et inspirant le respect à son détenteur, le président iranien Ahmedinjad ne semble pas avoir pris conscience de ses premières erreurs politiques, car remettre en cause l’holocauste, c’est chercher à dresser contre lui un large consensus internationale qui ne verrait pas en lui et dans le pays qu’il dirige une volonté de respecter les rapports de force qu’impose la détention de la bombe A, en d’autres termes, Monsieur Ahmedinjad laisse planer (peut être à tort) dorénavant sur la conscience occidentale la perspective du pire, dans ce cas l’Iran pourrait perdrait le soutien des fidèles alliés qui sont la chine et la Russie.

Avec ces déclaration pour le moins maladroites, le président Ahmedinjad ne semble pas avoir réalisé à quel point l’occident est sensible à la question de l’holocauste, il met la communauté internationale en émoi, alors qu’un discours d’apaisement aurait été le bienvenue à un moment critique de l’histoire iranienne, la première des leçons qu’il aurait dû tiré des échecs de Sadam est que:
- les devises et les autres bonnes paroles ne servent à rien dans la modification des rapports de forces stratégiques, seul les réalisations concrètes comptent.
- La folie de Sadam a fait perdre l’Irak et n’a pas rendu la Palestine aux palestiniens, un don de cinq millions d’euros aux orphelins palestiniens aurait été beaucoup plus utile que d’insulter des juifs ou d’émettre des doutes sur l’existence de l’holocauste.

Israël a toujours entretenu le secret sur sa capacité nucléaire, aucun officiel israélien ne s’aventure à se vanter de l’arme de destruction atomique que détient son pays, bien que personne n’émet le moindre doute aujourd’hui sur l’existence d’une puissance atomique israélienne.

Les israéliens savent également que les manifestations vaniteuses de forces et les tons belliqueux ne sont que l’expression de sentiments qui portent de graves atteintes aux vrais intérêts, ils savent également qu’avec un peu d’habilité et de bon sens les iraniens peuvent réaliser leurs rêves atomiques, Abraham Askoulay du centre des études stratégiques JAFA de Tel-Aviv a déclaré que : « les iraniens sont en mesure de réaliser leurs objectifs nucléaires sans encourir de sanctions s’ils ne commettent pas de folies ».


[1] le livre peut être consulté en anglais gratuitement sur Internet à l’adresse : http://www.strategicstudiesinstitute.army.mil/pdffiles/PUB629.pdf







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