Points de vue

L’islam en danger

Par Fatima Adamou*

Rédigé par Fatima Adamou | Lundi 24 Juin 2013 à 00:05



Les événements de la pré-élection du CFCM tenaient de la comédie dramatique. Rien ne manquait : le suspense, les trahisons, les coups d’éclat de dernière minute, des come-back… Cela nous aurait bien fait rire s’ils ne traduisaient pas un fait : ces représentants de l’islam de France sont coupés de la réalité. Ils ne voient pas l’urgence. Beaucoup trop de musulmans ne comprennent pas l’islam.

Un nombre important de Français parmi d’autres Européens sont partis grossir les rangs de combattants en Syrie. On entendait parler d’une petite dizaine, on parle maintenant de centaine. Si rapidement ils sont partis. Ils ont été convaincus par d’autres musulmans que leurs places étaient là-bas. Ils vont tuer au nom de l’islam. Tout comme le meurtrier de Lee Rigby, ils vont tuer, persuadés par des discours de prédicateurs musulmans rencontrés dans des lieux aussi banals que la mosquée.

Cela fait des années que voir son fils, son frère, son ami s’intéresser de près à l’islam provoque une crainte. Curieusement, plus ces jeunes gens passent de temps dans une mosquée ou à écouter des prêches sur Internet, plus la crainte grandit.

Autre réalité, nous avons une génération de jeunes gens tenant des propos haineux envers les non-musulmans, d’autres ne veulent pas être associés à des musulmans qu’ils jugent « light » ou faux. D’autres ne se représentent l’islam que comme une série d’interdictions.

Pourtant, selon toute vraisemblance, selon toute apparence, nous suivons bien l’éthique de l’islam lorsque nous nous attachons à nous placer du côté de la justice. Prompts que nous sommes à nous préoccuper du sort des victimes de politiques étrangères désastreuses de nos gouvernements européens et d’outre-Atlantique.

Mais à y regarder de plus près, les voix ne semblent ne se lever que lorsque que certaines régions du monde comprenant une majorité de musulmans sont concernées. Par exemple, le sort des Rohingyas, une communauté musulmane minoritaire en Birmanie, ne mobilise plus vraiment. Ils sont pourtant toujours persécutés, victimes de nettoyage ethnique.

Les politiques étrangères nuisibles des pays comme les États-Unis et l’Angleterre sont vivement critiquées, mais l’indulgence est de rigueur lorsqu’il s’agit de la Russie, de la Chine et de pays à majorité musulmane.

Nous sommes loin du principe de justice en toutes conditions même si cela va à l’encontre de l’intérêt d’un membre de sa famille. Nous faisons de la politique.

Nous assurer de la connaissance du Divin

Même nos nouvelles responsabilités de citoyens musulmans, résultant de notre monde moderne du XXIe siècle, ne sont pas (re)mises en cause et soumises au feu de l’autocritique.

En effet, nous maintenons des familles entières dans la pauvreté. Nous les contraignons à des conditions de travail pénibles, nous les soumettons à des risques. L’effondrement d’un immeuble d’usine textile au Bangladesh, en avril dernier, l’a rappelé. Nous pratiquons plus ou moins les mêmes méthodes que certains gouvernements : nous fermons les yeux sur les conséquences catastrophiques pour sauvegarder nos intérêts propres : acheter nos vêtements toujours moins chers.

Une pleine et entière réflexion sur des alternatives possibles serait toutefois en droite ligne avec les préceptes de justice sociale de l’islam.

Alors, que nous a-t-on enseigné depuis toutes ces années pour que l’islam soit devenu à ce point la religion de la vengeance, de la guerre, d’interdits, de diatribes anti-Occident et de considérations sélectives pour les êtres humains ?

C’est certain, ces concepts attribués à l’islam n’ont pas été véhiculés tout seuls. Les savants, les prédicateurs sont des êtres humains, eux aussi susceptibles de commettre des erreurs. Ne pas questionner ni invalider l’interprétation de certains d’entre eux, allant de toute évidence à l’encontre de l’esprit de l’islam, c’est nous rendre complices des mauvaises et pires actions qui en découlent.

Notre priorité devrait être la révision de l’apprentissage de l’islam. Nous assurer de la connaissance du Divin. Le Très-Haut est finalement le grand oublié.

On pourrait demander à chaque musulman de nous parler du Prophète Muhammad – la paix soit sur lui –, chacun de nous conterait sa biographie, mais qu’on nous interroge sur le Créateur de l’humanité il n’est pas certain que nous sachions vraiment qui Il est !

Clément et Miséricordieux : ces deux mots, répétés à chaque instant, disent, à eux seuls, tout de l’islam. Malgré cela, même entre coreligionnaires musulmans, ni la clémence ni la miséricorde ne sont la règle.

Sans nul doute, l’enseignement de leur sens redonnerait aux communautés musulmanes la patience, la persévérance, la recherche de la réconciliation plutôt que le conflit.

* Tutrice de français en Grande-Bretagne, Fatima Adamou est également researcher bénévole à l'association Christian Muslim Forum.