Finance éthique

La Place de Paris a son 'sharia board'

ACERFI, premier comité francophone de conformité en finance islamique

Rédigé par Assmaâ Rakho Mom | Vendredi 5 Décembre 2008 à 19:44

L'association AIDIMM a annoncé dans un communiqué datant du 1er décembre 2008 la naissance du premier "sharia board" ou comité de conformité en finance islamique francophone. Composé de savants Français ou francophones, ACERFI (Audit, conformité, éthique et recherche en finance islamique) "aura pour mission d’accompagner les acteurs français dans leur développement et leur conformité aux règles de finance islamique, tant au plan national qu’au plan international".



Le premier comité de conformité francophone de la finance islamique est officiellement né. L'association AIDIMM (Association d'innovation pour le développement économique et immobilier) a annoncé la nouvelle dans un communiqué datant du 1er décembre 2008, plaçant le comité dans la perspective d'un développement important ces derniers mois de la finance islamique en France. ACERFI (Audit, conformité, éthique et recherche en finance islamique), c'est son nom, se propose selon Boubkeur Ajdir, le secrétaire général d'AIDIMM, "de travailler avec les institutions francophones et les acteurs de la finance sur le développement de la finance islamique en France", et de "d’apporter son expertise en droit musulman et son savoir-faire sur les produits financiers dits Charia-compatibles".

ACERFI a été créé à l'initiative de l'association AIDIMM qui, depuis un certain temps "réfléchit à la mise en place d'un comité d'éthique qui puisse valider les produits en conformité avec les principes de la finance islamique". La création des premiers produits de finance islamique sur l'île de la Réunion en février 2008 permet à l'AIDIMM de se rapprocher des savants de l'île. Dans le même temps, l'association consulte régulièrement au cours de ses travaux d'autres savants francophones. L'opportunité s'est donc présentée d'elle-même de créer ce comité de conformité, une structure qui regroupe toutes les écoles juridiques musulmanes.

Selon Boubkeur Ajdir, ACERFI reste une structure indépendante quant à ses décisions et ses avis, l’association AIDIMM en assure le rôle de "plate-forme administrative".


La création de ce premier comité de conformité francophone comblerait un réel manque, nous a affirmé M. Ajdir. Un manque qui a "poussé les savants à se spécialiser et à consacrer beaucoup de leur énergie à ce sujet-là". Les banques et autres financiers ont besoin d'un comité comme ACERFI et d'experts en droit musulman pour valider la conformité des produits qu'ils souhaiteraient proposer. Et les savants moyen-orientaux s'intéressant à ce sujet ne connaissent pas vraiment le contexte français. Or les savants composant ACERFI le connaissent puisqu'ils y évoluent, tels que Cheikh Zakaria Seddiki, qui présidera le comité et qui dirige la Maison des Savoirs, du Moufti Louqman Ingar, diplômé en Sciences de Gestion à l’Université de la Réunion, en Shariah et en Fiqh de l’Université Islamique Azaadville – Johannesburg – Afrique du Sud, et imâm et enseignant à la Grande Mosquée de Saint-Denis, ou encore du Cheikh Mouhammad Patel, diplômé en Shariah de l’Université Islamique Zakariya de Johannesburg – Afrique du Sud, et imâm et enseignant à la Mosquée de Saint-Pierre.

ACERFI apportera des idées nouvelles, des alternatives, encouragera les financiers à s'intéresser davantage à la finance islamique et à ce qu'elle propose. A très court terme, même si Boubkeur Ajdir reste discret sur les détails, ACERFI a un "projet de validation d'un produit" de finance islamique pour la France. Des publications sont également en cours d'élaboration. A plus long terme, le comité devrait mettre à la disposition du grand public des outils de compréhension de la finance islamique. Les membres d'ACERFI pourraient alors intervenir dans le cadre de conférences, des formations dispensées déjà régulièrement par l'association AIDIMM et un forum sur Internet est aussi à l'étude.

Il n'existe pas encore d'estimation chiffrée concernant la finance islamique en France, même si au niveau mondial elle est estimée à 700 milliards d'euros, selon le communiqué de presse d'ACERFI. Toutefois, s'agissant des banques d'investissements, en France elles souhaitent attirer 100 milliards de dollars. Les banques de détail elles, ont tardé à se pencher sur la finance islamique, d'où le vide s'agissant des chiffres et des estimations. L'association AIDIMM, en collaboration avec la société britannique spécialisée en Finance Islamique IFAAS, a demandé durant le printemps 2008 à l'IFOP de réaliser un sondage d'où il ressort que "47 % des musulmans vivant en France seraient intéressés par un contrat d’épargne et 55 % par des emprunts qui respectent l’éthique islamique".